Question : Pour quels sites des dérogations d’accessibilité sont-elles envisagées ?

Isabelle Lemesle : Il est trop tôt pour établir une liste. Le principe, vous le connaissez, est de tout mettre en accessibilité, mais on sait d’ores et déjà qu’il y a des monuments pour lesquels ce sera matériellement impossible. Notamment tous ceux qui ont des parties hautes. Je pense en particulier aux tours de la cathédrale de Paris, aux colonnes de Vimy. La, il faut absolument trouver des solutions pour réaliser une médiation culturelle qui s’adressera à tous ceux qui n’auront pas la faculté matérielle d’accéder aux parties hautes. La législation sur la protection des monuments historiques s’impose, on n’a pas toutes les facilités, on sait qu’il y a des monuments que l’on ne pourra pas rendre accessibles. Si je prends le cas de l’Hôtel de Sully, cet édifice magnifique du XVIIe siècle dans lequel le Centre des Monuments Nationaux a son siège social n’est absolument pas accessible aujourd’hui; demain, l’accès aux jardins sera aménagé depuis la place des Vosges et la cour d’honneur, les appartements de la Duchesse deviendront accessibles en visite accompagnée, les locaux en sous-sol destinés à des conférences seront desservis par un ascenseur. Là, on fait une mise en accessibilité, mais pour le reste, on ne pourra pas parce que les travaux sont matériellement impossibles.

Question : Pour effectuer ces travaux, le Centre des Monuments Nationaux dépend des crédits de l’État. Avez-vous des garanties financières suffisantes de l’État, et de respect de sa parole en ces temps de rigueur budgétaire ?

Isabelle Lemesle : Nous avons tous les ans un budget de 30 millions d’euros d’investissements. Il n’y a pas de traitement particulier, ni favorable ni défavorable, des travaux d’accessibilité. Notre manière de travailler est assez simple : nous présentons aux services de l’État une programmation extrêmement argumentée qui envisage le monument dans son ensemble, y compris les travaux de mise en accessibilité. C’est dossier par dossier que nous avançons vis-à-vis de la tutelle qui nous finance, outre les mécénats extérieurs que nous pouvons obtenir pour tels ou tels travaux particuliers. Globalement, je dirai que l’État respecte ses engagements sur l’ensemble des investissements.

Question : Vous allez expérimenter la Joëlette pour accéder à la cité fortifiée de Carcassonne et à l’abbaye du Mont-Saint-Michel. Pour cette dernière, il existe un projet d’accessibilité par ascenseur extérieur, sera-t-il réalisé dans le cadre du grand chantier de désensablement de la baie ?

Isabelle Lemesle : Le désensablement de la baie du Mont-Saint-Michel est un énorme projet piloté par un syndicat mixte composé des collectivités locales et accompagné par l’État. Pour ce qui concerne l’accessibilité à l’abbaye, il faut que l’on évalue l’emplacement, la technique et le coût d’un ascenseur extérieur. Nous sommes également soucieux de l’accessibilité économique au Mont-Saint-Michel : notre préoccupation dans le rétablissement du caractère maritime du site, c’est le coût que vont représenter le parking, la navette, un coût supérieur à celui que paient les visiteurs aujourd’hui. Nous avons la responsabilité de 96 monuments, nous nous efforçons de programmer des travaux pour ses 96 établissements, sans tenir compte des chiffres de fréquentation.

Propos recueillis par Laurent Lejard, novembre 2010.


Les réalisations et projets du Centre des Monuments Nationaux :
– Sainte-Chapelle du château de Vincennes (Val-de-Marne), restauration intérieure, extérieure et mise en accessibilité par rampe provisoire en prélude à une solution définitive.
– Palais du Tau à Reims (Marne), mise en accessibilité complète avec parcours muséographique accessible et adapté à tous les publics au début de l’été 2011.
– Abbaye de Cluny (Saône-et-Loire), mise en accessibilité de 80% du parcours de visite, aménagement du Palais Gélase, installation d’un ascenseur dans le farinier d’ici 2015.
– Maison de George Sand à Nohant-Vic (Indre), mise en accessibilité de la bergerie et de ses cheminements extérieurs, étude plus globale d’accessibilité prochainement lancée.
– Château d’Azay-le-Rideau (Indre-et-Loire), réfection des accès.
– Hôtel Béthune-Sully (Paris), étude en cours pour mise en accessibilité des appartements de la Duchesse, des sous-sols, du futur restaurant, réalisation en 2011.
– Le Panthéon (Paris), étude en 2011 pour mise en accessibilité de l’ensemble du bâtiment, réalisation projetée d’ici 2015.
– Château de Champs-sur-Marne (Seine-et-Marne), fermé au public depuis quatre ans. Travaux de mise en accessibilité de l’ensemble des parties ouvertes à la visite pour la réouverture du château prévue mi 2012.
– Château d’Angers (Maine-et-Loire), restauration et accessibilité du logis Royal actuellement fermé au public, réouverture au printemps 2012.
– Villa Cavrois à Croix (Nord), conçue par l’architecte Robert Mallet-Stevens. Mise en accessibilité des jardins et de la villa courant 2011.

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