C’est une mauvaise habitude française : une fois de plus, l’information fait encore défaut dix jours avant un événement de portée internationale, alors que nombre d’adaptations sont prévues pour recevoir dans de bonnes conditions des spectateurs handicapés. Cette fois, c’est le Mondial masculin de handball qui est en cause, une compétition de 84 matches qui se déroulera du 11 au 29 janvier dans huit villes de France. Les amateurs handicapés de cette discipline ne disposent pas d’informations précises sur l’accessibilité et les services proposés, alors même que des dispositions ont été élaborées. Malgré cette carence, « un millier de places PMR ont été vendues à date (sans compter les accompagnateurs), précise le comité d’organisation. Des places de parking PMR sont prévues à proximité de chaque site du Championnat du monde de handball. Leur nombre a été calculé en fonction du nombre de places PMR sur chaque site. » Au 3 janvier, le nombre de places PMR vendues s’élevait donc en moyenne à une douzaine par match, parmi des centaines ou milliers d’autres spectateurs, la personne handicapée payant plein tarif donnant droit à un accompagnateur gratuit sans justificatif.

« Il aurait fallu qu’au moment de l’achat de la place on donne l’information sur l’accessibilité et les services spécifiques », reconnaît Yannick Cabrol, responsable de l’équipe Développement durable chargée notamment de l’accessibilité du Mondial. En ces temps de sécurité renforcée, les spectateurs ont en effet besoin de savoir quel accès leur est réservé, comment ils seront contrôlés, s’ils pourront accéder avec un respirateur, un animal d’assistance. Parce que ces dispositions sont prévues, avec files d’attente et de palpation de sécurité pour les personnes à mobilité réduite… s’ils les trouvent. Yannick Cabrol affirme toutefois que les personnels de sécurité seront informés de ce que les chiens guide ou d’assistance doivent être admis, de même que les équipements médicaux. Les spectateurs sourds ou malentendants, en revanche, devront se débrouiller par eux-mêmes.

Situation différente pour les spectateurs aveugles ou malvoyants qui pourront, s’ils le souhaitent, être accompagnés jusqu’à leur siège. « On les incite quand même à venir accompagnés », précise Yannick Cabrol. Sur les 84 matches, huit seulement seront audiodécrits par casques sans fil, prestation assurée par un audiodescripteur et un journaliste du journal L’Equipe, mais uniquement pour les matches de qualification. « Nous avons écouté notre partenaire, la Fédération des Aveugles de France, qui a invoqué le prix des places des phases finales que ces spectateurs ne pourront pas payer. » Une place pour la finale atteint en effet 150€, 95€ pour les demi-finales. La cinquantaine de places incluant l’audiodescription a été préachetée par cette Fédération à destination de ses associations locales, dans une approche privée « club d’avantages » excluant les véritables amateurs de sport en salle. Comme il était de règle pour l’Euro de football 2016, l’audio-description du Mondial de handball ne sera proposée qu’en français : « Nous n’avons pas eu de demande de la part de spectateurs étrangers, justifie Yannick Cabrol. La question s’est posée au début, mais vu le partenariat avec la Fédération des Aveugles de France on a considéré que le public serait français. » Imparable !

Le comité d’organisation avait toutefois communiqué dès février 2016 sur le caractère « handi-engagé » de l’événement, mettant en avant un partenariat avec l’organisation non-gouvernementale Handicap International. Laquelle devait mener des actions communes de sensibilisation « aux problématiques du handicap en France et dans le monde », et le comité d’organisation comptait sur « l’expérience de Handicap International et la mobilisation de ses bénévoles pour optimiser l’accueil des personnes handicapées sur l’événement. » Or, Handicap International n’agit pas en France en matière d’accessibilité et n’a, de ce fait, apporté aucun conseil ni compétence dans une matière aussi particulière que l’accueil de spectateurs handicapés lors d’une compétition sportive, comme le reconnaît Yannick Cabrol qui ajoute que les contacts avec des associations de personnes handicapées n’ont consisté qu’en des demandes d’invitations, qui ont reçu des réponses négatives. « Tout le quota d’invitations est allé à Handicap International », précise-t-il. Et l’ONG va également engranger les bénéfices d’une tombola, de la vente des mascottes, etc. Imparable également !

Lors de la Conférence Nationale du Handicap du 11 décembre 2014, le Président de la République avait assuré que la France serait à la pointe de l’accessibilité lors des grands événements sportifs. Aujourd’hui, on constate ce qu’il en est réellement…

Laurent Lejard, janvier 2017.

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