On ne pourra pas dire que Xavier Darcos manque de suite dans les idées : trois mois après l’avoir annoncé lors de sa conférence de presse de rentrée scolaire 2007, il tente de rendre définitif le traitement particulier dont bénéficie le ministère de l’Education Nationale en matière d’emploi des personnes handicapées. Son prédécesseur, Gilles de Robien, avait obtenu que les dépenses consacrées à la rémunération des personnels affectés à des missions d’aide à l’accueil, à l’intégration et à l’accompagnement des élèves ou étudiants handicapés au sein des écoles, des établissements scolaires et des établissements d’enseignement supérieur soient déduites du montant de la contribution due par ce ministère au Fonds d’Insertion Professionnelle des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique (F.I.P.H.F.P). Autrement dit, les auxiliaires de vie scolaire – valides – sont pris en compte au titre de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés par un tour de passe-passe réalisé à l’occasion du débat parlementaire sur la loi de finances 2006, une opération que Jacques Chirac alors Président de la République avait qualifiée de « filouterie » ! Cette imputation de dépenses était néanmoins limitée en pourcentage et devait s’achever en 2008.
C’est là qu’intervient un amendement gouvernemental au projet de loi de finances rectificative pour 2007 : il supprime les dispositions limitatives introduites dans la loi de finances 2006, et si cet amendement est adopté ce mois-ci, le ministère de l’Education Nationale est assuré de ne jamais devoir verser 1€ au F.I.P.H.F.P.
Lors de l’examen au Sénat du projet de loi de finances pour 2006, le sénateur Paul Blanc avait rappelé, dans le rapport qu’il présentait au nom de la commission des finances, le montant prévisible de la contribution du Ministère de l’éducation nationale au F.I.P.H.F.P : 36,6 millions d’euros en 2006, 73,2 millions en 2007, 109,8 millions en 2008. Ces contributions dues ont été neutralisées par la loi, le montant estimé des dépenses déductibles étant de 127,6 millions d’euros (en pratique, elles dépassent 350 millions d’euros). À partir de 2009, l’Education Nationale aurait, toujours selon cette estimation parlementaire, contribué à hauteur de 18,8 millions d’euros puis 55,4 millions d’euros en 2010. Ce sont ces contributions que le Gouvernement veut annuler, définitivement, sans limite de temps.
Le débat parlementaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2007 vient juste de débuter et l’on ne connaît pas encore l’argumentation du Gouvernement sur son nouvel amendement « exception éducation nationale ». En décembre 2005, le Gouvernement expliquait : « Un dispositif comparable existe dans le secteur privé; il permet de déduire des contributions des employeurs certaines dépenses destinées à favoriser l’insertion des personnes handicapées ». Le délégué ministériel à l’emploi et à l’intégration des personnes handicapées au sein du Ministère de l’éducation nationale, Jean-Christophe Parisot, aura-t-il le courage d’aller défendre devant le Comité National du F.I.P.H.F.P dont il est membre, « l’exception éducation nationale » ? Ce ministère tarde à esquisser le plan triennal pour l’emploi des travailleurs handicapés pourtant exigé par le Président de la République de tous les ministères avant la fin de cette année : simple retard lié à l’énormité du « mammouth » ou mauvaise volonté d’un ministère qui échapperait à toute sanction ?
Laurent Lejard, décembre 2007.