Fondée au IXe siècle par des moines (d’où son nom, dont la racine se retrouve par exemple dans Münster ou Moustiers), Munich a de tout temps occupé une place économique mais également culturelle de premier plan. Située sur la route du sel qui traversait l’Isar, affluent du Danube, elle doit son rayonnement à la dynastie des Wittelsbach qui y a régné du XIIe au XXe siècle et dont les plus célèbres représentants, du moins pour les Français, sont Isabeau de Bavière, épouse du roi de France Charles VI (début du XVe siècle), la princesse palatine Élisabeth-Charlotte, au XVIIe siècle, fameuse épistolière, duchesse d’Orléans, belle-soeur de Louis XIV, et au XIXe siècle, l’impératrice Élisabeth, alias Sissi, et son cousin le non moins célèbre Louis II, personnage crépusculaire, amoureux de Wagner, bâtisseur de châteaux de contes de fées, dont les Bavarois sont toujours très épris. Berceau de grands artistes et intellectuels, la ville bascule du côté obscur après la Première guerre mondiale, quand Hitler et ses séides y fondent le parti national-socialiste avant d’ouvrir le premier camp de concentration à Dachau, en banlieue, où furent internés, entre autres, les héritiers de la maison de Wittelsbach. Mais la capitale bavaroise sera également le berceau de la Rose Blanche, emblématique mouvement de résistance au nazisme… Très endommagée par les bombardements alliés, la cité a connu une renaissance fulgurante après la Seconde guerre mondiale : prospère et trépidante, elle est désormais le siège de nombreuses multinationales allemandes (Allianz, BMW, Siemens…), pôle universitaire de premier plan, et bien sûr sportif avec le célébrissime Bayern, dont les couleurs, à l’instar de la marque BMW, reprennent les armoiries du land, qui sont celles des Wittelsbach.
Le symbole de la cité adopte quant à lui l’effigie du moine (devenu entre-temps un enfant) qui lui a donné son nom.
Le centre-ville, globalement plat, offre de larges trottoirs, des places spectaculaires et une vaste zone piétonnière ponctuée de fontaines et de passages dans l’esprit des traboules lyonnaises, où alternent boutiques, édifices publics, religieux et brasseries. Lesquelles, aussi vastes que des halls de gare, ne désemplissent pratiquement pas de la journée: habitants et touristes s’y côtoient dans une atmosphère bon-enfant animée par des serveuses en tenue traditionnelle et des groupes de musique folklorique. Cliché, certes, mais bien sympathique! On peut y déguster, dans un décor évoquant « la Bavière éternelle » la gastronomie typique de la région (où bretzel et weisswurst tiennent le haut du pavé) mais surtout les nectars locaux: chacune des six brasseries « historiques » de la ville propose exclusivement les siens à des prix tout à fait raisonnables. Les tables peuvent être communes, occasion de lier connaissance, et l’accessibilité en fauteuil roulant ne pose généralement aucun problème, pour autant qu’on se cantonne au rez-de-chaussée.
Sachez, si l’envie vous prend de tâter de la brasserie Ratskeller située sous l’énorme hôtel de ville néogothique, qu’un ascenseur est disponible à l’entrée côté rue. Côté place, ne manquez pas d’assister au spectacle animé qu’offre tous les jours à midi et à 17h le carillon du beffroi, avec sa joute de chevaliers et sa danse des tonneliers.
La Marienplatz, ses restaurants et ses commerces, sont le coeur battant de Munich, rendez-vous des touristes comme des habitants avec le marché aux victuailles (Viktualienmarkt) tout proche, où les producteurs locaux vendent leurs denrées et où les terrasses du Biergarten (littéralement « jardin de bière ») désemplissent d’autant moins, aux beaux jours, qu’il est permis d’apporter son pique-nique. On y sert au tonneau, tour à tour, les six bières autorisées lors de la célèbre Oktoberfest, qui existe depuis 1810 et qui, en dépit de son nom, se déroule fin septembre sur l’immense Theresienwiese (abrégé en Wiesn), au sud de la ville. C’est la plus grande fête du genre au monde : plus de six millions de visiteurs ! La municipalité veille néanmoins à ce que l’ambiance reste traditionnelle et familiale : suivez ce lien pour plus de précisions si vous souhaitez affronter la foule et préparer votre venue lors de la prochaine édition…
Mais il n’y a pas que les plaisirs de la table, à Munich ! Non loin de la Marienplatz et du Viktualienmarkt, en bordure de zone piétonnière, s’étend l’immense complexe palatial de la Résidence des rois de Bavière. Sa construction s’étant étalée sur plusieurs siècles, les styles architecturaux s’y côtoient, de la Renaissance au néo-classicisme. Gravement endommagé par les bombardements, le palais a été soigneusement restauré mais certaines parties, notamment décoratives, ont disparu à jamais. Ce qui se visite aujourd’hui n’en demeure pas moins fantastique dans l’opulence, parfois la démesure. En fauteuil roulant, on se consolera de l’inaccessibilité de la salle du trésor des Wittelsbach en explorant les innombrables salons débordant de marbres, d’ors, d’écaille, de nacre… ou de coquillages, tel l’étonnant nymphée qui jouxte le nom moins étonnant antiquarium, long de 66 mètres, ou les cabinets rococo garnis de miroirs et de porcelaines précieuses. Un monte-charge (largeur de porte : 67cm) permet d’accéder aux différents espaces, voire de s’y perdre en rêvant à la splendeur de la cour de Bavière et à ses hôtes illustres… L’un des clous de la visite est sans conteste le théâtre Cuvilliés, du nom de l’architecte qui a conçu ce joyau baroque miraculeusement préservé où des spectacles sont régulièrement donnés. Les spectateurs en fauteuil roulant, placés en fond de salle, bénéficient d’une excellente visibilité.
Attenant à la Résidence, l’opéra d’État de Bavière, l’un des plus prestigieux d’Allemagne (de nombreuses oeuvres de Wagner y ont été créées sous la houlette de Louis II) propose une programmation de niveau international. Les spectateurs en fauteuil roulant bénéficient de places avec tarif réduit pour l’accompagnateur, mais les prix et l’affluence restent à la mesure du prestige de l’endroit…
Autre lieu prestigieux à l’excellente accessibilité aux fauteuils roulants: la Philharmonie, sise dans le centre culturel Gasteig, au sud-est du centre-ville, sur l’autre rive de l’Isar. Réservations indispensables!
Les nostalgiques handicapés moteurs de Louis II… ou d’Eugène de Beauharnais, gendre de Maximilien Ier de Bavière, ne pourront accéder à leurs tombeaux, situés au bas d’un escalier dans la crypte de l’élégante église Saint-Michel (Neuhauser Strasse, en zone piétonnière) mais ils pourront jouir à leur aise du décor lumineux de la nef, accessible par une rampe latérale au bâtiment.
À l’inverse, si la nef de la toute proche Bürgersaalkirche (« église de la salle des bourgeois ») est inaccessible en fauteuil roulant, la crypte de plain-pied présente une émouvante exposition consacrée à Rupert Mayer, prêtre jésuite opposant au nazisme déporté en camp de concentration puis détenu dans une abbaye bénédictine bavaroise d’où il n’est ressorti que pour mourir en 1945, à l’âge de 69 ans. Il a été béatifié par Jean-Paul II en 1987. Le successeur de ce pape, Joseph Ratzinger, aliasBenoît XVI, a quant à lui officié dans la massive et très dépouillée cathédrale Notre-Dame (Frauenkirche) accessible par rampe, dont les deux tours dominent le centre-ville et où le diable en personne a laissé son empreinte (à vous de trouver où)!
Autres nourritures spirituelles : les musées, également de stature internationale, rassemblés pour la plupart dans le quartier de la Kunstareal, en bordure de centre-ville, accessible notamment via les transports en commun : les usagers handicapés peuvent emprunter sans encombre trams, bus ou métros (certaines stations sont de véritables galeries commerciales.) Non seulement le choix est pléthorique mais un article complet ne suffirait pas à détailler l’extraordinaire richesse de ces institutions où l’on pourrait passer des journées entières !
Citons notamment l’Ancienne Pinacothèque (Alte Pinakothek) dédiée à l’art européen du Moyen-Âge au XVIIIe siècle, qui expose les plus grands maîtres : elle est en cours de rénovation (jusqu’en 2018) mais certaines sections restent ouvertes, quelques oeuvres emblématiques se « promenant » dans les musées attenants ou à l’étranger. En face, la Nouvelle Pinacothèque (Neue Pinakothek) est consacrée aux artistes majeurs du XIXe siècle. Cette trilogie muséale est complétée par la lumineuse Pinacothèque d’art moderne (Pinakothek der Moderne) où sont réunis les grands noms des XXe et XXIe siècles. Les amateurs d’art antique trouveront leur bonheur à la Glyptothèque et dans les collections d’antiquités de l’État (Staatliche Antikensammlungen), dont les bâtiments néo-antiques se font face sur la vaste Königsplatz (place royale), ou encore au musée national d’Art Égyptien. Histoire toujours, mais récente, celle du National-Socialisme dont le centre de documentation ouvrira début mai 2015 dans un immeuble moderne blanc immaculé, à quelques pas de la Königsplatz.
Précisons que la plupart de ces établissements, à l’exception notable des collections d’antiquités de l’État, présentent une excellente accessibilité en fauteuil roulant et qu’il est possible de s’y restaurer; des stationnements réservés sont en outre disponibles. Pour une liste exhaustive des musées de Munich, avec les indications d’accessibilité, consultez ce portail spécifique en allemand et en anglais. Sachez enfin que le dimanche les musées d’État sont à 1€.
Dans un genre bien différent, en périphérie de Munich, aisément accessible par le métro, l’ancien parc olympique (celui des Jeux d’été de 1972, de triste mémoire à cause de la prise d’otages suivie de l’assassinat d’athlètes israéliens par des terroristes palestiniens) est devenu un espace arboré où il est agréable de déambuler. Dominées par la « tour olympique » (utilisée pour la radiodiffusion mais que l’on peut visiter et où l’on peut manger dans un restaurant panoramique tournant), les anciennes installations servent toujours lors d’événements culturels ou sportifs.
Attenants au complexe, les bâtiments ultra-contemporains du BMW Welt (« Le monde de BMW ») attirent nombre de visiteurs passionnés d’architecture et/ou d’automobile: la partie show-room, où sont exposés les modèles, sert en effet de lieu de livraison des nouveaux véhicules à leurs heureux acheteurs, avec un protocole et une mise en scène typiquement allemands… L’endroit, parfaitement accessible, comporte également boutiques et restaurants, et se prolonge, via une longue passerelle, jusqu’au musée organisé autour d’une rampe hélicoïdale, également desservie par un ascenseur. L’histoire de la marque y est retracée par des modèles restaurés à l’état neuf et le nec plus ultra des interfaces multimédia: un paradis pour les amoureux de BMW !
Achevons cette escapade par celle des rois de Bavière en périphérie de Munich : le château de Nymphenburg était leur résidence d’été. Cadeau du prince-électeur Ferdinand-Marie à son épouse Henriette-Adélaïde de Savoie pour la naissance de Maximilien-Emmanuel, héritier longtemps attendu (1662), il a été agrandi par ce dernier et ses successeurs. L’une des ailes du bâtiment sert d’ailleurs de résidence officielle au chef actuel de la maison de Wittelsbach, le duc François de Bavière, né en 1933. Le palais, immense, évoque les fastes de la Résidence de ville mais avec légèreté. L’étourdissante salle des fêtes rococo vaut à elle seule le voyage mais on s’émerveille également sur la décoration des appartements royaux donnant sur le parc, son grand canal inspiré de Versailles, ses perspectives infinies et ses jeux d’eau. S’il vous reste un peu de temps, attardez-vous au musée des carrosses, installé dans les anciennes écuries : c’est l’un des plus riches d’Europe et il est accessible de plain-pied. Outre les véhicules hippomobiles débordant d’or utilisés pour les couronnements, vous pourrez notamment y découvrir quelques-uns des traîneaux empruntés par Louis II lors de ses longues errances hivernales : c’était si romantique, d’être roi de Bavière…
Jacques Vernes, mars 2015.
Sur le web, le site officiel de la ville de Munich propose une partie francophone dédiée au tourisme, qui permet de préparer un séjour dans ses moindres détails. Côté handicap, un site dédié, également francophone, recense tous les lieux accessibles, aussi aux visiteurs déficients sensoriels. Et pour des informations plus générales sur le tourisme accessible en Allemagne, suivez ce lien.