Trois jours avant la plus importante opération annuelle de communication sur le tourisme des personnes handicapées, le site web de l’Association Tourisme et Handicaps (A.T.H) organisatrice de l’événement a disparu des écrans ! La faute en incombait au non-renouvellement à la date-butoir du nom de domaine de… l’hébergeur du site, Servicit, en liquidation judiciaire depuis le 16 septembre 2011. Pendant ces six mois de délai, les dirigeants de l’ATH ne se sont pas inquiétés du problème, sa présidente, Annette Masson, concédant dans une interview publiée sur le blog Faire Face du 30 mars dernier que le site « aurait besoin d’un sérieux lifting ». Contactée par téléphone le 28 mars, la secrétaire administrative de l’A.T.H n’était pas informée des raisons de l’indisponibilité du site Internet de l’association : « La personne qui s’occupait de notre site Internet est décédée il y a un an, c’est maintenant la présidente, Annette Masson, qui s’en charge. » Le site a été remis en ligne en urgence le 3 avril par la société Galaxya, « groupe Internet proposant des solutions de rentabilisation de sites Internet pour webmaster »…

A sa décharge, la présidente de l’Association Tourisme et Handicaps est certainement très prise par la promotion du tourisme des personnes handicapées, pour lequel elle a créé en juillet 2008 Amaryllis Conseil : cette société se présente comme un acteur du tourisme pour tous, afin d’aider les entreprises à « répondre aux attentes de personnes à besoins spécifiques », d’épauler des destinations françaises « dans la promotion de leur offre touristique, plus particulièrement dans le domaine des ‘destinations pour tous », d’informer les particuliers « sur les sites et établissements touristiques accessibles aux personnes en situation de handicap ». La société gérée par Annette Masson propose « grâce à son implication dans le label ‘Tourisme et Handicap’ [de] trouver des réponses adaptées aux attentes des personnes à besoins spécifiques pour l’organisation de leurs loisirs et leurs vacances. Pour éviter tout désagrément, les propositions d’Amaryllis, tant en France qu’à l’étranger sont toujours vérifiées au préalable. » Un travail aisé à réaliser : il suffit à Madame la Gérante d’utiliser les données de l’Association Tourisme et Handicaps qu’elle préside. Et si Madame la Présidente a toujours refusé de diffuser sur le site Internet de l’association les labels Tourisme et Handicap, Madame la Gérante les publie sur celui de sa société… laquelle « est en mesure d’assurer des sessions de formations [à] l’accueil des personnes en situation de handicap [et à] l’évaluation des sites touristiques dans le cadre de la labellisation ‘Tourisme et Handicap »…

Les esprits chagrins crieront à la confusion des genres, alors qu’il ne s’agit certainement que de synergie entre une association à but non lucratif et une société de services à but lucratif… En effet, l’A.T.H n’apporte aucun conseil aux professionnels souhaitant mettre un lieu ou un service touristique en accessibilité pour obtenir sa labellisation Tourisme et Handicap. Cette lacune est comblée par des sociétés et des cabinets de consultants, tel celui qu’exploite en profession libérale depuis octobre 2009 Dominique Rabet, par ailleurs administratrice de l’A.TH, sous le nom « DR Consultant » et présenté ainsi sur Rezotour : « Le cabinet DR Consultant […] est un cabinet conseil en tourisme et loisirs (animation, formation, conseil opérationnel). Il intervient plus particulièrement dans [le] tourisme adapté pour les personnes handicapées ». Dominique Rabet est également Vice-présidente chargée du handicap à la Fédération Française des Techniciens Supérieurs du Tourisme (FFTST) présidée par… Annette Masson ! On comprend mieux, dès lors, que ces dames manquent de temps à consacrer à l’A.T.H, d’autant qu’il s’agit de « pur bénévolat » rappellent-elles systématiquement lorsque l’on évoque le label Tourisme et Handicap… L’association gestionnaire est pourtant financée par l’État à hauteur de 140.000€, alors qu’elle n’emploie qu’une secrétaire administrative. En l’absence de dépôt légal des comptes, on ne connaît pas l’usage de cette dotation, qui sera néanmoins augmentée de 50.000€ en 2012 pour gérer le projet de label Destination pour tous.

La promotion du tourisme des personnes handicapées au moyen du label Tourisme et Handicap est une belle et grande idée qui garantit un accueil et des services adaptés aux touristes à besoins spécifiques. Mais avec moins de 4.500 sites, la diffusion de ce label piétine depuis plusieurs années. De leur côté, les exploitants et prestataires se plaignent de formalités lourdes, d’absence de conseil préalable, de longs délais d’instruction des demandes. Et le fossé se creuse entre des professionnels volontaires pour accueillir des visiteurs handicapés et la réponse apportée par l’Association Tourisme et Handicaps, qu’il serait grand temps de réformer avant le naufrage final.

Laurent Lejard, avril 2012.


NB : le label Tourisme et Handicap est une marque déposée propriété de l’État. Sa gestion a été confiée à une association, qui a dû ajouter, dans sa dénomination, un S à Handicap : l’Association Tourisme et Handicaps.

Post Scriptum : dans un mél reçu vendredi 13 avril, Dominique Rabet précise qu’elle exerce en tant que profession libérale depuis avril 1997 (et non pas octobre 2009). Elle assure par ailleurs avoir démissionné en 2007 de la Fédération Française des Techniciens Supérieurs du Tourisme (alors que cette dernière la mentionne toujours dans son « Qui est qui? » sous la qualité de « Vice-présidente chargée du handicap »). Dont acte.

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