La secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion, Ségolène Neuville, prendrait-elle ses désirs pour des réalités ou tente-t-elle d’abuser l’opinion en propageant de fausses informations ? Dans ses déclarations à la presse et la lettre qu’elle a adressée le 25 septembre dernier, elle vante la mise en oeuvre effective par le Gouvernement auquel elle appartient de l’accessibilité des personnes handicapées au cadre bâti et aux transports, alors que c’est tout le contraire qui va être appliqué par le biais d’une ordonnance ayant force de loi, et dont le contenu est ici analysé en rubriques Flop et Handicap moteur. Ségolène Neuville insiste également sur la concertation avec les associations membres du Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées (CNCPH). Certes, elles ont effectivement été réunies dans des groupes de travail pour définir des points d’accord avec les propositions du Gouvernement et de son administration, deux rapports finaux ont dégagé ces consensus, puis le Gouvernement a tout jeté à la Seine et rédigé un projet d’ordonnance très différent que les associations membres du CNCPH ont rejeté en juin dernier à la quasi-unanimité dans un avis particulièrement sévère; seule la pro-socialiste Fédération APAJH l’a approuvé.
Cet avis, Ségolène Neuville l’ignore superbement, donnant ainsi l’impression qu’elle se moque ouvertement de l’expression des associations. Dans la lettre qu’elle leur a adressée le 25 septembre, elle ose écrire : « cette réforme va donc amplifier très rapidement la mise en accessibilité de notre société. Elle s’impose et devient urgente pour que nous n’attendions pas une décennie supplémentaire. » Or, les dispositions mêmes de l’ordonnance accordent cette « décennie supplémentaire » et même davantage ! Drapée dans sa malhonnêteté intellectuelle, la ministre implique les associations dans la destruction de l’accessibilité pour mieux les piéger : « Les associations du CNCPH ont largement été mises à contribution dans l’élaboration de cette réforme, je tiens à saluer la mobilisation de chacune et chacun d’entre vous. Je sais aussi pouvoir compter sur votre vigilance et votre détermination pour veiller avec le gouvernement à la bonne mise en oeuvre de cette ordonnance. »
Hormis la Fédération APAJH, sur quelles associations croit-elle encore compter pour entériner le désastre ? La ministre conclut son propos en invoquant « d’autres chantiers [qui] vont s’ouvrir et nous réunir dans les prochaines semaines », dont la Conférence Nationale du Handicap (CNH). Or, le Gouvernement dirigé par Jean-Marc Ayrault avait invoqué le calendrier électoral du printemps 2014 pour la renvoyer au mois de décembre; son successeur a voulu nommer de toute urgence le 10 juillet dernier les associations composant le comité de pilotage de cette CNH. Depuis, rien : aucune réunion, proposition, concertation, deux mois avant l’échéance. « On murmure même, ici et là, que la CNH pourrait être repoussée à l’année prochaine, ce qui semble pourtant difficile en raison des élections cantonales qui imposent aux membres du Gouvernement une obligation de réserve dans la période qui précède le scrutin », expliquait récemment à ses membres le président de la Confédération Française pour la Promotion Sociale des Aveugles et Amblyopes, Philippe Chazal.
Mais cela n’entame pas le positivisme forcené de Ségolène Neuville, qui lance une campagne nationale d’information sur l’accessibilité à l’aune de la mise en oeuvre de sa nouvelle réglementation. Elle utilise pour cela les moyens de l’Etat et l’argent de la Nation pour financer cette propagande, qu’elle va déployer sur Internet et des radios. En toute opacité bien sûr, ainsi qu’elle vient de nous l’écrire: « Les détails du coût et des médias concernés par la campagne accessibilité ne sont pas publics. »
Laurent Lejard, octobre 2014.