Jeune quadragénaire, Joëlle Colin tente de vivre du sport qu’elle apprécie et pratique. Sa vie fut marquée par la polio, contractée quasiment à la naissance. Son enfance et son adolescence, elle les passera dans un centre de rééducation de la presqu’île de Gien (Var). Sa famille n’a pas résisté au handicap, ses parents ont divorcé, c’est au sein de l’hôpital René Sabran que Joëlle vivra ses seize premières années : « Mes plus beaux souvenirs sont là- bas », précise- t-elle…

Joëlle Colin est partie, en juin dernier, de Cerbère (Pyrénées- Orientales) pour rallier en trois jours Menton (Alpes- Maritimes) à travers la Méditerranée. 500 kilomètres en trois étapes, assise sur son ski nautique adapté, les bras en tension permanente derrière un canot rapide. Avec une vitesse dépassant parfois les 60 km/h: « C’est mon deuxième défi, explique Joëlle Colin, le premier était Hyères- Calvi en juillet 2002. Je suis arrivée à la pratique du ski nautique en rencontrant un éducateur sportif travaillant à Fréjus (Var), Jean- Louis Ferrari. Je pleure encore sa mort, survenue au printemps dernier. Il m’a entraîné, formé à une discipline que la Fédération Française Handisport refuse de reconnaître ». Heureusement, les handisportifs peuvent s’affronter en compétition dans une catégorie spécifique au sein de la Fédération Française de ski nautique et des fédérations internationales: « Je m’entraîne et pratique ce sport au milieu des valides, je fais même parfois des compétitions contre eux. La pratique est la même, les sauts sont également réalisables, même en ski assis ».

« Relever un défi est un besoin personnel, une volonté d’être la première, de laisser mon nom dans l’histoire, dit Joëlle en riant. Je veux également faire passer le message que c’est possible, qu’avec la volonté et un équipement adapté on peut tout faire et se surpasser ». Cette volonté, Joëlle en a eu besoin pour vaincre une météo défavorable, le 21 juin dernier lors de son deuxième défi, Water- Side, avec un violent mistral au large de la Camargue. Seule en mer avec son gilet de sauvetage et une radio V.H.F qui la reliait au P.C Sécurité et au bateau tireur. Si elle a réussi son défi, c’est peut- être grâce à un opérateur radio du Crossmed (secours en mer) qui lui a souhaité bon courage dans les éléments déchaînés; elle a coupé la radio et a voulu finir son parcours plutôt que d’abandonner. Malgré la souffrance, les ampoules aux mains et des hématomes qui ne sont pas encore résorbés trois mois après la traversée !

« Pour remporter mes défis, j’ai dû m’appuyer sur des partenaires, je n’aurais pas pu les réaliser sans leur concours financier ou logistique. C’est hyper- dur de faire ses preuves. Est- ce que c’est dû au handicap, au fait que je suis une femme ou que je pratique un sport peu médiatique ? »… Quant à l’entraînement, il a duré huit mois à raison de 4 à 6 heures par jour. L’après- défi conduit Joëlle à s’interroger : « J’avais arrêté de travailler, je vais probablement devoir reprendre une activité salariée. Accéder à un statut professionnel est très difficile ». Les prochains défis de Joëlle sont à ce prix…

Laurent Lejard, septembre 2003.

Le palmarès de Joëlle Colin en ski nautique : Championne d’Europe en 1988 et vice- championne d’Europe en 1992, catégorie Slalom. Championne de France en 1992, catégorie Slalom. Vice- championne du Monde en 1993, combiné Slalom- Figures- Saut. 1ere en National en 2001 et 2002, Slalom et Ffigures. Record de la traversée à ski nautique Hyères- Calvi en 6 heures 20 minutes et 50 secondes, le 23 juillet 2003.

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