A 8 heures d’avion et 5 heures de décalage horaire de la Métropole, la Martinique, Département français depuis 1946, fait partie de l’archipel volcanique des Petites Antilles. Ses côtes sont baignées à l’Est par l’Océan Atlantique et à l’Ouest par la Mer des Caraïbes. L’été y est perpétuel, ce qui rend attrayant le voyage au coeur de l’hiver métropolitain : 26° en moyenne dans l’air comme dans l’eau, et des précipitations fortes mais limitées en durée, le tout baigné par la douce caresse des vents alizés. Le transport aérien y est encore prohibitif (surtout pendant les vacances scolaires) mais la récente extension du programme Saphir d’Air France aux Départements d’Outre Mer permet aux personnes handicapées et à leur accompagnateur de bénéficier de réductions substantielles particulièrement attractives hors- saison.

L’île, qui est à la fois un Département et une Région, mesure à peine 80 km dans sa plus grande longueur et une quarantaine dans sa plus grande largeur. Mais ces courtes distances doivent composer avec une voirie sous- développée et en mauvais état qui rallonge considérablement les temps de parcours. Aussi étonnant que cela puisse paraître, les embouteillages sont fréquents, surtout aux abords de Fort de France; quant au respect des règles de la circulation automobile, il est laissé à l’appréciation des conducteurs du fait de l’absence de présence policière. On divise traditionnellement le « pays » en quatre secteurs autour de la préfecture : Nord Caraïbe, Nord Atlantique, Sud Caraïbe, Sud Atlantique.

Pour qui ne veut pas bronzer idiot, la location d’un véhicule est au moins autant indispensable que la crème solaire et le couvre- chef. De nombreux loueurs en proposent un peu partout sur l’île, principalement aux abords des grands centres touristiques et de l’aéroport du Lamentin, à des prix comparables à ceux pratiqués en métropole. Il est aisé de trouver des voitures avec boîte automatique, la climatisation n’est pas un luxe. Au fil des routes, vous découvrirez quelques spectacles rares en Métropole, tels des vaches et autres bestiaux paissant sur l’accotement, ou des épaves d’automobiles mangées par la végétation. Dernière précaution, qui a son importance : munissez- vous de lotion anti- moustiques et de boules Quiès; les nuits tropicales sont peuplées d’insectes (qui piquent) et autres bestioles particulièrement bruyantes…

Fort de France, la Préfecture, compte environ 100.000 habitants (Foyalais) et un centre historique réduit. On peut flâner dans ses rues, près du port, ou (de jour exclusivement) dans sa célèbre « Savane » mais on y cherchera en vain des monuments de quelque importance, à l’exception de la cathédrale Saint- Louis ou de la bibliothèque Schoelcher. Victor Schoelcher (1804- 1893) est très célèbre ici, et pour cause: il est à l’origine de l’abolition de l’esclavage en 1848. L’impression de torpeur provinciale qui saisit le visiteur à Fort de France est renforcée par le fait que les commerces, ici, ferment au coucher du soleil, soit vers 17h30.

Pas de chaudes nuits foyalaises, donc, sauf si vous avez le privilège d’être invité(e) au sein d’une famille antillaise pour un « Zouk » arrosé, jusqu’au matin, des traditionnels Punchs. Les Martiniquais ont en effet un rythme de vie assez proche de celui des gens de la campagne, levés et couchés tôt. Ils ne sont ni plus ni moins affables que leurs compatriotes de Métropole et leurs concitoyens handicapés n’y bénéficient pas davantage d’accessibilité en dehors des constructions récentes. Remarquons toutefois que les places de stationnement réservé sont généralement respectées lorsqu’elles sont bien signalées au sol. Précisons également que la voirie ménage de véritables gouffres à roues de fauteuil entre chaussée et trottoir : les caniveaux sont généralement remplacés par de profondes rigoles infranchissables et mieux vaut s’assurer, avant de s’y engager, que l’on pourra sortir du trottoir que l’on veut emprunter…

Le Nord Caraïbe. Cette région abrite notamment l’ancienne capitale de la Martinique, Saint- Pierre, détruite en 1902 par l’éruption de la Montagne Pelée qui domine toujours le paysage du haut de ses 1.397m. Désormais modeste bourgade (quoique sous- préfecture) la cité offre un étonnant bord de mer aux sables noirs et quelques ruines qui témoignent encore de la violence d’un cataclysme qui fit 40.000 morts en quelques minutes. Un musée (accessible) propose quelques témoignages émouvants de ce « Petit Paris des Antilles » aujourd’hui disparu. Quant au volcan, son exploration, difficile, est à réserver aux sportifs. Les autres pourront plus simplement se délecter des splendides paysages de « mornes » (formations volcaniques) couverts d’une végétation luxuriante où les fougères arborescentes et les palmiers se disputent l’espace avec les bougainvillées, les anthuriums ou les orchidées. Juste au- dessus de Fort- de France, le Jardin de Balata est, en la matière, un must (hélas inaccessible aux fauteuils) à ne manquer sous aucun prétexte, ne serait- ce que pour pouvoir y contempler à l’envi les innombrables colibris qui y butinent ! 

Jardin de Balata. © François Nagot.

Le Nord Atlantique s’étend quant à lui de la presqu’île de la Caravelle à Grand- Rivière, au bout de la route, juste en face de l’île voisine de la Dominique dont on peut apercevoir les côtes. C’est une région moins développée et donc plus pauvre que la façade caraïbe mais les paysages y sont majestueux et la nature époustouflante : des lianes pendent au- dessus des routes qui la sillonnent et l’océan y est omniprésent. Comme partout en Martinique, les restaurants proposent de nombreux plats à base de poisson (à chair rouge ou blanche) et de fruits de mer. Le poulpe est ici appelé « chatrou » et les (grosses) écrevisses « z’habitants ». On mange généralement pour les mêmes prix qu’en métropole mais en un temps beaucoup plus long du fait d’un service souvent indolent (mais rien ne presse lorsque l’on est en vacances, n’est-ce pas ?).

La presqu’île de la Caravelle séduira certainement les amateurs de romans de pirates avec sa toponymie romanesque (Morne de la Régale, Baies du Galion et du Trésor, Pointe du Diable…) et son Château Dubuc, ruines auréolées de mystère qui dominent une mer turquoise couverte d’îlets où l’on trafiquait, dit- on, les esclaves et le rhum… Rhum qu’il vous est fortement conseillé d’acheter en dehors des distilleries (surtout le rhum vieux), ces dernières pratiquant des tarifs bien plus élevés que les grandes surfaces locales pour le même produit.

Le Sud Caraïbe est la région où les infrastructures touristiques sont les plus développées (parfois même à l’excès, comme à Trois Îlets). On y découvre de merveilleux paysages de carte postale, et tant pis pour le cliché « cocotiers, plage de sable blanc » : il faut en faire l’expérience au moins une fois dans sa vie ! Si la zone centrale qui s’étend du Lamentin à Rivière Salée présente peu d’intérêt, les nostalgiques de Joséphine de Beauharnais (1763- 1814), enfant du pays et esclavagiste notoire, pourront toujours arpenter les ruines du domaine de la Pagerie pour se distraire de l’effarant déballage touristique de la Pointe du Bout. La route côtière qui rejoint les Anses d’Arlet au Diamant (et son fameux rocher) est un enchantement. Quant aux plages, c’est du côté de Sainte- Anne qu’il faudra les chercher. Sainte- Anne qui, comme le Marin et ailleurs, enterre ses défunts dans d’étonnants cimetières blancs dominant la mer. Les personnes handicapées qui souhaitent accéder aux joies du bain en eaux turquoises devront se faire aider. La célèbre plage des Salines est bondée, surtout en fin de semaine, mais on peut y stationner aisément assez près du bord. Il en va de même pour la sublime plage du Diamant au ressac plus vigoureux.

Cimetière du Marin. © François Nagot.

Enfin, le Sud Atlantique démarre au niveau du Canal de Sainte Lucie (du nom de l’île voisine, visible par temps clair) et couvre un espace s’étendant du Vauclin au Robert en passant par le François (découvrez ici son embarcadère). C’est le lieu de villégiature favori des « Békés », riches propriétaires blancs descendants des premiers colons dont le nombre est inversement proportionnel au pourcentage des terres qu’ils possèdent. On peut y promener en mer sur les hauts- fonds (attention, nombreux pièges à touristes) ou y pêcher. La route qui escalade les mornes vers Saint Esprit réserve en outre de larges panoramas sur l’île et ses deux mers. La population martiniquaise est majoritairement constituée de Créoles, peuple métissé (noir, blanc, indien, chinois) dont le sentiment communautaire, voire identitaire, perdure jusqu’en Métropole à travers une langue, commune à toute la Caraïbe, et de nombreuses traditions. Les Métropolitains installés sur l’île éprouvent parfois un certain isolement et quelques difficultés à intégrer cette société où la famille élargie occupe une place prépondérante.

La Martinique, essentiellement vouée au tourisme (mais aussi à la banane et à la canne à sucre), vit pourtant en paix et souffre de l’amalgame qui est fait avec la socialement tempétueuse Guadeloupe située à une centaine de kilomètres plus au Nord.

Que ce soit pour retrouver l’été et ses plages, découvrir la splendeur de la nature ou la bonhomie et les talents culinaires de ses habitants, la Madinina des Indiens Caraïbes offre au visiteur une grande diversité de paysages et la promesse d’autant de sensations. Par delà les clichés, elle reste avant tout une destination « de rêve » désormais accessible dont il serait dommage de se priver !

Jacques Vernes, Janvier 2004.


Pour en savoir plus :
 Quelques pages sur les activités adaptées balnéaires et ludiques présentées par Noël Cicalini. Un touriste aveugle raconte son expérience en jet- ski. Enfin, Caribbean Spirit est une agence de voyage proposant des activités et séjours adaptés.

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