L’époque a changé, de même que les acteurs, mais le procédé est le même : pour financer « sa » politique en faveur de l’emploi des personnes handicapées, le Gouvernement se sert dans les réserves financières de l’organisme collecteur de la contribution des entreprises qui n’emploient pas le quota légal de 6% de travailleurs handicapés. Après un prélèvement opéré en 2008 par le gouvernement de droite conduit par François Fillon, c’est maintenant celui qui se dit de gauche, dirigé par Manuel Valls, qui fait de même. 50 millions d’euros en 2008, 29 millions reconductibles en 2015, 2016 et 2017. Au final, les entreprises auront payé, du fait de ces tours de passe-passe, pour 137 millions d’euros de politique Emploi de l’Etat.

Pourquoi un tel vol qualifié ? Pour payer des subventions à des employeurs du secteur privé qui embaucheraient des personnes handicapées en contrats aidés. Subventions qui devraient s’ajouter à celles que l’Agefiph verse dans le cadre de son programme d’action, sauf si l’organisme le revoit à la baisse. Parce que l’Agefiph, jadis très riche, connaît une chute des contributions versées par les entreprises : de 604 millions d’euros en 2004, elles s’élèvent à 411 millions cette année, et la prévision pour 2015 est de 390 millions. En cause, la faible progression du quota, la baisse des effectifs dans les entreprises assujetties et un détournement organisé à l’échelle industrielle via les accords d’entreprise : ils autorisent les employeurs à conserver leur contribution pourvu qu’ils la dépensent pour des actions d’insertion. C’est pour cela que se multiplient les actions de communication, les trophées en tous genres, le soutien à des handisportifs, etc., qui valorisent l’image de marque sans conduire à l’embauche de travailleurs handicapés, sauf accidentelle.

Conscient de ce détournement au profit des entreprises assujetties, le Gouvernement aurait bien tort de se gêner, après tout. Mais à ce rythme de déliquescence, c’est l’ensemble des aides aux travailleurs handicapés qui est laminé au moment où les bénéficiaires en ont le plus besoin.

Laurent Lejard, septembre 2014.

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