A vingt-sept ans, elle est une vedette du monde des handicapés moteurs. Dorine, vous l’avez probablement vue à la télévision ou entendue à la radio, elle est la première française paraplégique à avoir obtenu un brevet de pilote privé sur avion… mais l’administration de l’aviation civile lui refuse le droit de travailler !

Sa vie a commencé dans un bourg de la Loire, entre des parents très occupés par leur entreprise d’ambulance- taxi et un grand frère. Privée d’affection parentale, prisonnière d’une vie rurale, Dorinne cherche l’évasion dans les airs : son père aime voler, et elle le suit sur les aérodromes. Ce sont là leurs quelques moments de connivence, si ce n’est de complicité. Jusqu’à l’accident, en mai 1991, à l’âge de 17 ans. Le Piper Apache qui la transporte est pris dans un orage, il s’écrase dans le Forez, Dorine est la seule rescapée, elle se réveillera paraplégique.

pprentissage du fauteuil roulant, découverte de sa nouvelle identité sociale, c’est en pleine adolescence qu’elle va se reconstruire en se donnant un but, une raison de vivre: voler. Le hasard des rencontres lui permet de prendre les cours qui l’amèneront à obtenir son brevet de pilote quatre ans après son accident, et de participer dans la foulée à son premier rallye aérien, le Toulouse- Saint- Louis du Sénégal. Avec ses équipiers, elle termine première. Cela n’émeut guère les caciques de la Direction Générale de l’Aviation Civile qui lui refusent le droit de travailler comme pilote privé. Ce qui est possible, légal, normal, aux USA depuis 20 ans demeure interdit en France et en Europe : handicapé des membres inférieurs = interdiction professionnelle absolue. Que des américains paraplégiques ou amputés transportent passagers ou marchandises avec un taux de sécurité plus élevé que leurs confrères valides, l’administration française n’en a cure et ses dirigeants traitent Dorine (« et en plus c’est une femme ») – par le mépris.

Alors, c’est par l’écriture et la médiatisation de sa vie et de son combat qu’elle veut faire plier les bureaucrates. Pour aller jusqu’au bout de ses envies, pour vaincre ce qui a brisé son corps et fortifié son âme : l’avion, ses ailes, son rêve…

Laurent Lejard, juin 2002


La Couleur préférée de ma mère, récit/ témoignage de Dorine Bourneton, est paru en 2002 aux Éditions Robert Laffont. 198 pages, 18,10 euros.

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