La secrétaire d’État l’a revendiqué à l’Assemblée Nationale en répondant le 17 novembre à une question passe-plat : « Un comité interministériel inédit s’est en effet tenu, comme le Premier ministre s’y était engagé. Nous l’avons ouvert aux associations : nous ne faisons jamais rien pour eux sans eux (sic), c’est tout l’enjeu de la construction de la politique publique. » Sophie Cluzel était pourtant démentie par ses actes, elle et les autres ministres ayant quitté la salle où se tenait le 9 novembre le Comité National de Suivi de l’école inclusive au moment où le débat s’engageait, comme l’a rappelé l’Unapei. Tout est ainsi dans l’action gouvernementale, et les organisations qui clament encore leur volonté de co-construire les politiques publiques en sont pour leurs frais, dans le domaine du handicap comme dans tous les autres.
Alors, quoi de neuf pour ce CIH ? La confirmation du lancement dès le 1er janvier prochain d’une Prestation de Compensation du Handicap pour que les parents handicapés soient aidés à s’occuper quotidiennement de leurs enfants en bas âge. Mais sous la forme d’un forfait d’une heure par jour d’aide humaine quand ils ont moins de 3 ans, puis de la moitié jusqu’au 7e anniversaire. Et pour les seuls parents qui bénéficient déjà d’une PCH pour aide humaine ou technique, forfait surdité ou cécité. On est loin, très loin de l’objectif de 17.000 parents potentiellement concernés, parce que les parents handicapés mentaux ou psychiques sont exclus de cette PCH parentalité accordée sans déposer un nouveau dossier à la Maison Départementale des Personnes Handicapées. Pour que ce nouveau droit s’applique dans moins de six semaines, il va falloir mettre le turbo pour que le projet de décret soit publié à temps, le Conseil National des Personnes Handicapées (CNCPH) ne l’ayant pas encore examiné.
Le reste de ce CIH n’est constitué que d’un bilan à lunettes roses des actions réalisées ou en cours, et de quelques nouvelles. C’est ainsi qu’une mission sur la revalorisation salariale des professionnels du médico-social va être lancée pour corriger les conséquences néfastes découlant du Ségur de la santé, l’augmentation de 183€ par mois des salaires des soignants exerçant à l’hôpital. Cette approche sectorielle a immédiatement entraîné un déséquilibre entre personnels soignants selon qu’ils travaillent à l’hôpital ou maison de retraite EHPAD, qui toucheront l’équivalent d’un mois de salaire en plus alors que ceux qui exercent pour des hôpitaux mais dans des services externes voient leur rémunération stagner, tous comme ceux qui travaillent dans les établissements médico-sociaux gérés par des associations. Le Gouvernement est incapable de réfléchir et décider en fonction des réalités et des besoins d’un secteur professionnel, il ne sait que parer au plus pressé en colmatant des brèches, ce qui en ouvre d’autres. Cela risque d’ailleurs d’être le cas avec l’éventuelle loi Autonomie, la volonté affichée de la faire adopter avant l’élection présidentielle de mai 2022 empêchant une co-construction intelligente avec les acteurs concernés.
Cela ne les empêche pas de saluer l’annonce par le Premier ministre, Jean Castex, de la tenue du CIH tous les six mois désormais. Une manière d’intensifier l’effort de communication gouvernementale et de faire oublier la bévue protocolaire de Jean Castex lors de sa prise de fonction : il avait annoncé au Parlement le 16 juillet dernier qu’il organiserait une Conférence Nationale du Handicap, prérogative du Président de la République dont la dernière s’est déroulée en février. Parlez, parlez, il en restera toujours quelque chose…
Laurent Lejard, novembre 2020.