On sait peu que Lourdes, capitale du pèlerinage chrétien, le col du Tourmalet, incontournable du Tour de France, et l’observatoire du Pic du Midi, célèbre auprès des astronomes du monde entier, sont situés dans le même département des Hautes-Pyrénées. On sait encore moins (et c’est tant mieux !) que l’arrière-pays et la montagne ont été particulièrement choyés par la Nature et qu’on y pratique un tourisme raisonné, respectueux de l’environnement. Le touriste y est traité en invité, parfois même en membre de la famille, une approche d’autant plus appréciable qu’elle se fait rare dans des régions plus courues. Le département s’est engagé depuis quatre ans dans une politique de labellisation Tourisme et Handicap : un travail qui se fait « en synergie avec les besoins des consommateurs » selon Henri Forgues, Président de Hautes-Pyrénées Tourisme Environnement.
Alors, Lourdes ? En dehors de la saison des pèlerinages (Pâques à Toussaint), la Cité Mariale paraît endormie, ses sanctuaires quasi-déserts, la plupart de ses boutiques fermées, une atmosphère sereine qui conviendra à quiconque, croyant ou non, ne se sent pas à l’aise parmi les foules ferventes et les marchands du Temple. Depuis les premières apparitions de la Vierge à la jeune Bernadette Soubirous, en 1858, pas moins de trois basiliques ont été construites (dont une souterraine) longées par le Gave de Pau au bord duquel se trouve la célèbre Grotte. Les basiliques sont pleinement accessibles, de même que la majorité des équipements religieux et touristiques de la ville, même si les abaissés de trottoir y sont aléatoires et les rues du centre ancien plutôt pentues. Curiosités locales, des voies de circulation pour fauteuils roulants sont peintes en rouge sur la chaussée de quelques rues; dans l’enceinte des sanctuaires, on installe certains pèlerins sur d’anachroniques chariots bleus bâchés façon rickshaw, tirés par des aidants, dédiés à de généreux donateurs, et dénommés « tringlots ».
A droite de l’entrée des sanctuaires, Porte Saint Michel, les pèlerins pourront utilement se renseigner au Pavillon des personnes malades, handicapées et de leurs familles (dépendant de l’O.C.H), qui dispose en outre d’une maquette tactile du site. Bien desservie côté transports (train, avion, autocars), dotée de bus urbains accessibles et seconde ville de France en matière hôtelière, Lourdes dispose de nombreuses chambres adaptées à tous les budgets, ce qui peut en faire un excellent point de chute duquel « rayonner » ensuite pour des activités de pleine nature.
Des loisirs accessibles. Grâce à l’action d’associations locales (notamment le Comité Départemental Handisport) une politique de mise à disposition de matériel adapté via des loueurs généralistes a été mise en place dans le département (liste disponible sur la brochure généraliste des stations de ski et auprès de Hautes Pyrénées Tourisme Environnement). Il est ainsi possible de pratiquer le handiski, le tandem ski (nouvelle appellation du fauteuil-ski A.P.F) ou le handbike (vélo à main, lire cet article) en toute indépendance et au même tarif que la location d’un matériel « grand-public ». Par exemple, au sud de Lourdes, sur la Voie verte des Gaves, aménagée sur une ancienne voie de chemin de fer longeant le Gave de Pau et qui rejoint Pierrefitte Nestalas à 17 km (faible dénivelé), au milieu d’un majestueux paysage de plaine cerné de montagnes. La Voie est labellisée Tourisme et Handicap (la première en France) et traverse quelques villages pittoresques où il est agréable de faire escale, telle la station thermale d’Argelès Gazost.
A la différence des Alpes, les Pyrénées regorgent en effet de sources thermales. Quelques établissements, récemment rénovés, sont parfaitement accessibles aux personnes handicapées motrices, à l’instar du luxueux Aquensis de Bagnères de Bigorre : décor de rêve, accessibilité parfaite à toutes les activités, eaux naturellement chaudes, saunas, hammam et vue imprenable depuis les jacuzzis du dernier étage ! Les skieurs qui cherchent à se détendre après leur dernière descente n’ont que l’embarras du choix puisqu’on trouve de ces établissements pratiquement au pied des pistes à Luz Saint Sauveur, Cauterets, Barèges Barzun et Saint Lary Soulan. A l’exception notable des stations du Tourmalet (La Mongie) et de Piau Engaly, les Pyrénées ont également échappé à la bétonisation : ici pas « d’usine à touristes » mais un décor à échelle humaine où l’on ne se sent pas condamné à skier le jour… et errer le soir ! Revers de la médaille, l’absence de transports interurbains adaptés oblige la plupart des personnes handicapées motrices à se déplacer en voiture.
Aux dires des handi-skieurs, bien qu’il soit possible de pratiquer sur l’ensemble des domaines du département (liste complète auprès d’H.P.T.E), les stations les mieux adaptées sont celles de Luz Ardiden et de Barèges, avec une préférence pour la première, qui offre des toilettes adaptées, une cafétéria et un accès plus direct aux pistes. Dans toutes les stations, le personnel est sensibilisé à l’accueil des publics handicapés même s’il se murmure que les handi-skieurs sont mieux reçus en dehors des vacances scolaires… Les novices pourront prendre des cours sur place auprès de moniteurs spécialement formés de l’École du Ski Français (E.S.F), ou compter sur l’aide de l’association Hanima (Estaing) pour une prestation plus complète pouvant inclure l’hébergement, surtout adapté aux groupes constitués. Hanima effectue également des promenades en traîneau à chiens dans des paysages grandioses.
Plusieurs stations proposent des balades en motoneige après la fermeture des pistes. Autre originalité des Hautes-Pyrénées, on y compte quelques gîtes accessibles dont les propriétaires proposent un éventail d’activités pour un prix tout à fait raisonnable. Par exemple, le Gîte du Poiré (Molère), labellisé Tourisme et handicap dans la région des Baronnies, au pied des montagnes (liste disponible auprès de H.P.T.E) : ses propriétaires possèdent du matériel adapté (fauteuils Hippocampe) et sont des acteurs du développement d’activités locales, telle la création d’un sentier de randonnée accessible longeant la rivière Arros qui sera réalisé courant 2006.
Paysage et farniente. On les trouve par exemple au Cirque de Gavarnie (autre incontournable du département), au Gouffre d’Esparros (accessibilité partielle) ou au Pont d’Espagne (accès par téléphérique de plain pied), au-dessus de Cauterets : un domaine splendide où l’on jouit d’une nature totalement préservée. Il n’est d’ailleurs pas rare d’y apercevoir des isards, les chamois d’ici, raison pour laquelle les animaux domestiques y sont interdits (sauf les chiens guide ou d’assistance). C’est le paradis des randonneurs; on peut également pratiquer quelques loisirs sportifs en famille, au pied du domaine.
Les Hautes-Pyrénées fourmillent, par ailleurs, de restaurants d’altitude où l’on peut, pour un prix modique, déguster une garbure de premier choix, arrosée ou non de Madiran, en contemplant le paysage. Quant aux amateurs de spécialités régionales, ils pourront partir à la découverte du Noir de Bigorre ou du haricot tarbais dans de nombreux établissements de l’arrière-pays.
Le sommet, c’est le cas de le dire, en matière de panorama, reste le célèbre Pic du Midi de Bigorre qui, du haut de ses 2.877m et ses 130 ans d’histoire humaine, domine toute la région. On l’atteint à partir de La Mongie (stationnement réservé devant la gendarmerie, sans panneau mais avec un marquage au sol… invisible en cas d’enneigement). Le téléphérique est parfaitement accessible; toutes les installations du Pic ne sont pas ouvertes au public (il reste encore des scientifiques et des techniciens sur le site dont une partie est d’ailleurs classée Secret Défense) mais celles qui le sont, y compris le très intéressant musée inauguré en 2000, sont aisément accessibles. Si le temps s’y prête, vous dominerez depuis le sommet une mer de nuages baignée de lumière; hélas, il n’est pas encore possible d’y vivre le coucher et le lever de soleil, privilège des seuls « professionnels », la création d’une structure d’hébergement restant encore à l’état de projet. En raison de l’altitude et de brusques variations de la pression atmosphérique, la visite est toutefois déconseillée aux insuffisants respiratoires et aux cardiaques.
Marre de la neige ? Levez les yeux, vous apercevrez quelques palmiers ! (Re)piquez une tête dans une piscine chauffée, évadez-vous à l’aquarium tropical de Pierrefitte Nestalas (accessible) ou… rendez-vous à la belle saison !
Laurent Lejard, janvier 2006.
En pratique : La location de matériel de ski assis s’effectue au prix de celui d’une paire de skis standard dans des certaines boutiques : coordonnées à demander au préalable auprès de l’Office de Tourisme de la station concernée, qui vous adressera également une fiche détaillée sur l’accessibilité, les services adaptés et les tarifs particuliers. Le Comité Départemental Handisport pourra également vous apporter des informations complémentaires sur les activités de loisirs praticables en fonction de votre handicap. 9 rue de la Plaine, 65360 Allier. Tél. 05 62 45 31 77.
La documentation touristique tout-public éditée par Hautes-Pyrénées Tourisme Environnement (H.P.T.E, lisez ce propos de son Président) ne comporte que les mentions de labels Tourisme et Handicap. Un document spécifique détaille les sites, hébergements et activités dont l’accessibilité a été vérifiée mais qui n’ont pas fait l’objet d’une labellisation; il comporte la liste des loueurs de handbike, skis et autres matériels adaptés. H.P.T.E peut également vous adresser les fiches d’accessibilité des stations de ski.
Association Hanima : Route du Col des Bordères, 65400 Estaing. Tél. 05 62 97 44 93, fax 05 62 97 47 12. Gîte du Poiré : Sylvie et Eric Andrieu, Route de Capvern 65130 Molère. Tél. 05 62 39 05 65.