Elle est la dernière de la lignée des Granier de Clermont l’Hérault et dans son livre « Bien des choses de ma part », Frédérique raconte une partie de son parcours de vie. Avec comme point de départ et fil conducteur les lettres que son grand- père André Granier, alors prisonnier en Allemagne, écrivait à sa famille durant les années de sa captivité, de mars 1915 à janvier 1918. De cet aïeul, mort prématurément d’un infarctus à l’âge de 48 ans, dix années avant la naissance de Frédérique, elle dresse un portrait tout en tendresse, nostalgie et regret de n’avoir pas connu ce grand- père emblématique. Parce que Frédérique a vécu une enfance ballottée entre un père frivole et alcoolique, une grand- mère aimante et autoritaire, et une mère sans amour filial.

Au fil des pages, Frédérique Granier puise dans les racines familiales pour trouver la source de sa propre substance. Elle relate la découverte de sa surdité, les difficultés relationnelles qu’elle a pu engendrer, les bonheurs également, tel la découverte du rock au moyen d’un Teppaz et d’un appareil auditif qui fut parfois difficile à apprivoiser. Et son plaisir à se retrouver dans le monde du silence, pour mieux se comprendre, seul avec soi- même, détaché du vacarme futile des autres.

En écrivant ce livre, Frédérique a essayé de repousser les limites du handicap : « C’est à cause de ma surdité que ma mère m’a rejeté et que mon père a refusé d’avoir un autre enfant ». C’est sa grand- mère Eugénie qui lui a donné le goût de l’écriture et du français. « Elle m’incitait à parler, et évoquait souvent son mari, ce grand- père André que j’ai aimé au point de vouloir lui écrire. Quand j’ai retrouvé les lettres qu’il a adressées, durant sa captivité, à sa famille, et qui était écrites au crayon, je les ai recopiées; au fur et à mesure, j’ai ressenti le besoin de parler à ce grand- père en lui écrivant, en lui racontant ce qu’était devenu sa petite- fille qu’il n’a pas connue ». Dans ce récit, Frédérique Granier a voulu conserver la mémoire d’une famille riche et dont le patrimoine fut dilapidé par son père.

« Frédérique a tellement souffert de la solitude qu’elle se repliait sur ses carnets et ses poèmes, précise son mari, Jean- Marie Meuger. Son livre est une manière de dialoguer avec des absents qui ne la comprenaient pas ».

Avant qu’elle soit appareillée, à l’âge de 12 ans, Frédérique était un peu hors du monde, ne percevant pas tout ce qui se disait autour d’elle. Elle a néanmoins suivi une scolarité classique. Adulte, elle est devenue sportive, son médecin lui avait conseillé de courir pour réduire les conséquences d’une insuffisance rénale. Elle a assidûment pratiqué la course à pied et a participé à une quinzaine de marathons : « j’en suis fière », précise- t-elle. Une fierté qu’elle doit à ces Granier languedociens dont la dernière descendante porte haut la mémoire.

Laurent Lejard, mai 2003.

« Bien des choses de ma part », de Frédérique Granier, est publié par les Editions Christian. Disponible chez l’éditeur, 14 rue Littré à 75006 Paris (19 euros) ou auprès de Jean-Marie Meuger : 112 rue des rosiers, 92500 Rueil-Malmaison.

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