Les aléas de la vie ont conduit en Charente ce quadragénaire né dans le Nord et élevé en Alsace, devenu paraplégique à cause d’un accident alors qu’il avait 26 ans : « J’ai quitté l’Alsace en 1994, muté à Bordeaux. J’ai travaillé dans la compagnie aérienne Air Inter jusqu’à sa fusion avec Air France en 1997, en profitant du plan social pour la quitter. Du fait de mon handicap, que je travaille ou pas j’avais la capacité de vivre convenablement, alors que je n’avais pas de perspectives de carrière au sein d’Air France. J’ai rejoint l’un de mes frères à Confolens, après avoir divorcé de mon épouse de l’époque ». En 2003, François Weller a rencontré une nouvelle compagne, ils se sont mariés puis installé à Abzac : « Notre maison est grande, de plain-pied, avec du terrain autour et une grande salle de bains. Mais je ne suis pas resté sans rien faire, en m’impliquant dans l’associatif, comme avant d’ailleurs, c’est le résultat de mon éducation parentale ». François Weller a notamment créé une association de motards ouverte à tous, qui organise le Jumbo Run de Confolens, une manifestation annuelle qui réunit motards et personnes handicapées, dont le but est de « passer un bon moment ! sourit François Weller. Je conduis une moto side-car, j’ai été naturellement remarqué par les motards… »
Militant associatif, il a rapidement été au contact des élus locaux : « Je suis quelqu’un d’actif, le fauteuil roulant faisait que j’étais sollicité par les collectivités, pour les conseiller sur l’accessibilité. Je n’ai pas franchement un parcours politique, même si j’ai pris la carte du Modem en 2007, un parti qui me correspond le mieux depuis que j’ai été élu maire. Mais j’étais candidat sans étiquette lors des élections municipales. Dans notre milieu rural, l’étiquette politique n’a pas de sens ».
Mais si François Weller a voulu éviter le clivage politique, il est confronté à un clivage « historique » sur la conduite des affaires communales à Abzac : « Je m’y suis installé en 2005 mais je n’ai découvert toutes les histoires locales que depuis l’élection à la mairie… On est venu me chercher : l’ancien maire m’a proposé de me présenter aux élections municipales. Je ne connaissais rien du fonctionnement d’un conseil municipal, d’une commune mais j’aime les défis : j’ai essayé ! Avec les autres membres de la liste, on partait sans se connaître. Comme j’avais déjà rencontré des élus, je leur ai demandé conseil sur la manière de faire campagne. Alors, je suis allé vers les habitants, pour qu’ils me connaissent. J’ai frappé à toutes les portes, et rencontré 80 % de la population. Pas pour faire campagne, mais pour parler des problèmes de chacun, dialoguer. »
Deux ans plus tard, François Weller était candidat au Conseil Régional sur la liste Modem, dont le score ne lui a pas permis d’être présente au second tour, ni même de fusionner : « Pour les élections régionales, je me suis laissé embarquer; j’ai dit ‘pourquoi pas’, pour tester, par opportunité, pour suivre une aventure en jouant le jeu. J’ai touché à la politique politicienne. Là où ça m’a déplu, c’est l’aspect alliance politique, avec le jeu des places pour tel ou tel parti. J’ai atteint mes limites, je n’y retoucherai pas… J’ai des valeurs centristes évidentes, qui me sont propres. Je n’aurais pas fait de compromission dans les élections municipales. »
Depuis son élection à la Mairie d’Abzac, François Weller a cessé ses activités associatives : « Quand on est en fauteuil roulant, on reflète une image de compassion ou de répulsion. Mais quand vous êtes bien dans votre peau, vous êtes attirant, notamment pour des gens qui ont besoin de vous pour assumer leur personnalité. Je suis handicapé, mais je sors du moule. Dans notre éducation, on aide les personnes handicapées, les plus vulnérables. J’ai cette image, qui en réalité n’est pas vraie, même si elle a des effets bénéfiques. Au niveau des maires de Charente, je suis clairement identifié. Mais au début, pour beaucoup, j’étais au mieux conseiller municipal, mais pas maire, ça leur apparaissait inconcevable ! »
Propos recueillis par Laurent Lejard, octobre 2010.