Le 26 octobre dernier, plusieurs dizaines de clients d’Optibus manifestaient à Lyon contre les nouvelles conditions d’accès à ce service de transport spécialisé : fin du porte à porte systématique et de la réservation de transports réguliers, organisation des courses selon des priorités, aucune assurance d’obtenir le transport retour après la réservation de l’aller. « Si la personne n’est plus sûre d’accomplir ses activités comme elle le faisait avant, expliquait l’un des manifestants, elle reste centrée sur son quotidien et du coup c’est difficile de pouvoir s’orienter sur l’extérieur et de pouvoir s’ouvrir aux autres ». En clair, les clients handicapés voient leur vie chamboulée, altérée, parce qu’Optibus remplit mal la mission de service public que lui a confiée le Syndicat des transports de l’agglomération lyonnaise (Sytral). Avec son soutien, même : « On a plus de 108.000 voyages par an alors qu’on était à 85.000 il y a quelques années, justifiait le chargé de mission accessibilité du Sytral, Michaël Maisonnial. On a injecté un budget d’un million d’euros supplémentaires à partir de 2017 et ce pour les cinq années à venir […] On est bien dans cette logique d’augmentation du service. » Ce sont plutôt des restrictions que constatent les clients…

Cette absence de fiabilité est également subie par les clients des services PAM en Ile-de-France (lire ce Flop), et plus particulièrement à Paris, comme l’ont dénoncé plusieurs clients dans une lettre commune rendue publique et adressée à la Maire de Paris, Anne Hidalgo, et à la Présidente du Conseil Régional, Valérie Pécresse : « Le service PAM 75 nous a aidés à gagner en autonomie en région parisienne et est une alternative aux difficultés que nous rencontrons dans les transports en commun (Métro inaccessible, ascenseurs en pannes, rampes des bus capricieuses, impossibilité même d’accéder aux transports aux heures de pointes, etc.) […] En ce qui concerne les usagers, le service PAM 75 est très rigoureux dans l’application des règles : départ des véhicules en cas de retards excessifs des usagers et pénalités financières en cas d’absence. En revanche, le service PAM 75 (notamment ses responsables et le service de la régulation) est beaucoup plus léger dans sa gestion du service. » Et d’énumèrer la mauvaise voire non-information des clients en cas de retard et l’absence de proposition alternative, l’emploi ponctuel de sous-traitants incapables de faire le travail demandé, un allongement excessif des transports en covoiturage (ou groupage). Leurs multiples réclamations n’ayant amené aucune amélioration, ils concluent sur ce constat : « A noter enfin qu’aucune excuse ni indemnisation même symbolique n’est accordée à ceux que le PAM 75 qualifie soit d’ ‘usagers’ (qui ne doivent ‘pas trop’ se plaindre) soit de ‘clients’ lorsqu’il s’agit de facturation ou de communication corporate – que nous qualifierons de lyrique – du Groupe Keolis. » Le cahier des charges qui règle les conditions d’exploitation des PAM d’Ile-de-France est en cours de renégociation, le prochain devant être adopté par Ile-de-France Mobilités (ex-STIF) en juin 2018. Tiendra-t-il compte d’un sondage effectué en 2016 auprès de 1.200 clients ? Si 50% des répondants sont des utilisateurs fréquents, 34% ont dû renoncer à se déplacer à cause des horaires que la centrale de réservation leur proposait, 25% se sont purement et simplement vu refuser un transport, 19% relèvent des retards et un manque de fiabilité.

Optibus.

Le constat pourrait être le même dans la plupart des grandes ou moyennes villes de France : la plupart des services de transport adapté de personnes handicapées mécontentent leurs clients-usagers. Clients quand ils doivent, par exemple, payer un trajet six fois le prix d’un ticket de bus, usagers quand le service est au rabais ! Mis en place par des collectivités territoriales autorités organisatrices de mobilité, ces services sont généralement sous-dimensionnés par rapport à la demande et plus chers que les transports collectifs sans offrir la garantie d’être effectivement transporté en temps et heure. S’ajoutent des conditions d’accès draconiennes et parfois discriminatoires, et une obligation de résultat à géométrie variable. Confrontés à la protestation des usagers, les politiques auront-ils enfin le courage sortir les transports adaptés de l’état de pénurie dans lequel ils sont maintenus depuis plusieurs décennies ?

Laurent Lejard, octobre 2017.

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