Maud est fondatrice et patronne de « La troisième planète » : celle où conception et professionnalisme riment avec bonne humeur, fête et plaisir de faire. Psychosociologue et Conseil en communication, elle coordonne une belle grosse troupe de professionnels dans laquelle on compte des ingénieurs, des directeurs artistiques, des saltimbanques, traiteurs, musiciens, graphistes, etc. Tous indépendants. Avec eux, elle orchestre des actions de conseil, des séances de coaching pour des dirigeants de petites et moyennes entreprises, elle organise des événements, livrant petites et grandes fêtes clef en main, notamment pour la Gaumont ! Une étonnante chef d’orchestre posée sur son fauteuil roulant suite à une poliomyélite enfantine.

Maud sourit mais Maud dénonce ! Elle dit non à la hiérarchie entre les personnes handicapées : « A bas les échelles de valeur et les conflits entre handicapés moteurs ou sensoriels, porteurs de handicaps innés ou acquis, de handicaps consolidés ou évolutifs. Nos problèmes ne sont pas les mêmes, mais nous sommes tous de la différence! ». Elle dit non aux réflexions impulsives et mesquines qu’elle peut susciter (« Elle a bien de l’argent pour une handicapée, elle doit toucher plein d’allocations! », « Ah, je comprends tout, elle est juive! », « Regarde cette dame en fauteuil toute pimpante et maquillée: quelle ironie! ») Être handicapée, féminine et agréable semble incompatible ou inconvenant! Elle dit également non au travail salarié. Non pas que cela lui déplaise, « mais quel employeur accepterait ces trois casquettes sur ma tête, en plus du fauteuil sous mes fesses ? ». Elle raconte d’ailleurs combien les employeurs comme les clients, ont infiniment moins confiance en une personne handicapée qu’en une personne valide et combien ils sont particulièrement reconnaissants quand les résultats sont là, fiers d’avoir « osé » confier cette mission à une femme handicapée.

Elle dit non à la suprématie féminine : « Evitons de passer d’un extrême à l’autre. En mettant à ce point les femmes en avant, je crains que l’on crée une nouvelle caste de femmes qui vont être bien isolées des hommes! » . Et, « last but not least », elle n’apprécie vraiment pas les groupes établis, institutionnalisés, dans lesquels on détecte trop d’inacceptables rigidités. La palme, dans ce domaine, elle la donne à quelques vieilles associations, travaillant plus à leur survie qu’à la réelle défense des personnes handicapées. En collectant les sous de ci de là, ces associations colportent l’idée du misérabilisme plutôt que celle de la dignité. Résultat : « Les personnes handicapées de notre pays vivent cachées et dans une sacrée misère morale ! »

Sauvée par ses sens, sa grande gueule joyeuse et son esprit pratique. Elle ne cherche plus à braver, elle a décidé de se faire épauler. Elle travaille autant qu’elle peut pour payer les personnes qui viennent l’aider. Les allocations dédiées aux personnes handicapées lui permettraient à peine de survivre, certainement pas de vivre. Elle travaille avec plaisir, mais non sans efforts. Et sur son chemin, elle crée une multitude de liens humains. Cela ne plait pas toujours, c’est bien sûr! Et quand le fauteuil roulant ne peut la mener à destination, elle exploite une étrange force télépathique. Est- ce ainsi qu’elle nous a accroché? Possible… Toujours est- il que Maud ne peut passer inaperçue: elle a une belle corpulence, une sacrée voix et une allure pas banale! Alors nous avons pris le temps d’échanger… Et le handicap? « Il m’immobilise, il me déforme, il est une véritable souffrance. Il écrème aussi toutes ces personnes qui ne supportent pas la différence et c’est tant mieux ». Positivisme forcené ?

Elle travaille souvent sur le net, sentant qu’en gommant les apparences physiques, il devient une véritable voie d’expression pour tous. Elle s’est donc également lancée sur cette voie, développant un annuaire universel du net. Mais où puise-t-elle cette énergie, d’où tient- elle cet élan ? « Dans mes cinq sens » explique-t-elle très naturellement. Elle a appris à les développer quand elle était encore toute petite, sous le soleil de la méditerranée puis sur ses multiples lits d’hôpitaux. Depuis lors, sa sensualité lui permet d’évoluer avec plaisirs et bien-être…

Véronique Gaudeul, janvier 2001.

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