« Elles », tel est l’argument de l’exposition de photographies de femmes handicapées réalisées par Miss Buffet Froid et que finalise actuellement la jeune Association pour la Reconnaissance et l’Epanouissement de la Femme en situation de Handicap (AREFH). « J’ai créé l’AREFH parce qu’il n’existe pas d’accueil spécifique adapté », explique sa fondatrice, Amélie Laguzet, âgée de 34 ans (dont 18 de tétraplégie consécutive à un accident) et mère de deux fillettes. Elle avait envisagé de rejoindre l’une des deux associations de femmes handicapées nationalement connues, Femmes pour le Dire Femmes pour Agir (FDFA) et Réponses Initiatives Femmes Handicapées (RIFH), mais elle les a trouvées trop féministes au sens revendicatif du terme : « Alors qu’AREFH agit pour redonner confiance aux femmes handicapées, être considérées en tant que femme avant leur handicap. On travaille sur l’estime et la confiance en soi, l’inclusion, le regard des autres, pour l’accès aux soins, la gynécologie notamment. AREFH est dans un petit département, le Doubs. On fait des actions de sensibilisation au handicap dans les lycées. La dernière s’est très bien passée, avec des élèves qui posaient beaucoup de questions. On élabore un recensement des cabinets médicaux, portant sur leur accessibilité et la qualité d’accueil des femmes handicapées, un point très important. Cela concerne la gynécologie, et les autres soins. Un partenariat avec l’hôpital de Besançon est en projet. »
L’association a effectué une enquête à laquelle 35 femmes âgées de 18 à 60 ans ont répondu: la moitié d’entre elles n’a jamais consulté un gynécologue, du fait d’un handicap lourd ou de leur placement en institutions médico-sociales, la préoccupation de ces dernières n’étant pas de faire suivre leurs pensionnaires féminines par un gynéco. « La plupart des répondantes ont précisé qu’elles achètent leurs sous-vêtements sur Internet, sans les essayer, commente Amélie Laguzet. Ce sont des achats intimes, on ne les demande pas aux aidants, à la famille, aux amis. »
L’association aimerait mettre en place un programme, « Individu’Elles », pour former des professionnels à cet accompagnement discret et respectueux des femmes qui ont besoin d’aide pour ce genre d’actes privés. « Il y a un vide à cet égard dans la Prestation de Compensation du Handicap, poursuit Amélie Laguzet. Elle ne prévoit pas cet accompagnement pour des actes d’intimité respectée, y compris ce qui concerne les produits érotiques. Moi, je n’ose même pas commander sur Internet, parce que ce n’est pas moi qui vais ouvrir le colis… »
Le débat sur la vie affective et l’accompagnement sexuel s’est posé au sein des adhérentes d’AREFH : « Une partie veulent que l’on introduise l’aspect de l’accompagnement sexuel dans l’exposition photographique ‘Elles’, reprend Amélie Laguzet. D’autres pensent qu’il ne faut pas mélanger l’image de la femme handicapée et la sexualité. Mais les jeunes sont intéressées par ce sujet, d’autant que nous sommes voisins de la Suisse, où existe une assistance sexuelle. » AREFH présentera d’ailleurs l’exposition ‘Elles’ lors d’un colloque sur la sexualité des personnes handicapées organisé à Montbéliard le 3 octobre prochain, avec notamment la participation de Marcel Nuss. Avant d’autres rendez-vous qu’elle espère élargir à d’autres régions que la sienne.
Laurent Lejard, mai 2013.