La Catalogne, dont nous avons déjà présenté quelques aspects hivernaux et estivaux, a récemment fait parler d’elle à l’occasion du référendum avorté sur l’indépendance de ce qui, pour la majorité des Catalans, est un pays à part entière. Mais si les rapports avec Madrid demeurent tendus, les visiteurs étrangers sont d’autant mieux accueillis ici que la région, bénie des dieux en ce qui concerne le climat et la géographie, s’est fait une spécialité du tourisme depuis la période romaine !

Cerise sur la gâteau, les tarifs pratiqués, à prestation égale, sont plus attractifs qu’ailleurs, surtout en dehors des vacances scolaires, et les réseaux de transports, généralement accessibles, permettent de s’y rendre sans difficulté.

Sur la Costa Brava, de nombreuses cités balnéaires ont aménagé des plages adaptées dont les équipements (sanitaires, tiralos, etc.) fonctionnent de juin à septembre mais on peut aisément, en fauteuil roulant, déambuler toute l’année sur les promenades de bord de mer où l’atmosphère, selon la saison, va du paisible au festif, sous les palmiers et un soleil toujours généreux.

À L’Escala, station populaire située à quelques encablures de la frontière française, on peut même faire de la voile adaptée au club nautique, dont les installations le sont également. Des stages s’y déroulent de juin à septembre mais les pratiquants aguerris peuvent réserver des créneaux au-delà de ces périodes. Le club organise chaque année un championnat de voile adaptée très couru. Le plan d’eau, facile à naviguer, offre un magnifique panorama, notamment sur la cité antique d’Empuries, dont subsistent quelques vestiges.

Plus au sud, à Calonge-Sant Antoni, l’offre adaptée inclut des hôtels et restaurants accessibles ainsi qu’un guide de visite en braille disponible à l’office de tourisme. En été, la prestation « platja accessible », déployée sur le site de Torre Valentina, est gratuite mais il est fortement conseillé de réserver. Comme la plupart des villes de la côte, le centre ancien, lové autour de son château médiéval, est situé à quelques kilomètres à l’intérieur des terres: les bords de mer, jadis, étaient infestés de pirates…

En complément des loisirs balnéaires ou culturels, on peut (re)découvrir les puissants vins de la région et visiter quelques caves. Citons notamment celle du vénérable Mas Ponsjoan, toujours à Calonge, dont le propriétaire, haut en couleurs, offre un accueil qui ne l’est pas moins à ses visiteurs handicapés ! Outre les nectars amoureusement élaborés (et vendus aux initiés sans autre étiquette que l’année de production), on trouve ici une délicieuse huile d’olive ainsi que des fruits et légumes de saison. Les caves voûtées sont accessibles par rampe et élévateur. Parking possible près de l’entrée.

À quelques kilomètres de là, au départ de Sant Feliu de Guixols (dont certaines plages sont également adaptées), l’agence de « tourisme actif » Bicicarril vous propose de découvrir plus de 130 km de voie verte pour conduire les plus courageux jusque dans les Pyrénées, à travers de splendides paysages. Les tronçons les moins pentus sont aisément praticables en vélo adapté, que l’agence met à disposition pour un tarif raisonnable, de même que des produits touristiques comprenant l’hébergement et les transferts.

À Tarragone, au sud de Barcelone, la Costa se fait Daurada. De l’antique Tarraco, capitale de province (ce qu’elle est demeurée) magnifiée par les Romains, subsistent de multiples vestiges aujourd’hui classés au patrimoine Unesco, au coeur desquels s’est développée la ville médiévale, augmentée au fil des siècles et au-delà des remparts, de parties classiques puis modernes, dont une très longue rambla, animée de jour comme de nuit, dont le « balcon sur la mer » n’a rien à envier à la capitale catalane. C’est une cité trépidante où les traditions, notamment celle très spectaculaire des pyramides humaines (castells), sont encore bien vivantes. Que l’on soit ou non amateur de « vieilles pierres », il faut absolument faire halte à l’Arcade du Pallol, sur la place éponyme, où se trouve une immense maquette de la cité antique, parfaitement accessible, comme sont accessibles avec aide, quelques rues plus bas, les titanesques soubassements du cirque romain, uniques en leur genre de cette importance, où règne une atmosphère tout aussi unique. Et ce qui reste de l’amphithéâtre, à flanc de coteau, dominant le bleu de la Méditerranée, vaut à lui seul le voyage! Quant au très riche musée archéologique, il est accessible par élévateur puis ascenseur et réserve de belles surprises à ses visiteurs, dont une remarquable présentation audiovisuelle (en français) du contexte historique de la cité.

À une demi-heure de route de Tarragone, en poursuivant sur la côte, Cambrils est un charmant port de pêche encore en activité où les infrastructures touristiques restent discrètes et où il est particulièrement agréable de déambuler, y compris en fauteuil roulant. Un petit train (accessible par élévateur) permet d’en faire le tour mais on peut se contenter de jouir des lieux, notamment de la très longue promenade de bord de mer (avec plages adaptées, ici aussi), et s’attabler à l’une des nombreuses terrasses qui ponctuent le centre-ville pour déguster, entre autres, les poissons pêchés au large. L’office de tourisme a développé un guide d’accessibilité ainsi qu’une « route des sens » ouverte à tous, qui permet de découvrir l’endroit, son histoire et ses métiers de façon originale.

L’arrière-pays montagneux de Tarragone réserve par ailleurs de belles surprises. À Sarral, d’abord, où l’on travaille l’albâtre (étonnant minéral aux propriétés translucides) depuis un siècle, subsistent quelques ateliers artisanaux. L’un de ces artisans a patiemment accumulé les collections qui forment un musée dont une partie seulement est accessible en fauteuil roulant mais qui devrait bientôt être réaménagé dans des locaux de plain-pied. Dominant le village depuis la colline, l’émouvant ermitage des Saints-Mages a été reconstruit dans les années 1970 par un architecte local dans l’esprit du Corbusier. L’accessibilité n’est pas idéale en fauteuil roulant mais le portail vivant et coloré de l’édifice vaut le détour. Le regard porte au loin, dans une atmosphère paisible…

fontaine dans le cloître de l'abbaye de Poblet.

En poursuivant dans ce pays de contreforts, à quelques encablures du spectaculaire village fortifié de Montblanc, se dresse le non moins spectaculaire monastère royal de Poblet, classé au patrimoine Unesco. Fondé au XIIe siècle par un comte de Barcelone, il a atteint son apogée au XIVe siècle. Fermé au XIXe et fortement dégradé par la suite, il a rouvert en 1940 avec une importante campagne de restauration qui s’est poursuivie jusque dans les années 1990. La communauté monastique cistercienne compte actuellement une trentaine de membres reclus dans une partie de l’abbaye qui ne se visite pas. Le reste, dont l’imposante église abbatiale, ses tombeaux des rois d’Aragon et son merveilleux cloître, sont ouverts aux visiteurs, y compris handicapés. Lesquels ne pourront toutefois pas accéder à l’étage. Restauration et hébergement possibles sur place. Une escale hors du temps…


Jacques Vernes,
décembre 2014.


Sur le web, l’Agence catalane de tourisme a mis en ligne un site internet francophone spécifiquement dédié aux visiteurs handicapés. Tous les aspects sont détaillés, du tourisme culturel au bien-être en passant par les loisirs ou la gastronomie: un incontournable! Pour des informations plus générales sur la destination et des idées de séjour, consultez, toujours en français, le site Catalunya experience.

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