Les chiffres pour 2012 de la situation de l’emploi des personnes handicapées, communiqués par l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) sont catastrophiques : baisse des embauches de 2%, chute de 27% des Contrats à Durée Indéterminée, augmentation de 25% du nombre de demandeurs d’emploi travailleurs handicapés (DETH) inscrits à Pôle Emploi (370.674 fin 2012 contre 295.611 fin 2011). La crise économique résultant de la spéculation financière et des politiques d’austérité censées régler le problème fauche les travailleurs handicapés par milliers, amplifiant une tendance amorcée en 2009 : « En quatre ans, précise l’Agefiph, le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté de plus de 60 % pour les travailleurs handicapés et de plus de 40% pour l’ensemble des publics. »

Certes, l’Agefiph souligne à juste titre que le nombre de salariés handicapés dans les entreprises du secteur privé assujetties à l’obligation d’emploi « est passé de 210.000 en 2000 à 336.900 en 2010, soit une augmentation de 60 % en 10 ans. » Cette progression résulterait, selon elle, d’une mobilisation des entreprises dans lesquels le taux d’emploi direct s’est accru de 20% de 2007 à 2012. Effectivement, l’action en direction de ces entreprises a été intense, afin qu’elles identifient dans leurs effectifs les salariés ayant une Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH) qu’ils s’étaient gardés de communiquer à leur employeur, ou dont l’état justifiait d’en obtenir une. L’intense campagne d’information conduite auprès des entreprises soumises à l’obligation d’emploi avait permis de réduire significativement le nombre de celles qui étaient à quota zéro, un objectif recherché par l’Agefiph qui redoutait une forte progression de ses recettes qui auraient attiré la convoitise de l’État, tenté de ponctionner l’organisme comme cela a été fait dans le passé. Ces entreprises à quota zéro auraient dû payer 1.500 fois le taux horaire du Smic par an et par emploi manquant.

Finalement, cette campagne, accompagnée de la signature de nombreux accords d’entreprises permettant de déroger au versement Agefiph, a entrainé une baisse sévère de la contribution : de 574 millions en 2009, cette collecte était de 474 millions en 2012, 100 millions de moins pour s’occuper de 50% de chômeurs handicapés de plus. A cela il convient d’ajouter les transferts de compétences décidés par le précédent gouvernement, qui a confié à l’Agefiph, sans les budgets correspondants, la gestion de la déclaration obligatoire effectuée par les entreprises (coût supplémentaire : 10 millions d’euros), ainsi que le financement de la formation professionnelle des demandeurs d’emploi handicapés (impact négatif de 100 millions d’euros).

L’actuel gouvernement a décidé de poursuivre cette politique, tout en affirmant que l’emploi des personnes handicapées est une priorité : mais comment favoriser et accompagner le retour vers l’emploi avec des moyens financiers en berne ? La présidente du Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées, la député socialiste Martine Carillon-Couvreur, s’en faisait l’écho devant la commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale, le 5 juin dernier : « Les 103 structures Cap emploi [financées par l’Agefiph NDLR] qui interviennent en faveur de l’emploi des personnes en situation de handicap ont fait leurs preuves mais souffrent d’un sous-dimensionnement qu’il faudrait revoir. Les demandeurs d’emploi handicapés sont de moins en moins nombreux à pouvoir bénéficier d’un accompagnement spécialisé. Les entreprises qui les reçoivent se plaignent d’une baisse des services d’accompagnement alors que la mobilisation de tous devrait être requise pour favoriser l’emploi de ces personnes handicapées. Le Conseil économique, social et environnemental et, auparavant, le Médiateur de la République ont mis en garde contre une aggravation de ces restrictions qui conduisent à déshumaniser les services. »

Tout est dit.

Laurent Lejard, juin 2013.

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