L’hôpital parisien Saint-Vincent de Paul est un lieu unique en France de traitement des diverses pathologies pouvant affecter des enfants polyhandicapés : pédiatrie, chirurgie orthopédique, gastro- entérologie, orthodontie et autres disciplines, tout est rassemblé sur place dans un hôpital desservi par d’importants axes de communication. Voisin de l’hôpital Cochin et d’une importante maternité, Port- Royal, il constitue un pôle d’excellence sanitaire apprécié par les familles de Paris et d’ailleurs. Cochin et Saint- Vincent de Paul font l’objet d’un projet de restructuration à l’horizon 2009, incluant la création de structures médico- sociales (crèche intégrative, Institut Médico Educatif et Maison d’Accueil Spécialisé). Ces structures, qui manquent cruellement à Paris, seraient complétées par un centre innovant de séjour pré et post opératoire permettant aux parents d’accompagner leur enfant. L’ensemble de la réorganisation a été approuvé par le Conseil d’Administration de l’Assistance Publique- Hôpitaux de Paris (A.P-H.P) en 2002. L’un des premiers éléments tangibles de cette restructuration est l’installation récente de la Maison des Adolescents voulue par l’épouse du Président de la République, et financée en partie par l’opération caritative « Pièces jaunes » qu’elle dirige.

Ces projets risquent pourtant d’être anéantis par la décision du Premier Ministre d’installer sur le terrain de Saint- Vincent de Paul les services du ministère des Affaires Etrangères et ses 3.500 agents. Certes, Jean- Pierre Raffarin a demandé que la création du pôle médico- social soit préservée, mais il faudra caser sur 50.000 mètres carrés de terrains un ministère qui en demande au moins 35.000 et des structures pour personnes handicapées qui doivent en occuper 25.000 : il faudrait pousser les murs vers le haut ! La décision du Premier Ministre est qualifiée d’unilatérale et de brutale par le Maire de Paris, qui a rappelé à Jean- Pierre Raffarin que « dans un souci de respect mutuel et d’efficacité, le dialogue et la concertation auraient dû […] s’imposer ». Henri Faivre, président du Clapeha (Comité de Liaison et d’Action des Parents d’Enfants Adultes Atteints de Handicaps Associés), estime que « Paris est un désert français en matière de prise en charge médico- sociale des enfants polyhandicapés »; beaucoup ne peuvent trouver de place que dans des départements parfois très éloignés, voire même en Belgique.

A l’A.P-H.P, on s’en tient au projet de restructuration avec la volonté de le mener à bien tout en refusant de polémiquer avec l’Etat. Le Ministre des affaires étrangères, Michel Barnier, a tenté de rassurer Pierre Castagnou, Maire du 14e arrondissement (où est implanté l’hôpital) en lui précisant que d’autres sites étaient également envisagés pour le transfert de son ministère. Pierre Castagnou s’était en effet dit prêt à entamer une guérilla juridique pour retarder et gêner le projet immobilier du Gouvernement. Quant au Comité de sauvegarde de l’hôpital Saint- Vincent de Paul, il constate que les annonces gouvernementales successives (le ministère de la Justice voulait, en 2004, installer sur place un nouveau tribunal de grande instance) déstabilisent l’établissement, démobilisent les personnels médicaux et inquiètent les familles. Il redoute un éclatement des services dans tout Paris, et la noyade du pôle médico- social des personnes handicapées dans les locaux d’un Ministère d’Affaires décidément bien Étrangères…

Laurent Lejard, février 2005.

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