Quatre jours avant la manifestation nationale appelée par près d’une centaine d’associations de personnes handicapées, Nicolas Sarkozy tente de démontrer que son gouvernement oeuvre en faveur des personnes handicapées. Espérant calmer la colère des centaines de milliers de personnes qui voient régulièrement leurs allocations et prestations baisser par rapport à la hausse des prix et du SMIC, le Président de la République annonce que le Gouvernement tiendra enfin le 1er septembre prochain la promesse de revaloriser l’allocation adulte handicapé de 5 % en 2008 (pensions d’invalidité et rentes accident du travail ne sont pas concernées). Cette annonce s’accompagne de la promesse d’une redéfinition des conditions de cumul de la prestation avec un salaire, sans plus de précisions quant aux dispositions envisagées. Enfin, le Président insiste sur la nécessité de lancer un Pacte national pour l’emploi des travailleurs handicapés mobilisant les entreprises et les fonctions publiques, affirmant : « Je vais faire de la question du handicap une priorité absolue de mon quinquennat ». Son prédécesseur, Jacques Chirac, l’avait déjà dit; visiblement ses cinq années de priorité n’auront pas été suffisantes, Nicolas Sarkozy double donc la dose.

Sur ce terrain, rien de nouveau dans un discours volontariste déconnecté des réalités : les passerelles entre milieu protégé et ordinaire de travail existent depuis des décennies mais ne sont pas utilisées, les actions de formation sont déjà innombrables et obtiennent des résultats contrastés, les entreprises sont aidées et subventionnées pour embaucher, ce qu’elles font quand elles trouvent les compétences dont elles ont besoin puisque le quota d’emploi a progressé de 10% ces dernières années. En revanche, la fonction publique de l’État reste à la traîne, et les gouvernements Villepin et Fillon ont montré un bien mauvais exemple en exemptant d’obligation de résultat le Ministère de l’éducation nationale, qui compte à lui seul plus de la moitié des agents de l’État.

En effet, l’affirmation présidentielle selon laquelle il suffit que les entreprises embauchent des travailleurs handicapés pour résorber leur temps de chômage excessif est à courte vue : elle oublie que les entreprises recrutent des compétences génératrices de productivité et de profits, compétences qu’elles ne trouvent pas chez la plupart des chômeurs handicapés du fait de leur faible niveau de formation initiale et de qualification acquise dans l’emploi. Par ailleurs, on peut douter de la volonté du Président de la République et de son gouvernement d’agir positivement sur la formation initiale, acquise de l’école à l’université, lorsque l’on constate les suppressions massives de postes d’enseignants et le risque programmé d’emballement des dépenses engagées pour suivre des études supérieures.

Prochaine étape de la « priorité absolue » du quinquennat Sarkozy, la Conférence Nationale du Handicap, reportée au 10 juin 2008, veille du salon biennal Autonomic Paris : une coïncidence, sans doute… Le Président de la République a annoncé qu’il présiderait cette conférence, qui commence à prendre l’allure d’une grand-messe : avec le savoir-faire qu’on lui connaît, le Président saura lui donner une dimension médiatique et mettre en valeur le Pacte national pour l’emploi des travailleurs handicapés qu’il lancera. Certes, l’idée n’est pas nouvelle, de 2003 à 2007 les ministres en charge des personnes handicapées en ont signé des dizaines avec des entreprises, des collectivités territoriales, des organismes du service public de l’emploi, des entreprises privées, etc. Mais puisqu’il convient toujours de faire crédit à la bonne volonté affichée, rendez-vous le 10 juin 2008 au soir pour savoir si cette première Conférence Nationale du Handicap accouchera d’autre chose que des éternels discours volontaristes et creux…



Laurent Lejard, mars 2008.

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