Alors que l’avant-projet de loi sur l’égalité des droits des personnes handicapées était transmis au Conseil d’Etat pour avis, c’est le devenir de la Sécurité Sociale qui a connu les feux de l’actualité. Le coup de tonnerre est venu d’un militant du Médef, Daniel Bouton, accessoirement P-D.G de la Société Générale : mise en concurrence avec les assurances privées, récupération des remboursements de soins sur la succession des bénéficiaires, augmentation de la Contribution Sociale Généralisée en fonction de l’âge de l’assuré social, forfait à la charge de l’assuré sur chaque ordonnance de médicaments ou achat de prothèses, remise en cause des prises en charge à 100%. A la lecture des propositions de ce zélé patron, on se demande s’il y aura encore quelque intérêt à cotiser à l’Assurance Maladie dans l’hypothèse où ces propositions seraient suivies d’effet. Ceux qui pensent que ça n’arrivera pas devraient se rappeler le travail de sape mené il y a quatorze ans par un autre militant du Médef, Denis Kessler, alors Président de la Fédération Française des Sociétés d’Assurance; une grande partie des mesures qu’il prônait dans son rapport sur les retraites sont entrées dans la réforme voulue par le gouvernement Raffarin en 2003. L’immolation de notre Sécurité Sociale sur l’Autel du Patronat Français prendra peut- être moins de temps puisque c’est dans six mois que le Ministre de la santé et des personnes handicapées, Jean- François Mattéi (ou celui qui lui succédera après les élections de mars) doit présenter son projet de réforme.

Le même ministre, et peut-être également Marie-Thérèse Boisseau, devront mener une autre bataille pour faire passer au Parlement leur projet de loi d’égalité des droits des personnes handicapées. Leur texte a suscité une opposition quasi- unanime, tout juste soutenu par l’Unapei, association qui peine à couper le cordon ombilical avec son ancien Directeur Général et actuel Délégué Interministériel aux personnes handicapées Patrick Gohet. Les personnes handicapées et les associations attendaient une véritable réforme, elles n’ont reçu qu’une vague réécriture des lois existantes auxquelles sont accolées quelques bonnes intentions, l’ensemble bardé de décrets. Quand on se rappelle que la moitié des décrets d’application de la précédente loi d’orientation, votée en 1975, n’ont jamais été publiés, on peut légitimement douter de la viabilité de la déjà bancale loi Boisseau. Ne doutons pas que la très médiatique psychanalyste et universitaire Julia Kristeva, qui forte du soutien de Jacques Chirac a su envahir le monde du handicap au point que peu de manifestations ont lieu sans son parrainage, saura monter au moyen des Etats- Généraux qu’elle prépare l’opération de propagande qui jettera au public la poudre aux yeux qui va bien.

Bref, après une Année Européenne des Personnes Handicapées qui aura été, en France, particulièrement bavarde, ponctuée d’innombrables colloques et séminaires dont la portée reste à apprécier, 2004 apparaît comme l’année de tous les dangers.

Laurent Lejard, janvier 2004.

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