Le Sénat est entré dans le débat à l’occasion de la polémique née de l’arrêt Perruche. Nicolas About, président de la Commission des Affaires Sociales, a mené, au côté du député Jean- François Mattéi, la bataille législative contre la jurisprudence élaborée par la Cour de Cassation. Leur lutte a abouti au vote d’un amendement dit « anti- Perruche » inséré dans la loi sur le droit des malades adoptée le 4 mars 2002.

Nicolas About, Sénateur des Yvelines, a bien voulu préciser pour nous dans quel esprit la Commission des Affaires Sociales qu’il préside a travaillé : « C’est une réponse à la législation sur l’arrêt Perruche. Nous avons pris conscience des lacunes de la loi, qu’il fallait combler. Je m’étais alors engagé à ce que le Sénat procède à une série d’auditions pour apprécier la situation. Le rapport d’information du 24 juillet est une première étape. Dans une seconde phase, nous présenterons une proposition de loi pour faire réagir l’ensemble des personnes concernées afin d’avoir un débat très large. Notre travail d’audition se poursuivra. Dans mon esprit, l’objectif recherché n’est pas de remplacer la loi d’orientation de 1975 par celle de 2003 mais davantage de l’actualiser dans une approche très ouverte. Si la loi de 1975 est excellente, elle n’est pas parfaite, elle peut être améliorée. Cette tâche ne dépend pas de prises de position politiques ».

Vincent Assante, membre du Bureau national du Parti Socialiste et coordonnateur de la mission d’études sur la réforme de la loi de 1975 que lui avait confiée la précédente secrétaire d’Etat aux personnes handicapées, Ségolène Royal, considère que le travail effectué par le Sénat est important « mais passe à côté de l’essentiel. La Commission formule des propositions attachées à la personne handicapée tout en ne prenant pas assez en compte l’environnement, ce que l’on appelle la situation de handicap ». Pour ce qui est de la création d’une allocation compensatrice individualisée, Vincent Assante estime que cette proposition rend nécessaire d’harmoniser les différentes prestations (AAH, ACTP, pensions Sécurité Sociale, rentes accident du travail) « par le haut ». « La faiblesse des moyens dont disposent les Cotorep pourrait engendrer des inégalités lors de l’attribution de cette allocation individualisée ». Enfin, Vincent Assante s’interroge sur la capacité du gouvernement à réaliser l’une des trois priorités définies par le Président de la République alors « qu’il n’arrive pas à boucler son budget pour 2003 ».

Quelques idées-forces du rapport.
 Issu de travaux et d’auditions menées durant plusieurs mois, le rapport d’information sur la politique de compensation du handicap de la Commission des Affaires Sociales du Sénat dresse un tableau complet et sans complaisance de la situation sociale et professionnelle des personnes handicapées en France.

Les Sénateurs formulent, en exergue de leur rapport, 75 propositions dont certaines traduisent une volonté de traiter de véritables obstacles à l’intégration ; il en est ainsi du cumul allocations-salaire. Ils proposent de « remplacer l’évaluation administrative des ‘déficiences’ par une analyse personnalisée des potentiels et des besoins de la personne handicapée », et de créer un guichet unique pour l’accès aux organismes. Le rapport préconise également de « recentrer les allocations existantes autour de la compensation intégrale du handicap », de « favoriser la vie en milieu ordinaire » et « d’améliorer la prise en charge des aides techniques comme moyen d’intégration sociale ».

Cotorep et Cdes devraient devenir de véritables lieux d’écoute et d’évaluation des besoins des personnes pour élaborer avec elles « un parcours de vie ». Mais ces commissions manquent de moyens ; leur dotation en personnel a baissé alors que le nombre de dossiers augmentait fortement (+40% pour les Cotorep durant la période 1990- 1999). Le turn- over des « techniciens » (médecins, travailleurs sociaux, psychologues) est très élevé, ce qui rend difficile la compréhension des situations individuelles. En effet, l’Etat consacre moins de moyens au handicap, pour lequel les dépenses publiques sont passées de 2,1 à 1,7 points du Produit Intérieur Brut (PIB) entre 1985 et 2000. Les Sénateurs préconisent un rattrapage, ou au moins un arrêt de cette baisse.

Se livrer à une présentation exhaustive du rapport serait fastidieux mais le lecteur pourra se faire sa propre opinion : le rapport d’information est disponible en ligne, au format HTML en une seule page ou au format PDF. Les auditions y figurent sous la forme de résumés; vous pourrez les voir et les entendre in extenso au format Real Video. On regrettera que le rapport remis par Vincent Assante à Ségolène Royal ne soit pas disponible en ligne : il manque cette pièce au puzzle de la réforme…

Laurent Lejard, septembre 2002.

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