Lors de la campagne 2004 pour les élections régionales, le président sortant du Conseil Régional d’Ile de France, Jean-Paul Huchon, avait accepté la demande du Collectif des Démocrates Handicapés de créer un Conseil consultatif des citoyens handicapés composé pour moitié de personnes handicapées directement élues par leurs pairs. Réélu à la présidence de la Région, Jean-Paul Huchon a respecté sa promesse et fait adopter, en novembre 2004, la création de ce Conseil consultatif. Dans le courant de l’automne 2005, la date restant à préciser, et pour la première fois en France, des personnes handicapées éliront directement leurs représentants.

Alibi démocratique ? Cette initiative réjouit l’Association Valentin Haüy : « Nous appliquons déjà ce principe de parité entre voyants et non-voyants dans nos instances dirigeantes, explique Monique de Nomazy, Présidente du Comité d’Ile de France. On ne peut pas décider à la place des aveugles. Je trouve que ce Conseil est une très bonne initiative, nous avons besoin d’harmoniser les avis entre associations et personnes qui rencontrent des problèmes dans la vie quotidienne, dans les transports par exemple ». En revanche, l’Association des Paralysés de France s’interroge sur cette forme de démocratie participative : « Les personnes handicapées ne représentent qu’elles-mêmes, estime Patrice Tripoteau, Directeur des actions nationales. On prend acte de la création de ce Conseil, en alertant sur les enjeux. Il y a actuellement en France une tendance à se passer des associations pour s’adresser directement aux personnes, qui ne représentent pas une pensée collective ». Cet argument est rejeté par Francine Bavay, Vice-Présidente du Conseil Régional : « On l’entend systématiquement quand on met en place une initiative de démocratie participative. L’expression directe des personnes concernées apportera des informations et alertera le Conseil Régional plus rapidement que les associations. Notre volonté est de rattraper le retard et que les personnes handicapées n’aient pas d’efforts à faire pour vivre librement ».

Un Conseil élu et représentatif. Le Conseil de 50 membres comportera trois collèges, outre le président du Conseil Régional et celui du Conseil Économique et Social Régional : 12 représentants d’associations nationales, 12 personnes qualifiées, 24 personnes handicapées ou parents. La Région a constitué un corps électoral composé de personnes handicapées et de parents d’enfants handicapés, le taux d’invalidité requis était d’au moins 50% : 8.000 personnes se sont inscrites, ce qui est proche de l’objectif de 10.000 électeurs espéré par Francine Bavay. Le tuteur d’un incapable majeur est électeur et candidat au titre de la personne qu’il représente. Chaque bénéficiaire de l’allocation adulte handicapé ou d’éducation spéciale devait recevoir le formulaire d’inscription sur la liste électorale et l’acte de candidature (procédure close depuis le 30 juillet dernier) mais il semble que de nombreux allocataires aient été oubliés…

Le scrutin sera départemental, chaque électeur choisira un candidat par types de déficiences regroupées en trois grandes familles : motrice, sensorielle (visuelle ou auditive), mentale, psychique et polyhandicap. Le Conseil consultatif se réunira au moins cinq fois par an pour se prononcer sur les actions de la Région ou formuler des propositions. Les Conseillers ne percevront pas d’indemnité de mandat mais leurs frais de déplacement seront pris en charge.

Mobilisation.
 L’A.P.F jouera le jeu de démocratique en mobilisant ses adhérents pour les inviter à s’inscrire sur les listes électorales, et à se porter candidats. Ce qui est le cas, par exemple, de Jacques Zeitoun, également militant du Collectif des Démocrates Handicapés et candidat aux élections sénatoriales en 2004 au titre ce mouvement. « Chaque militant du C.D.H doit être électeur et candidat », confirme Dominique Le Douce, dirigeant pour la région Ile de France. Ce qui place le C.D.H, tout comme l’A.P.F, dans une situation ambivalente : membre du collège Associations et poussant ses adhérents à être élus au collège Citoyens. « Les électeurs voteront pour des personnes qu’ils ne connaissent pas, constate Patrice Tripoteau. Quelle sera la représentativité des élus ? Quelle sera la relation entre électeurs et élus durant leur mandat ? ». Pour sa part, Francine Bavay considère que le Conseil consultatif des citoyens handicapés est l’outil d’une politique démocratique, et les citoyens lui ont clairement répondu : 1.000 d’entre eux se sont portés candidats ! Si leur répartition est globalement homogène entre les départements et les familles de handicap, ce nombre imprévu de candidats complique les opérations électorales qui pourraient se dérouler durant le mois d’octobre. « La démocratie n’existe réellement que si on a la volonté de l’améliorer, affirme Francine Bavay. Et on a le désir d’essuyer les plâtres ». Voilà qui est fait ?

Laurent Lejard, septembre 2005.

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