Lorsque une personne est victime d’un accident corporel, elle peut subir des troubles physiologiques plus ou moins graves. Si ces troubles sont temporaires, on parlera d’Incapacité Temporaire Partielle. S’ils sont définitifs, on évoquera une Incapacité Permanente Partielle (IPP). La date de la consolidation est le moment où les lésions se fixent et prennent un caractère permanent : aucun traitement médical n’est plus susceptible de les améliorer.
Les juges ont alors un pouvoir souverain pour la fixation de cette date en fonction des éléments médicaux qui leur sont soumis (Arrêt de la Cour de Cassation [criminelle] du 4 décembre 1974). C’est uniquement à compter de cette date que l’on peut fixer le taux d’incapacité. Si l’accident trouve son origine dans la faute d’un tiers ou qu’il y a un responsable, la victime pourra alors demander en Justice l’indemnisation de son incapacité permanente partielle. Par là, il faut entendre la réduction de potentiel physique, psychosensoriel, ou intellectuel dont reste atteinte une victime dont l’état est consolidé.
En ce qui concerne l’indemnisation, seule la diminution de la capacité physique doit être prise en considération dans l’évaluation du dommage (Arrêt de la Cour de Cassation [civile 2°] du 3 juin 1955). Ainsi, la Compagnie d’assurance de la partie responsable ou les magistrats saisis de l’affaire vont nommer un médecin expert afin que ce dernier établisse l’importance du préjudice subi. Puis, au regard d’un barème indicatif, les magistrats pourront allouer la somme correspondant à la réparation du préjudice.
Par exemple, Mme X, 20 ans, victime d’un accident de la circulation, perd l’usage de l’une de ses jambes. L’expert nommé va décider que son état équivaut à 40% d’IPP. Selon les usages de la Cour d’appel d’Aix en Provence, Mme X aura alors droit à la somme de 85.360 Euros (soit 2.134 Euros par point d’IPP). Une personne de 75 ans avec le même taux d’IPP bénéficiera d’une somme moindre, soit 48.160 Euros (1.204 Euros par point d’IPP).
En effet la valeur donnée au point dépend de deux éléments :
– l’importance du taux d’IPP (plus le taux est élevé, plus la valeur du point est forte);
– l’âge de la victime (plus elle est jeune et plus la valeur du point est forte).
Mais le problème qui a souvent été posé est de savoir sur quelle base de valeurs les médecins experts devaient attribuer les points d’IPP. Longtemps, les experts n’utilisaient aucun barème pour n’avoir recours qu’à leurs critères personnels résultant de leur expérience professionnelle. Ce système d’appréciation « in concreto » avait pour conséquence d’entraîner des disparités d’indemnisation selon les experts. Un barème a donc été mis au point en 1980 par un collège d’experts renommés et dès 1981 les Tribunaux ont décidé de s’y référer. Il fait aujourd’hui l’unanimité et classifie avec précision tous les handicaps en donnant une contre- valeur en pourcentage.
Bien entendu il y a toujours place pour l’interprétation et la discussion dans certains cas limites ou graves; cette discussion n’est pas sans intérêt quand il s’agit de gagner quelques points. La valeur donnée au point est aussi sujette à argumentation car les usages des Cours ne sont qu’un moyen d’appréciation et les juges sont totalement libres dans les sommes qu’ils attribuent. Il est donc impératif d’être conseillé par un avocat qui saura présenter et argumenter le dossier pour obtenir l’indemnisation optimale.
C’est vrai en Justice, mais c’est aussi vrai dans les discussions amiables avec les assureurs responsables qui ont logiquement tendance à proposer des indemnisation inférieures, voire très inférieures, à ce que la Justice accorderait. Dans certains dossiers, on peut ainsi voir des victimes qui auraient pu toucher le double si elles avaient su faire défendre leurs intérêts.
Il faut enfin indiquer qu’après indemnisation il est toujours possible de réouvrir le dossier en cas d’aggravation pour obtenir un complément si l’état de santé le justifie.
Philippe Carlini, Avocat au barreau, CP Carlini et Associés, janvier 2003.