Comment profiter pleinement d’une pièce de théâtre lorsque l’on est aveugle ou sourd ? Sans l’image, on perd le jeu de scène des comédiens, sans le son, on ne comprend pas le sens de l’action. Audiodescription et titrage sont des techniques qui viennent compenser l’absence de perception visuelle ou auditive.

L’audiodescription.
 Elle est destinée aux aveugles et malvoyants. L’action, les décors et les costumes, tous les éléments visuels en somme, sont décrits en voix off lors des intervalles entre les répliques. Le spectateur, muni d’écouteurs individuels, entend le descriptif; par exemple : « Le jeune coq a une culotte de plumes vertes, un col de plumes rouges et une casquette de base- ball. Le poulet est chauve » (in Chantecler d’Edmond Rostand). Les écouteurs n’occultant pas l’audition, les répliques des comédiens sont entendues « en direct » par le spectateur. L’audiodescription est également employée pour l’édition vidéo de films.

Le sur ou sous-titrage.
 Le sur-titrage est utilisé en direction des sourds et malentendants mais également pour tous les spectateurs lors de spectacles représentés dans une langue étrangère. Le texte des répliques est projeté sur un écran situé au- dessus de la scène au fur et à mesure du déroulement de l’intrigue. Certains théâtres préfèrent employer, en direction exclusive des déficients auditifs, le sous- titrage : les spectateurs reçoivent un écran électronique sur lequel ils lisent le texte des répliques ainsi que des informations relatives aux effets sonores (tambour, tonnerre…).

Volontarisme.
 La mise en oeuvre de ces techniques s’accompagne généralement d’actions complémentaires, comme l’édition d’un programme en braille, d’un plan de la scène en relief, d’atelier de pratique artistique. Ces actions sont réalisées par des associations qui doivent trouver les financements nécessaires : en effet, le coût de ces adaptations n’est pas a priori inclus dans le budget de fonctionnement des théâtres subventionnés. Audiodescription et titrage dépendent de la bonne volonté d’un directeur de salle, de subventions publiques, de mécénat privé. Frédéric Le Du, qui dirige l’association Accès Culture, estime qu’il n’y a pas de politique nationale en la matière. Selon lui, l’annonce faite par la ministre de la Culture Catherine Tasca d’une obligation d’accueillir les publics handicapés se heurte à l’omnipotence des directeurs des salles subventionnées et à leur capacité de résistance. Frédéric Le Du privilégie plutôt la réduction du coût des adaptations à la démarche coercitive, en recherchant d’autres salles pouvant acheter l’audiodescription ou le titrage réalisé pour un théâtre précis.

Difficultés.
 Ce travail d’adaptation nécessite aussi de rencontrer le public. Qu’ils soient aveugles ou sourds, les amateurs de théâtre réagissent grosso modo comme tout un chacun : ils privilégient les noms connus, les spectacles vantés par la presse, les oeuvres faciles. En programmant l’adaptation d’une pièce, la présence de malvoyants ou de malentendants dans la salle n’est pas garantie. C’est pour tenter d’avoir quelques assurances en la matière qu’Accès Culture a constitué un réseau de spectateurs informés de la programmation; Frédéric Le Du estime que les spectacles adaptés par son association ont été vus par un millier de personnes l’an dernier. Quant aux associations de déficients sensoriels, elles se sont avérées de piètres relais d’information, pouvant s’associer à une réalisation pour ne pas ensuite inciter leurs adhérents à y assister, par mauvaise coordination entre services ou conflits de calendrier…

Relayer l’information.
 La demande culturelle des déficients sensoriels est freinée par le manque d’information relative à l’offre de spectacles qui leur sont accessibles. C’est ce qui a conduit des personnes sensibilisées à ce problème à créer des associations consacrées à faire connaître les initiatives et à terme stimuler l’offre : Écoutez Voir est l’une d’entre elles, rayonnant sur la région Rhônes- Alpes. Elle diffuse au moyen d’un bulletin papier ou via Internet les informations sur les spectacles accessibles aux sourds et malentendants, qu’ils bénéficient d’adaptation ou que leur nature même les rendent perceptibles tels quels. En région Nord, l’association Trèfle a démarré l’an dernier une activité de sur- titrage au théâtre d’Arras et conduit parallèlement une action d’information sur l’offre de spectacles. Elle intervient au foyer des sourds, s’appuie sur la presse locale, et espère toucher à terme environ 500 malentendants, malgré l’inertie de l’administration d’un important centre de formation de jeunes sourds.

Jacques Vernes, avril 2002


Pour en savoir plus :
Accès Culture publie en ligne la programmation des spectacles qu’elle adapte et présente en détails les dispositifs techniques qu’elle utilise. Un autre regard (9 rue Saint-Sébastien – 75011 Paris – Tél 01 53 36 01 11 – Fax 01 53 36 03 33) pratique le sur- titrage. Elle également prépare l’édition vidéo de programmes sous- titrés. Trèfle (Igor Casas, 03 21 48 86 20) sur- titre des spectacles du théâtre d’Arras. Visuf (Visuel Surdité Francophone) propose un agenda des spectacles avec sur ou sous- titrage, ainsi que ceux qui sont adaptés en Langue des Signes Française. Écoutez Voir diffuse l’information relative aux spectacles de la région Rhône- Alpes.

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