L’État va devoir s’acquitter d’une astreinte de 10 millions d’euros pour ne pas avoir mis en oeuvre des actions en faveur de l’amélioration de la qualité de l’air. Cette condamnation par le Conseil d’État résulte d’une première décision rendue en 2017 et non suivie d’effet trois ans plus tard comme il l’avait constaté le 10 juillet 2020. La plus haute juridiction administrative a donc opté pour une sanction financière qui sera versée à l’association plaignante Les Amis de la Terre (100.000€), des agences de l’État (8,8 millions) et des organismes de contrôle de la qualité de l’air (1,1 million). Ces 10 millions sont insignifiants pour le budget de l’État mais ils mettent en évidence un laxisme au long cours qui en rappelle un autre, la déshérence dans laquelle l’État maintient la Prestation de Compensation du Handicap.
Créée par la loi du 11 février 2005, elle devait assurer aux personnes handicapées le financement des aides humaines nécessaires à la vie quotidienne à domicile et des équipements indispensables, aménagement du logement et aides techniques. Dès 2006, les plafonds de dépense et tarifs applicables sont apparus insuffisants. Depuis, les montants plafonds n’ont pas changé, leur « pouvoir d’achat » a donc été baissé de 20% selon un avis du Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées (CNCPH) rendu le 16 juillet dernier ; le même jour il votait d’ailleurs une motion formulant des demandes de règlement des nombreuses carences de la PCH. Quant aux tarifs applicables aux aides techniques, ils devaient être complétés par un fonds de compensation dans chaque département devant assurer les demandeurs de ne pas avoir à leur charge plus de 10% du montant de la dépense. Dès l’origine, le dispositif de compensation du handicap était à la fois partiel, complexe et hypothétique, dépendant de la bonne volonté des multiples financeurs des fonds départementaux en l’absence d’un texte réglementaire réglant la question. C’est ce texte que les gouvernements successifs n’ont jamais rédigé et publié, entraînant une première condamnation par le Conseil d’État le 24 février 2016, suivie d’autres les 24 octobre 2018 et 27 mai 2021. Là, les astreintes sont ridiculement basses et ne dérangent pas le Gouvernement : s’il a fait adopter par le Parlement en mars 2020 une loi réformant la Prestation de Compensation du Handicap, c’est pour ne pas l’appliquer. En effet, le décret qui devait réglementer le fonctionnement des Fonds Départementaux de Compensation n’est pas rédigé, alors que celui qui crée un nouveau comité chargé d’élaborer des adaptations du droit à la compensation a été approuvé par le CNCPH le 19 février 2021 et publié quatre mois plus tard.
Un comité de plus, ça n’engage à rien et permet de jouer la montre. Cette stratégie gouvernementale est très développée, dans tous les domaines dont le handicap. Depuis l’arrivée de Sophie Cluzel au secrétariat d’État aux Personnes handicapées, on relève la création de 16 comités : école inclusive, université inclusive, emploi accompagné, amélioration d’accès aux aides techniques, évaluation de la politique de l’autisme, stratégie pour les aidants, feuille de route MDPH 2022, terminologie du handicap, représentation dans les médias, participants à Mon parcours handicap, santé mentale, projet EPoP, suivi et évaluation de l’emploi, parentalité, handicap psychique, habitat inclusif. Un 17e comité créé en quatre ans pour décider de ne pas décider…
Laurent Lejard, août 2021.