Des matériels bien conçus sont disponibles, clubs et associations multiplient les initiations et les stations elles- mêmes commencent à s’intéresser à une nouvelle clientèle : les handiskieurs. Attention toutefois au froid, qui peut surprendre.
A chacun son ski… Les aveugles et malvoyants skient debout en étant guidés à la voix par un accompagnateur. Quelques- uns utilisent même une liaison radio. L’apprentissage est similaire au ski standard à la différence que l’on fait toucher le ski, sa courbure, ses fixations pour mieux mettre un malvoyant en position de skier. Le guide annonce la direction et les difficultés, ses ordres et son positionnement étant fonction de la capacité visuelle de l’handiskieur : ils sont très précis pour un aveugle, par exemple, « droite ! » correspond à un virage serré à droite (90°) et « droi- oi- oite ! » est un virage large à droite ; ils sont plus simples pour un malvoyant (indication de direction sur la base des heures d’un cadran d’horloge). Ce tandem se signale aux autres skieurs en portant une chasuble d’une couleur bien visible, vert fluo par exemple, dont le dos porte trois points disposés en triangle et la mention « guide » ou « malvoyant ». A part ces adaptations, le ski pour déficient visuel utilise un matériel classique et est praticable partout.
Si vous êtes hémiplégique ou amputé(e) d’un membre inférieur, vous pouvez skier debout, avec éventuellement des adaptations. Citons les stabilisateurs (des spatules de skis fixées sur des cannes anglaises) pour assurer un meilleur équilibre ou le « triski » qui permet d’éviter de croiser les skis en maintenant l’écartement voulu.
Si vous êtes handicapé(e) des membres inférieurs (paraplégique, tétraplégique C6-C7, amputé(e), mais aussi IMC ou trauma crânien) mais pouvez utiliser vos membres supérieurs, le ski assis vous attend. Il s’agit d’un siège (dont vous choisirez la coque selon la fonctionnalité de vos muscles abdominaux et dorsaux) fixé sur un ou deux skis au moyen d’une articulation et d’un amortisseur. Le buste doit être le plus en avant possible afin d’obtenir le meilleur centre de gravité. Le skieur est sanglé aux abdos, à la ceinture et aux jambes, ses pieds sont attachés sur une armature : il devient solidaire de l’engin dont la carrosserie le protège des chocs éventuels. C’est aussi le secret de la manoeuvrabilité du « bob » (c’est le nom générique donné par les moniteurs aux engins de ski assis) : il suit instantanément les mouvements qui vous impulsez. L’équilibre est assuré par des stabilisateurs tenus dans chaque main et qui servent aussi à virer ; vous tournez les épaules en regardant la direction que vous souhaitez prendre et l’engin suit le mouvement par la simple action des stabilisateurs sur la neige. Dans la pratique, c’est quasiment aussi facile à faire qu’à décrire ! Les stabilisateurs servent également à se déplacer sur le plat, un bon handiskieur devant être le plus autonome possible.
D’autres appareils permettent aux tétraplégiques de connaître les plaisirs de la glisse. Le fauteuil- ski est de ceux- là. Créé par l’Association des Paralysés de France, il est composé d’un fauteuil posé sur une paire de skis écartés, l’ensemble étant manoeuvré par un « pilote accompagnateur » formé à cet effet. Le Ski- kart, quant à lui, est un engin ludique utilisable par tout le monde… mais pas partout. Composé d’un siège posé sur une paire de skis articulés et écartés, il est assez facilement manoeuvrable mais doit être réservé aux faibles pentes : dès que leur degré augmente, il y a un risque de renversement de l’engin en cas de virage serré. C’est bien pour cela qu’un skieur suit généralement le kart pour le freiner en cas de besoin : il le retient au moyen d’une corde, en descendant en position chasse- neige. On dirige le kart en manoeuvrant les leviers, qui permettent aussi de descendre en chasse- neige et de freiner.
Le ski assis, c’est facile ! Il ne vous faudra pas plus de six jours pour descendre la plus longue des pistes vertes. Comment 70 kilos de viande humaine peuvent- ils rester en équilibre sur un ski de quelques centimètres de large ? Ce miracle de la physique élémentaire est renouvelé en permanence par les skieurs assis. Parce que l’équilibre est le premier problème rencontré dès que l’on a réussi à s’installer dans un « bob » ; les engins à deux skis (bi- ski ou Dualski) améliorent la stabilité et on peut aussi équiper un uniski d’un « skwal », ce nouveau ski très large qui donne des sensations proches du surf. Et dès que l’équilibre est maîtrisé, ce qui dépend du travail et de la perception de chacun, la glisse devient votre principale préoccupation ! Un bon apprenti peut, en une semaine, descendre convenablement les pistes vertes, alternant virages serrés ou larges et schuss : le plaisir pur de la recherche de la trajectoire, du dérapage contrôlé, de la vitesse sur la neige, et tout cela en parfaite sécurité. Par comparaison, demandez aux « debout » le temps qu’ils mettent pour simplement dépasser le stade débutant au bas de la plus simple des pistes !
Une sécurité permanente pour une glisse plaisir… En skiant assis, vous voici débarrassé de tous les risques d’entorses et de fractures qui font le quotidien des « debout ». Vous n’aurez pas cette appréhension du « je commence à prendre de la vitesse, je risque de tomber et de me faire mal ». Si vous chutez, le pire qui peut vous arriver est de brouter la neige ! Pour autant, ne négligez pas les consignes de sécurité spécifiques au ski assis, indispensables à votre plaisir et à votre autonomie : être accompagné par au moins un bon skieur valide, être attentif aux autres, respecter la procédure d’utilisation des remontées mécaniques.
Comment emprunter une remontée mécanique ? Un « bob » peut utiliser la plupart des installations. Pour le téléski, il dispose d’un « largueur » ; c’est un boudin caoutchouté qui est accroché à la perche par le perchiste. Le skieur, une fois au sommet, s’en dégage en tirant sur une goupille reliée à une ficelle placée dans la main qui tient le stabilisateur. Si ce premier largage ne fonctionne pas, vous disposez d’une deuxième sécurité : une autre goupille elle aussi reliée à une ficelle tenue dans votre deuxième main. Et si vous n’arrivez toujours pas à larguer, votre accompagnateur, qui doit vous précéder dans la remontée, actionnera la commande d’arrêt d’urgence du téléski et viendra vous sortir d’embarras. L’utilisation des télésièges est possible avec un « bob » dont l’amortisseur est débrayable. Votre siège peut alors se poser sur la banquette, votre accompagnateur et l’employé vous assurant éventuellement. A l’arrivée, une simple impulsion ou une poussée de votre accompagnateur vous font descendre de la banquette, et sous l’action de votre poids l’amortisseur est réarmé, vous êtes reparti(e) ! Attention : l’accès aux télécabines et téléphériques oblige généralement à utiliser un fauteuil roulant et à effectuer les transferts adéquats.
Où skier ? Théoriquement partout, en pratique dans de nombreuses stations mais pas sur toutes les pistes. Il faudra vous informer au préalable pour vous assurer que le personnel des remontées est formé aux besoins des handiskieurs et connaître les meilleurs accès au domaine skiable. Le guide « Skier avec un handicap », édité par les comités handisport savoyards présente des informations pratiques concernant des stations de Savoie, Haute- Savoie et Isère (à demander notamment auprès de Handicap Info Chambéry, 04 79 85 81 80). Attention toutefois : les url mentionnées dans cette brochure comportent de nombreuses erreurs qu’il vous appartiendra, en handinaute averti(e), de rectifier « en manuel » ! Le site Internet de la commission fédérale de ski handisport propose une présentation très complète du ski alpin pour handicapés visuels ou physiques, de la compétition et de l’équipe de France, complétée d’une liste d’écoles de ski et de quelques adresses pratiques. Sur le site hiver.com, un moteur de recherche très pertinent permet de sélectionner les stations de ski suivant un critère d’accessibilité aux personnes handicapées. Le site Handiski des délégations alpines de l’APF expose les différents skis possibles dans les Alpes du sud. Antenne Handicap présente ses activités à la station de La Plagne. Pour les Pyrénées, nous n’avons trouvé en ligne que l’association Hanima. En Suisse, l’association Ski Assis propose des stages toute l’année. En Belgique, le club « L’Embarquement Immédiat » propose des stages en France, en Autriche et en Suisse. Ski de fond : Il est pratiqué debout, par les amputés et les hémiplégiques, ou assis par les paraplégiques et double amputés. Loisir ou compétition, le ski de fond est le parent pauvre des sports d’hiver. C’est pourtant un bon moyen de randonner dans les grands espaces montagnards. La direction technique de cette discipline au sein de la Fédération Française Handisport vous propose d’en découvrir l’actualité et de faire connaissance avec l’équipe de France, en photographie et vidéos : suivre ce lien.
Clubs et associations ont des prestations parfois très différentes : telle structure vous demande une simple licence ou adhésion pour vous initier et vous fournir l’équipement nécessaire, telle organisation vous facture tout, de préférence très cher ! Côté matériel, il n’y a pas eu d’évolution notable depuis quelques années. Il semble même que les distributeurs n’aient pas répercuté la baisse de TVA (passée de 20,6% à 5,5%) par une réduction équivalente de leurs tarifs. Alors faites jouer la concurrence : le ski est un sport mais aussi un loisir qui revendique d’évoluer dans un espace de liberté, la montagne. Profitez-en !
Jacques Vernes, décembre 2000.