Question : Pourquoi êtes-vous entré dans l’action politique : par conviction idéologique, ambition personnelle, volonté de triompher du handicap ?
Vincent Assante : Par refus des injustices, de la misère et des inégalités, je me suis toujours intéressé à la chose publique. De plus, né en Algérie, j’ai vécu douloureusement ce qu’on appelait pudiquement « les événements ». Durant mes années d’adolescence, j’ai mesuré d’abord ce que signifiait la volonté d’un peuple à disposer de lui- même, puis que les conditions d’existence déterminant largement la conscience, la constitution de la société en classes distinctes était une évidence, les conflits entre elles inévitables. Des lors, mon positionnement à gauche a découlé tout naturellement. Enfin, l’analyse des ressorts sociaux fondamentaux de ce qu’on appelle aujourd’hui les situations de handicap a fait le reste.
Question : Quel est le champ de votre activité publique : uniquement dans le domaine du handicap ? Quel est votre apport dans d’autres secteurs ?
Vincent Assante : Secrétaire national du Parti socialiste en charge des personnes handicapées, mon intervention première se concrétise dans ce secteur. Cela étant, membre du conseil national du même parti, et participant à son bureau national et à son secrétariat national, je participe autant que je le souhaite ou que nécessaire au débat politique général. En réalité, l’économie politique me passionne, domaine où je note que les experts en France et dans le monde sont plus prolixes pour expliquer les situations passées que pour anticiper l’avenir. Néanmoins, au vu de ces cinq dernières années, je note tout de même avec plaisir que les experts socialistes avaient bien anticipé le profil des tendances économiques et développé une politique de la demande tout à fait adéquate. Voilà ce qui me passionne ! Avouez qu’on est loin des questions de handicap, encore que si l’on y réfléchit bien, les situations de handicap sont pour l’essentiel l’expression des contradictions intrinsèques aux modes de production sur lesquels repose notre société.
Question : Quelles sont vos aspirations : changer de société – projet idéologique, réformer ce qui vous gène?
Vincent Assante : Peut-être pas tant changer de société, parce que cela relève, vous avez raison, d’un projet idéologique, mais changer la société, oui, sûrement! Comment ne pas être réformateur lorsque l’on regarde autour de soi la situation faite à des millions de gens qui vivent dans le stress de perdre un emploi ou d’un avenir limité, sans même parler de ceux qui ont perdu leur emploi et n’ont pour vivre que la charité d’Etat.
Question : Quel regard portent sur votre travail les autres acteurs de la vie locale : élus, militants associatifs, citoyens valides ou handicapés ?
Vincent Assante : Je suis responsable des questions du handicap au parti socialiste depuis maintenant treize ans et j’ai le sentiment d’avoir une certaine crédibilité construite au fil des ans par la connaissance du sujet, par les analyses politiques qui s’y attachent, par le souci de traiter un dossier jusqu’au bout et par une grande disponibilité, toutes choses qui me semblent naturelles quand on prétend faire de la politique. Je note, notamment lors des réunions en province, que les militants associatifs sont particulièrement réceptifs aux analyses politiques que je fais sur les questions de handicap.
Question : Quelle part le handicap prend-il dans les difficultés que vous rencontrez dans votre action militante ? Vous a-t-on fait une place parce que vous êtes handicapé ?
Vincent Assante : Très importante ! Non pour m’exprimer mais pour me déplacer d’autant que les lieux de réunions publiques sont généralement peu accessibles. Je ne parle même pas du stationnement ! Heureusement que lors de réunions importantes, le service d’ordre du parti socialiste apporte beaucoup de soins pour faciliter la participation des militants handicapés. En revanche, le handicap n’est pas un sésame pour entrer dans l’action politique. Mais il est vrai que le handicap n’apporte pas nécessairement de connaissances particulières générales en dehors d’un don d’observation et de réflexion certainement plus importante que la moyenne. Ce qui est tout de même insuffisant.
Propos recueillis par Laurent Lejard, mai 2003
Vincent Assante présente en ligne ses réflexions sur la vie et le devenir des personnes handicapées. Chargé par le précédent gouvernement d’une mission d’étude en vue de la révision de la loi d’orientation du 30 juin 1975, il propose également sa conception du projet de nouvelle loi en faveur des personnes handicapées.