Le Bulletin des bibliothèques de France vient de publier un dossier intitulé « Publics empêchés : lever les obstacles ». Dans ce numéro, nous avons publié un article dans lequel nous appelons à la création d’une charte et d’un label permettant d’encourager et de valoriser ces initiatives en faveur de l’accessibilité pour tous les publics.
Qu’est-ce que l’accessibilité numérique ?
C’est la possibilité, pour toute personne, d’accéder aux ressources et aux services en ligne proposés par la bibliothèque. Cela concerne en premier lieu le site web de la bibliothèque, mais aussi les outils mis à la disposition du public pour rechercher les documents dans son catalogue, et bien sûr les ressources numériques elles-mêmes, qui doivent être accessibles à tous les publics.
En France, l’article 47 de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées prévoit que « les services de communication au public en ligne doivent être accessibles aux personnes handicapées ». Les bibliothèques publiques sont ainsi soumises à cette obligation d’accessibilité. Le 7 octobre 2016, l’article 106 de la nouvelle loi pour une République numérique confirme les dispositions prévues par la loi de 2005, et étend son champ d’application. Le 26 octobre 2016, une directive européenne a été adoptée. Elle précise les exigences d’accessibilité des sites Internet et des applications mobiles des organismes du secteur public. Cette directive devrait être transposée prochainement dans le droit des états membres.
Comment évaluer l’accessibilité d’un site web ?
Au niveau international, les critères permettant cette évaluation sont définis dans les Web Content Accessibility Guidelines (WCAG). Le référentiel d’accessibilité qui s’applique en France est le Référentiel Général d’Accessibilité des Administrations (RGAA). Ce document, basé sur les WCAG, comprend un référentiel technique (liste de critères et de tests permettant d’évaluer l’accessibilité) et un guide d’application de la loi précisant les obligations réglementaires à respecter.
En 2014, nous avons réalisé, avec le soutien du Ministère de la culture et de la communication et la participation de différents partenaires, une étude de l’accessibilité numérique des portails de bibliothèque. Cette initiative a été pérennisée sous la forme d’un baromètre de l’accessibilité numérique en bibliothèque. L’objectif de ce baromètre, qui comprend une étude quantitative et une étude qualitative, est triple. Il s’agit de mesurer l’évolution de la prise en compte des obligations règlementaires, mesurer l’évolution de l’accessibilité des services et des ressources offerts par les bibliothèques, et mettre en valeur les bonnes pratiques.
Les résultats du baromètre de l’accessibilité des bibliothèques en 2016 sont publiés en ligne sur le site du Ministère de la culture et de la communication, qui en est désormais le maître d’oeuvre. Il a réalisé une fiche pratique téléchargeable au format PDF sur « L’accessibilité numérique en bibliothèque », dans la collection Boîte à outils du numérique en bibliothèque.
La définition d’une politique d’accessibilité.
La prise en compte des besoins des publics en matière d’accessibilité numérique doit être pensée dans la durée. Elle doit aboutir à la définition d’une politique d’accessibilité rappelant les objectifs et les enjeux de société, et précisant les responsabilités, la formation des personnels et la nécessité de conduire régulièrement des audits d’accessibilité. Par ailleurs, la définition d’une politique d’accessibilité doit être pensée globalement. À quoi cela servirait-il en effet que le site web de la bibliothèque soit accessible si la bibliothèque ne propose pas de ressources accessibles et adaptées à différents publics ou si les locaux de la bibliothèque elle-même ne sont pas accessibles ? Une politique d’accessibilité numérique devrait donc s’appuyer sur une réflexion plus large prenant notamment en compte la politique d’acquisition (afin de proposer des collections et des ressources adaptées aux besoins des différents publics en situation de handicap), la politique d’équipement (matériels, logiciels et technologies d’assistance), une offre de services adaptée (en ligne, dans les murs et hors les murs) couvrant l’accueil des publics, l’accompagnement, la médiation, les services à domicile, etc., et l’accessibilité matérielle des locaux, du mobilier ainsi que la signalétique. Le portail de la bibliothèque devrait informer l’utilisateur de toutes les possibilités offertes et comprendre le signalement de toutes les ressources accessibles et adaptées aux différentes situations de handicap.
Nos propositions pour des bibliothèques handi-accueillantes.
En tant que lieu privilégié d’accès à l’information, aux services, aux savoirs et à la connaissance, la bibliothèque est par excellence un outil d’inclusion sociale et doit l’être au service de tous les publics. Pour encourager le développement de bibliothèques inclusives offrant des services adaptés à tous les publics et valoriser cette démarche, nous proposons l’élaboration d’une charte et la création d’un label « bibliothèque handi-accueillante ». La formalisation du dispositif (élaboration de la charte et modalités d’attribution du label) pourrait faire l’objet d’un travail piloté par l’État, et mobiliser les associations du monde du handicap et celles du monde des bibliothèques. Nous faisons donc appel à toutes les bonnes volontés pour réfléchir à la mise en place de ce dispositif et vous encourageons à nous rejoindre !
Marc Maisonneuve et Philippe Lenepveu, Tosca consultants, mars 2017.