À
quoi peut bien "servir" l'épouse du Président de la
République ? La Constitution de notre Ve République ne lui donne
aucun rôle ni rang protocolaire, elle est la conjointe ou compagne
du Chef de l'Etat, rien de plus. Pourtant, il est de tradition
que la proclamée "Première dame de France" ait un rôle
: "tenue" du Palais de l'Elysée, actions caritatives
et sociales. Yvonne De Gaulle s'était jadis contentée d'écarter
du "château" les divorcé(e)s et les femmes adultères;
Claude Pompidou avait rénové le Palais à grands coups d'art contemporain
et créé une fondation au service d'enfants handicapés qui a également
servi à acheter des terrains voisins du château corrézien de Jacques
Chirac pour le préserver d'une mitoyenneté gênante... Anne-Aymone
Giscard d'Estaing avait occupé un bureau à la Présidence, traitant
de cas sociaux particuliers, et créé la Fondation pour l'enfance;
Danielle Mitterrand oeuvrait en faveur de la liberté dans le monde,
au risque d'écorner la politique menée par son mari; Bernadette
Chirac reprit l'opération Pièces Jaunes en faveur des personnes
âgées hospitalisées puis la présidence de la fondation Claude
Pompidou; Carla Bruni-Sarkozy continua à chanter et créa une fondation
pour l'accès à la culture et à la connaissance pour tous. La compagne
de François Hollande, Valérie Trierweller, n'a guère eu le temps
de trouver ses marques, n'étant Première dame que pendant 18 mois,
sa successeure Julie Gayet restant dans l'ombre.
Et voilà qu'arrive Brigitte Macron, professeure retraitée. Son
jupitérien mari, Emmanuel, voulait la doter d'un statut
officiel mais les juristes en ont démontré l'impossibilité. Madame
Macron devra donc se contenter d'un bureau à la Présidence, de
personnels et d'un budget. Mais pour quoi faire ? Elle veut essentiellement
agir en faveur du handicap et l'éducation, et rencontre chaque
semaine la secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées.
Or, ces deux domaines sont régis par les lois de la République
et des politiques publiques, elles ne relèvent pas et ne devraient
pas relever d'actions caritatives ou de conciliation conduites
par la "Première dame". D'ailleurs, lorsque l'on étudie
le rôle de ces dernières dans les pays d'Afrique subsaharienne
précédemment colonisés par la France, c'est exactement le cas
: elles remettent régulièrement des dons à des personnes handicapées
lors de cérémonies officielles avec couverture presse obligée,
piètres cache-misère palliant l'absence totale d'action gouvernementale
en la matière dans ces pays.
La vie autonome et l'inclusion des personnes handicapées vivant
en France ne nécessiteraient pas d'actions de la part de l'épouse
du Président de la République si les lois qui les régissent étaient
effectivement appliquées, et les paroles bienveillantes des politiciens
au pouvoir suivies d'effet. Il est de la responsabilité du Gouvernement
d'agir en ce sens et d'assurer aux citoyens handicapés l'égalité
des droits et des chances à laquelle ils ont pleinement droit,
cette égalité n'est pas du ressort d'actions d'une dame patronnesse
de bonne volonté. C'est sous cet angle qu'il sera particulièrement
intéressant d'analyser les initiatives et "combats"
à venir de Brigitte Macron.
Laurent Lejard, septembre
2017.
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