En décembre 2003, la justice a débouté trois voyageurs handicapés qui avaient dû effectuer un trajet en fourgon à bagages, la configuration des wagons ne pouvant leur permettre d’y accéder avec leurs fauteuils électriques. Si le tribunal a saisi un point de droit pour rejeter la demande des plaignants, il n’en demeure pas moins les conditions d’accès aux voitures de la Société Nationale des Chemins de Fer Français sont assez lamentables, à commencer par celles de son fleuron, le Train à Grande Vitesse (T.G.V). L’image qui illustre cet article, fournie par la S.N.C.F, montre comment l’accès à un train devrait se dérouler; en pratique, l’opération se passe fréquemment d’une autre manière…
Le voyageur qui se déplace sur fauteuil roulant manuel est généralement hissé ou extrait de la rame à la force des bras : au mieux pris en poids par deux employés soulevant le fauteuil, un devant, l’autre derrière, au pire hissé sur les marches du wagon, les roues rebondissant sur les degrés. Ces opérations ne sont ni sécurisantes, ni respectueuses des personnes. Il existe pourtant un élévateur permettant d’accéder de manière confortable et sûre aux wagons : cet appareil mobile équipe les gares présumées accessibles mais les employés ne l’utilisent généralement que pour les voyageurs sur fauteuil roulant électrique. Pensez donc, il faut aller chercher l’élévateur, l’amener face à la porte du wagon, abaisser la passerelle, faire entrer le fauteuil sur la plate- forme puis la hisser ! Ces opérations prennent du temps, la compagnie estime sans doute plus commode et plus rentable de procéder autrement.
Cette pratique génère des situations dangereuses. En week- end, le personnel S.N.C.F est réduit et il est fréquent qu’un seul agent assure l’assistance: dans cette situation, il « réquisitionne » un passager valide pour porter la personne handicapée. Ce fait a notamment été constaté Gare du Nord (Paris) et confirmé à Laval (Mayenne) par un agent S.N.C.F. Dans quelques grandes gares, l’assistance est sous- traitée à la société Effia dont les employés portent un blouson rouge. Ils opèrent généralement seuls, hissant la personne en fauteuil sur les marches. Aux risques et périls du voyageur: lors d’un retour sur Paris- Montparnasse en décembre 2003, la pièce du fauteuil d’un voyageur ainsi « manutentionné » casse lors d’une descente de wagon trop brutale. Sa réclamation est à ce jour restée sans suite. Ni le Chef de gare ni la société Effia ni le directeur de la mission handicap grandes lignes de la S.N.C.F n’ont daigné y répondre. Cet incident a nécessité la réparation du fauteuil roulant… aux frais de la victime.
Economie de personnel et entorse aux règles de sécurité, voyager sur les grandes lignes de la S.N.C.F devient risqué. Et s’en plaindre ne suscite qu’indifférence. Voilà des actes étonnants de la part d’une compagnie dont le Président a signé à treize jours d’intervalles, les 2 et 15 décembre 2003, deux chartes d’accessibilité !
Laurent Lejard, février 2004.