Ils sont près d’une trentaine, dans deux salles de la résidence Saint-Louis, situé dans l’emprise de l’hôpital ophtalmologique des 15-20 (Paris 12e). Robert Lacoche, le chef de choeur, fait travailler ses choristes en petits groupes, avant que tous se retrouvent pour répéter ensemble. Plutôt âgés et à majorité féminine, ils forment depuis près de trente années la chorale Loisirs et Rencontres, créée en 1978, et dirigée depuis 1989 par Robert Lacoche. Lequel, jadis, dirigeait une chorale scolaire, ayant lui-même été choriste. Il réalise également des arrangements, et compose des musiques interprétées par la chorale, dont les membres résident à Paris et en Île-de-France. Quelques-uns n’ont d’ailleurs que quelques étages à descendre pour se rendre dans la salle de répétition !

Chacun sa méthode : des aveugles ont un cahier de partitions en braille, d’autres chantent de mémoire, les malvoyants déchiffrent un texte très agrandi, les voyants utilisent une partition traditionnelle. Quelques aveugles enregistrent au magnétophone. Dans la salle, une vingtaine de femmes et près d’une dizaine d’hommes, dirigés par Robert Lacoche, lui-même aveugle, qui les accompagnent au piano électronique. La prédominance féminine nécessite de trouver un équilibre entre les voix, l’une des difficultés de l’entreprise. Une autre consiste à diriger un choeur « sans les yeux », et trouver la technique qui fait qu’un soliste attaquera sa partie au bon moment, que les différents pupitres entreront en jeu à l’instant voulu : « Nous chantons à quatre voix, précise Robert Lacoche, alors que la plupart des chorales amateurs jouent à l’unisson ». Le lancement des interprètes se fait à l’oreille, en leur faisant marquer un ou deux repères musicaux : « Cela nécessite beaucoup de travail, une véritable discipline, c’est très difficile ».

Robert Lacoche estime que les femmes sont plus sérieuses, dans l’ensemble, que les hommes, moins intéressés : « Cela nous oblige à faire des choix, à transposer des oeuvres ». Le répertoire de la chorale est composé de chants populaires ou traditionnels, dans lesquels les choristes se sentent plus à l’aise, d’airs du répertoire classique ou religieux. « On rencontre des difficultés dans le chant à vocalises, concède l’une des choristes, où les airs de la Renaissance ». La chorale donne peu de représentations durant l’année mais répond aux sollicitations quand il s’en présente; elle prépare actuellement son grand concert annuel de novembre prochain. Tous ont encore le souvenir émerveillé d’un grand concert qui s’est déroulé le 6 mai 2006 au Palais des congrès de Paris, « Coeurs en choeurs », avec plus de 400 autres choristes dont 150 handicapés, une manifestation qui pourrait devenir un événement européen.

Les partitions et le matériel sont financés par l’association Saint-Louis des 15-20, la chorale s’inscrivant dans les activités de cette association. « Avant, précise Robert Lacoche, on faisait une quête durant nos concerts ! Côté déplacements, on fait avec nos propres moyens. On est tous bénévoles. Le plaisir de chanter et les rencontres sont nos grandes récompenses ». Un plaisir de chanter qui fait se rencontrer ceux qui voient et ceux qui voient… autrement.

Laurent Lejard, mai 2007.


La chorale répète tous les vendredis de 14h à 16h30 au rez-de-chaussée de la Résidence Saint-Louis, 28 rue de Charenton ou 9 rue Moreau, 75012 Paris.

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