L’Allocation Supplémentaire d’Invalidité (ASI), définie par l’article L815-24 du Code de la Sécurité Sociale, est une prestation versée sous certaines conditions aux personnes invalides titulaires d’une pension de retraite ou d’invalidité qui n’ont pas atteint l’âge légal de départ à la retraite pour bénéficier de l’Allocation de Solidarité aux Personnes Agées (ASPA). Cette prestation est versée aux personnes qui sont titulaires d’une pension d’invalidité, ou de réversion, ou de vieillesse de veuf (ou veuve) invalide, ou de retraite anticipée pour handicap ou carrière longue ou de retraite pour pénibilité. Depuis 2006, l’ASI remplace l’allocation supplémentaire du minimum vieillesse (FSI).

Une aide financière est toujours la bienvenue lorsque l’invalidité vient faucher un individu bien portant, mais l’ASI cache en vérité un désarroi qui endette les descendants directs des bénéficiaires. En effet, les sommes versées sont récupérables sur la succession de l’allocataire après son décès. Cette procédure, ignoble de par sa conception même, appauvrit les héritiers qui sont les premières victimes de cette pseudo « Aide Sociale ». Aujourd’hui cette prestation vient faire de l’ombre à l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH), mais dans quelle mesure ?

Des CAF substituent l’ASI à l’AAH différentielle.

L’ASI est prioritaire sur l’AAH. Les Caisses d’Allocations Familiales ont commencé à déployer cette prestation en demandant à des pensionnés qui perçoivent une AAH différentielle de faire une demande de substitution par l’ASI sous peine de supprimer leur complément dans les trois mois. Et cela ne fait que commencer…

Les conditions d’attribution de l’AAH, qui n’est soumise à aucun remboursement sur succession, sont les suivantes : la personne qui ne dispose d’aucune ressource peut percevoir le montant maximum de l’AAH qui s’élève à 800,45€ par mois, mais lorsque le demandeur perçoit une pension d’invalidité ou de retraite, ou une rente pour accident du travail, il bénéficie d’une allocation différentielle dont le montant correspond à la différence entre la moyenne mensuelle de ses autres ressources et 800,45€. Et lorsque la personne handicapée perçoit un revenu d’activité, l’AAH est calculée en fonction d’une partie de ce revenu.

Pour bénéficier de l’ASI, il faut percevoir l’une des pensions citées plus haut, et c’est là où le bât blesse : les sommes versées sont récupérables au décès de l’allocataire sur sa succession si son actif net dépasse 39.000€. En 1982, ce montant était de 250.000 Francs soit 38.112€ (arrondis à 39.000€ en 2002 lors du passage à l’euro). Nous sommes en 2014 et 32 ans plus tard, ce montant n’a pas été revalorisé, ce qui permet à l’Etat de récupérer l’ASI sur davantage de personnes. Le montant récupérable est fixé chaque année en fonction de la composition du foyer : 6.123,94€ pour une personne seule, 7.995,40€ pour un couple de bénéficiaires.

Il est facile de comprendre pourquoi l’ASI désavantage les actuels titulaires d’AAH. Le comble dans cette procédure de transfert obligé, c’est que le montant mensuel maximum d’ASI est de 403,76€ contre 800,45€ pour l’AAH (pour une personne seule). Le tableau ci-dessus présente les différences entre pension d’invalidité, AAH, ASI et ASPA, qui est la (malheureuse) continuation de l’ASI pour les personnes atteignant l’âge de la retraite.

En France, 50.000 personnes sont paraplégiques ou tétraplégiques et il y en a 1.500 de plus chaque année lors d’accidents touchant principalement des jeunes de 15 à 25 ans. Cela donne à réfléchir ! Et c’est sans compter les personnes myopathes, touchées par la sclérose en plaques, ou handicapées mentales, les enfants invalides, etc.

Les sommes récoltées par l’État sont indignes de la situation des accidentés et autres personnes handicapées, qui bien malgré eux sont contraints de laisser des dettes à leurs proches une fois décédés. Je suis devenu tétraplégique à l’âge de 19 ans et j’ai aujourd’hui 42 ans. Auparavant je percevais le FSI (qui s’est transformé en ASI), la somme due à l’Etat et qui sera réclamée à mes proches après mon décès comporte déjà six chiffres !

Au décès du titulaire de l’ASI ou l’ASPA, l’État réclame son dû à des familles endeuillées. Cette dette n’est pas automatiquement réclamée (il est toujours possible de refuser l’héritage), mais ce n’est pas le cas pour les propriétaires d’un bien immobilier alors qu’ils n’ont certainement pas acquis leur habitat grâce à l’ASI ou l’ASPA vu leur faible montant. A votre avis, combien de temps peut vivre une personne invalide percevant l’ASI ou l’ASPA ?

Nous sommes bien là, loin des Restos du coeur, et le Gouvernent d’arguer que c’est « normal ». Sous le prétexte que cette allocation est non contributive (pas soumise à cotisation préalable) et que vis-à-vis de nos collègues de galère handicapés percevant l’AAH, elle répond à des besoins différents, l’ASI gangrène les ressources des personnes en situation de handicap. C’est la raison pour laquelle il apparaît à la fois évident, cohérent et juste de fusionner ASI et AAH : peu importe qui, de la sécurité sociale ou de la CAF, doit prendre en charge cette modification puisqu’il s’agira toujours du budget de l’Etat.

Marc Benoit, webmestre de l’Association Libre pour l’Aide à la Recherche sur la Moelle Epinière (ALARME), octobre 2014.

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