Le 6 juillet 2005, le Comité International Olympique (C.I.O) désignera la ville gagnant l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2012 (rappelons que ceux de 2008 ont été attribués à Pékin). Il devra choisir la lauréate parmi cinq capitales : Madrid, New- York, qui n’ont jamais accueilli les Jeux, Londres, qui les a reçus en 1908 et 1948, Paris qui les a organisés en 1900 et 1924, et enfin Moscou, qui les a hébergés en 1980. S’il est certain que les handi- athlètes seront accueillis, transportés et logés dans des conditions adaptées à leurs besoins spécifiques, qu’en est-il actuellement de l’accueil des personnes handicapées motrices dans ces villes, et quels travaux d’amélioration sont envisagés ?
Londres. La capitale britannique (lire cet article) dispose d’une accessibilité correcte de sa voirie. Côté transports collectifs, le métro londonien est, à l’exception d’un tronçon de ligne, inaccessible sans aide aux personnes en fauteuil roulant manuel et impraticable en fauteuil électrique. Les autobus sont pour la plupart dotés de rampes d’accès, tous les véhicules le seront en 2012. Côté rail, la dernière version du Disability Discrimination Act, adoptée en avril 2005, impose une accessibilité de tous les wagons existants pour… 2020 ! Si le voyage en Eurostar est aisé, l’usage des trains de banlieue est aléatoire et le demeurera encore quelques années. Il est facile de trouver un hôtel accessible à Londres même si l’offre de chambres aménagées pour les personnes handicapées motrices n’est pas diffusée. Mais l’obstacle principal d’un hébergement dans cette ville reste le prix des chambres : le tarif d’un deux étoiles correspond à celui d’un quatre étoiles français. Les repas sont également chers en-dehors des fast-food. Les distractions ne manquent pas, la plupart des salles de spectacles et des musées sont accessibles. Quant aux célèbres pubs, ils font l’objet d’une campagne d’incitation de leurs tenanciers à les mettre en accessibilité.
Madrid. L’Espagne a fait de grands efforts, ces dernières années, pour promouvoir l’accessibilité. Les stations de métro sont accessibles pour environ la moitié d’entre elles, sur les extensions et les lignes les plus récentes. Un tiers des bus ont un plancher bas, mais sans rampe d’accès; Madrid 2012 envisage l’équipement des lignes de bus par des véhicules accessibles. Eurotaxi propose des voitures utilisables en fauteuil roulant. Près de la moitié des musées (les incomparables Prado, Reine Sofia et collection Thyssen) et la plupart des sites d’intérêt touristiques sont visitables en fauteuil roulant, mais circuler à roulettes dans les rues du centre historique n’est pas des plus facile. Petite compensation, la visite du Palais Royal s’effectue en empruntant un ascenseur luxueux, couvert de miroirs et de velours vert ! L’offre d’hôtels accessibles est importante et couvre toutes les catégories; là encore, impossible de connaître précisément les établissements disposant de chambres adaptées. Le grand nombre de restaurants vous laissera toujours une chance d’en trouver un qui soit accessible, mais les toilettes ne le sont généralement pas.
Moscou. La ville entend rattraper son retard en matière d’accessibilité à l’occasion des Jeux. Mais en l’absence de guide des sites accessibles, ou même de récits de voyages effectués par des personnes handicapées motrices, il est difficile d’apprécier à distance les sites visitables. Les autorités ont lancé un important chantier de rattrapage : 3.000 rampes d’accès pour immeubles, 1.750 traversées piétonnes avec abaissés de trottoirs réalisées et 1.250 projetées, 350 autobus accessibles acquis ces deux prochaines années et 1.100 réaménagés, 75 toilettes publiques aménagées, etc. Les nouvelles normes obligent les immeubles neufs à permettre l’accès aux personnes en fauteuil roulant. Une soixantaine d’institutions culturelles sont accessibles. Quelques stations du métro léger sont déjà équipées d’ascenseurs, les extensions du métro « historique » (probablement le plus grandiose au monde) le sont également, les quais doivent être dotés de pentes douces devant faciliter l’entrée dans les rames; Moscou 2012 annonce un réseau entièrement accessible lors des Jeux, ce qui nécessitera d’importants travaux sur les lignes anciennes. Les rues sont larges, les trottoirs vastes et roulants. Parmi les aéroports, on remarque que Domodedovo propose une salle d’attente spécifique et « confortable » aux voyageurs handicapés, mais que Sheremetyevo nécessite encore de nombreux aménagements.
New-York. Dans le contexte politique actuel marqué par une restriction de l’entrée sur le territoire américain, le président George Walker Bush a été contraint de garantir aux autorités olympiques « la liberté d’accès au pays hôte, pour toutes les personnes accréditées ». Mais pas forcément aux spectateurs. Les U.S.A interdisent, par exemple, leur territoire à certaines personnes atteintes de maladies graves. Pourtant, l’adoption en 1990 d’une législation draconienne en matière d’accessibilité a contribué à rendre les villes, dont New York, très handi- friendly. Le métro et le réseau de trains de banlieue sont partiellement accessibles, 75 stations en autonomie et 120 avec aide; New York 2012 envisage d’adapter 70 autres stations, principalement celles qui desservent les sites olympiques. Les bus disposent tous de rampes d’accès. L’offre hôtelière est diversifiée, et les tarifs jadis très élevés ont baissé depuis la désaffection touristique que subit le pays depuis quelques années. Les distractions (la plupart des Music- Halls sont wheelchair- friendly) et sites touristiques sont nombreux, et même la Statue de la Liberté est accessible… jusqu’au troisième étage.
Paris. La circulation sur les trottoirs de la Capitale (lire cet article) est assez aisée, les abaissés très répandus. Le gros point noir, c’est le métro : complexe et d’une conception ancienne, seules ses extensions récentes sont accessibles. Paris 2012 envisage de rendre accessibles sept stations desservant des sites olympiques ou assurant des correspondances, mais cela ne garantit pas de se rendre aisément à son hôtel ou de visiter la ville. Le réseau bus intra- muros compte actuellement 29 lignes accessibles en fauteuil roulant, et sa mise en accessibilité totale devrait être achevée en 2007. Si les gares du Réseau Express Régional (R.E.R) sont progressivement dotées d’ascenseurs, l’accès aux rames demeure impossible sans aide et aucune solution technique satisfaisante n’a été définie à ce jour. On peut trouver dans Paris des hôtels accessibles et avec chambres aménagées, le label Tourisme et Handicap permettant de les identifier aisément. Aucun souci à redouter en matière de restauration, on trouve toutes les gastronomies à tous les prix. Se divertir peut être problématique : l’accueil et le placement des personnes handicapées motrices varient d’un lieu de spectacle à l’autre. Par ailleurs, la plupart des musées sont accessibles, à l’exception notable du Musée Carnavalet, administré par la ville de Paris, et dédié à l’histoire de la Capitale…
Dans ces cinq grandes métropoles, quelle que soit la décision du Comité International Olympique, les visiteurs qui se rendront aux Jeux ne devraient pas trop se retrouver en situation de handicap dès qu’ils sortiront des parcours spécifiquement conçus pour eux. Les Jeux de 2012 semblent donc s’annoncer handi-friendly…
Laurent Lejard, mai 2005.