En ce mois de février 2010, les citoyens français vont redécouvrir (à quelques semaines d’une importante échéance électorale) les personnes handicapées : la loi promulguée le 11 février 2005 et qui se voulait refondatrice de la solidarité nationale en faveur des personnes handicapées va fêter ses cinq ans. Encore un bébé, qui a d’autant plus de mal à marcher que les obstacles placés sur son chemin par l’administration centrale, les lobbys et le Gouvernement le transforment en parcours du combattant. Rien que de très normal, hélas : la vie quotidienne des citoyens handicapés en France est semée d’embûches. Certes, ils ne sont pas les seuls, les pouvoirs publics conservant cette tendance naturelle à compliquer la vie des plus vulnérables, travailleurs pauvres, demandeurs d’aide sociale, d’asile ou du Revenu de Solidarité Active…

Mais la tonalité ministérielle sera teintée d’eau de rose pour vanter l’intérêt que les ministres concernés portent aux personnes handicapées : rendez-vous est donné, par exemple, le 9 février pour l’installation en grande pompe du Comité Interministériel du Handicap. Un Comité sans équipe ni moyens propres, dont l’efficacité repose sur les épaules d’un seul homme, son Secrétaire Général, le haut fonctionnaire Thierry Dieuleveux. Le devenir de l’action interministérielle dépend de ses capacités à appréhender les dossiers, son relationnel au sein des directions ministérielles et de l’autorité que lui octroiera – ou pas – le Premier ministre dont il émane directement. De ce fait, l’intérêt ou la futilité du Comité Interministériel du Handicap, tel qu’il a été constitué, devra être apprécié sur un plan essentiellement politique.

Second grand rendez-vous (ou grand-messe) de cette semaine anniversaire, la création le 11 février de l’Observatoire de l’Accessibilité Universelle. On aura alors quelques éléments sur la pertinence de cette nouvelle structure qui sera toutefois privée du statut coercitif d’autorité administrative : elle ne sera pas chargée d’évaluer l’accessibilité effective sur le terrain, ni de sanctionner les manquements. Espérons toutefois qu’elle aura plus d’utilité que l’Observatoire National sur Formation, la Recherche et l’Innovation sur le Handicap (ONFRIH)…

Ces deux événements, fortement médiatisés, réussiront peut-être à masquer le point d’arrêt marqué dans la mise en oeuvre de la loi du 11 février 2005 sur un aspect essentiel : la suppression des barrières d’âge. Si l’extension a minima, dans des conditions très restrictives par rapport à l’esprit de la loi, de la Prestation de Compensation du Handicap a été réalisée en faveur des enfants et des adolescents, il n’est plus question de respecter l’obligation légale d’octroyer cette P.C.H aux personnes âgées de 60 ans et plus. La question est renvoyée à l’élaboration de la future législation sur le 5e risque dépendance, qui a déjà pris deux ans de retard. En ne respectant pas l’échéance fixée par le législateur en 2005, le Gouvernement va altérer l’autonomie et la vie à domicile de dizaines de milliers de personnes handicapées âgées. Avec une grosse économie à la clé, le montant moyen de l’Allocation Personnalisée d’Autonomie versé aux personnes âgées dépendantes représentant moins de la moitié de celui de la P.C.H. Sans même qu’on leur demande leur avis, les personnes handicapées sont déjà mises à contribution pour réduire les déficits publics !

Laurent Lejard, février 2010.

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