Les 12 heures de Pont de Vaux, dans l’Ain, sont considérées comme le championnat du monde de quad. Et dans l’édition 2011, qui s’est courue dans le week-end caniculaire du 19 au 21 août, l’une des équipes comportait un pilote atteint d’une paraplégie haute, Melwynn Rodriguez, une première à ce niveau. Pilote de moto-cross avant l’accident de voiture qui l’a rendu handicapé en 2000, ce jeune Nantais âgé de 30 ans, qui assure la direction marketing et communication d’une entreprise de service informatique, avait ensuite opté pour le quad. « J’ai été poussé à faire du quad en compétition par des amis qui m’ont vu piloter, ils m’ont dit que j’avais ma place en Ufolep [Union Française des Oeuvres Laïques d’Education Physique] ». Ce qui a conduit Melwynn à participer, en 2010, au Quad Contest, compétition par équipe de deux qui se déroule à Pont de Vaux en parallèle du Mondial, grâce au soutien de Kawasaki. Lors de cette première compétition, dans laquelle il courait avec Cédric Emeriau, Melwynn Rodriguez a rencontré quelques spécialistes qui l’ont encouragé, ce qui l’a incité à s’engager au sein du Team Plein Gaz pour participer à la course phare, les 12 heures de Pont de Vaux, sur un Suzuki carburant à l’éthanol cette fois.
Comme le précédent, l’engin a bien évidemment été modifié : selle élargie et rembourrée par un gel anti-escarres, velcros sur l’engin pour accrocher le pantalon afin de rester bien assis, boite automatique séquentielle commandée par boutons au volant, freinage couplé des quatre roues et commandé à la main. « On a tout créé nous-mêmes, il n’y a pas d’autre pilote paraplégique dans la compétition ! ». Melwynn, comme ses co-équipiers Alexandre Diaz et Jérémy Lheureux, a effectué une préparation physique adaptée et s’est entouré d’un encadrement de qualité.
« Il fallait énormément de volonté, de courage, et une bonne préparation. Lors de la compétition, on était soignés par une chiropraticienne; mes douleurs disparaissaient, je n’ai pratiquement pas de force dans les abdominaux et les dorsaux, en pilotage tout passe dans les bras. Et on était déchargés de la logistique, de la mécanique, on pouvait se concentrer uniquement sur le pilotage ».
Ces 12 heures sont une course d’endurance en trois manches, étalées sur 24 heures, par des températures infernales atteignant 47° le dimanche ! Et la course du Team Plein Gaz a été marquée par de multiples incidents mécaniques : la commande de boite de vitesses fonctionnait mal, l’engin a été arrêté par le commissaire de course parce que le feu arrière était en panne, jusqu’à l’accident d’un équipier dès le début de la troisième manche, plusieurs tonneaux et un engin en piteux état, sans blessure heureusement. Mais l’équipe voulait passer la ligne d’arrivée, et les mécaniciens se sont acharnés pour remplacer les trains avant et arrière. Finalement, le Team Plein Gaz s’est classé 63e sur 96 concurrents, en parcourant au total 143 tours en 12 heures 6 minutes et 56 secondes, pour une moyenne de 44,26 kilomètres/heure : « Chacun de nous s’est sorti les tripes pour batailler ! ». Et Melwynn Rodriguez pense déjà à d’autres courses de quad, telles les 10 heures de Bastogne ou l’enduro du Touquet : « La volonté prime par dessus-tout »…
Propos recueillis par Laurent Lejard, septembre 2011.