A quelques mois de son 50e anniversaire, Manuele Bertoli quitte le Parlement du Tessin, dans lequel il a siégé durant une douzaine d’années, pour rejoindre le Gouvernement. Il en dirige désormais le département de la Culture, de l’éducation et des sports, au côté des quatre autres chefs de départements représentant les partis du centre et de l’extrême-droite. Manuele Bertoli est progressivement entré dans la cécité à cause d’une dégénérescence rétinienne, après un parcours professionnel contrarié : il n’a pu exercer en tant qu’instituteur, sa vue étant alors trop dégradée, et a entrepris des études de droit à Genève grâce au minimum social de l’Assurance Invalidité, équivalent suisse de l’Allocation aux Adultes Handicapés. Il a mis ses nouvelles compétences au service de l’Association Suisse des Locataires (Asloca), de l’association des aveugles et malvoyants de Suisse italienne (Unitas), du Parti Socialiste tessinois qu’il préside depuis 2004. Et, plus inattendu, d’un groupe de rock, les « légendaires » Green Onions, dont il est le pianiste attitré ! Marié, il est père de deux jeunes enfants.
Question : Qu’est-ce qui vous a conduit à vous engager en politique ?
Manuele Bertoli : Mon intérêt pour la politique est né pendant mon adolescence. J’ai participé à des associations, à des mouvements politiques, puis aux activités du Parti Socialiste. J’ai été élu dans les institutions, d’abord au Conseil Communal, puis au Conseil Municipal de Barlerna, ensuite député au Grand Conseil [Parlement] et maintenant au Conseil d’État [Gouvernement].
Quelle est la portée de votre activité politique, en plus d’agir pour les personnes handicapées ?
Manuele Bertoli : Je dirai que je suis intéressé par les questions sociales, celles liées à la justice, à l’environnement, à l’utilisation des deniers publics. Je tiens à réduire les exclusions sociales, dans tous les sens du terme, ce qui se fait avec une politique sociale, une bonne politique de formation, avec la création d’emplois, etc. Je voudrais également que la Suisse soit plus ouverte, moins égoïste…
Comment les personnes handicapées ou valides perçoivent-elles votre action ?
Manuele Bertoli : Eh bien, vous devez leur demander ! Au Conseil Communal, puis Municipal, et au Grand Conseil, après la curiosité initiale, tout est devenu normal, avec des aménagements pratiques, mais rien de plus.
Votre handicap a-t-il joué un rôle particulier dans votre engagement politique, positivement en générant de la sympathie, par exemple, ou négativement ?
Manuele Bertoli : Franchement, je ne sais pas. Ce qui me préoccupe, c’est d’expliquer que faire de la politique aujourd’hui, sans voir, avec les moyens d’aides techniques et informatiques qui existent, est tout à fait possible en ayant une indépendance substantielle. Je n’ai jamais voulu utiliser mon handicap pour me faire élire, mais je ne voulais pas qu’il constitue pour quiconque une raison de ne pas voter pour moi.
Comment voyez-vous votre avenir politique ? Quelles sont vos ambitions ?
Manuele Bertoli : Je n’ai pas d’autre ambition que celle de remplir la fonction que j’occupe. J’ai l’intention d’accomplir ce mandat avec détermination, tant que les électeurs me le permettront.
Propos recueillis par Laurent Lejard, mai 2011.