Début mars, toute la presse s’est émue de la énième mésaventure de personnes handicapées souhaitant honorer de leur clientèle la compagnie aérienne nationale. Cette fois, un couple de jeunes parents aveugles voulait se rendre en Bretagne présenter son bébé âgé de six mois à la belle- famille. La direction régionale niçoise de la compagnie a refusé de délivrer des billets à ces passagers au motif qu’ils devaient être accompagnés par un valide pour complaire au règlement de sécurité. Le tapage médiatique suscité par le conflit qui a résulté de la position arc- boutée d’Air France a conduit le Secrétaire d’Etat aux transports, Dominique Bussereau, à intervenir publiquement. Saisie en référé, la justice a ordonné la délivrance des billets demandés et la compagnie s’est exécutée dans l’heure.
Cette affaire illustre le décalage important entre les paroles et les actes. On se souvient en effet que le président d’Air France, Jean-Cyril Spinetta, a signé deux Conventions relatives à l’accessibilité en décembre 2003. Sur le terrain pourtant, ses employés agissent encore à leur guise. Air France n’est évidemment pas la seule compagnie aérienne à maltraiter parfois les voyageurs handicapés dans notre pays, mais sa position de leader sur le marché français la place davantage sous les feux de l’actualité. Elle pourra tenter de se refaire une image de marque auprès du public en mai prochain, à la faveur de spots télévisés qu’elle sponsorise, réalisés par Serge Moati à la demande du Comité national handicap de Julia Kristéva (et supervisés par le Secrétariat d’Etat aux personnes handicapées) sur le thème « Changeons notre regard sur les personnes handicapées ». Les voyageurs aveugles avec nourrisson apprécieront…
Laurent Lejard, mars 2004.