Ce n’est pas la faute des Allocataires Adultes Handicapés s’ils partent en retraite à 62 ans : ils y sont mis d’office. Ce n’est pas non plus leur faute si la pension de retraite que beaucoup perçoivent est inférieure à l’AAH : elle résulte des difficultés rencontrées dans notre pays pour effectuer une carrière professionnelle correcte quand on est handicapé.

C’est en revanche la faute de l’État que d’avoir supprimé le Complément de Ressources de 179€ aux allocataires auxquels leur Maison Départementale des Personnes Handicapées l’avait accordé. La Cour de Cassation a été claire sur ce point dans sa décision du 19 septembre 2019 : ce Complément doit être maintenu aux allocataires mis à la retraite. Cette décision s’imposait immédiatement aux organismes payeurs que sont les Caisses d’Allocations Familiales et la Mutualité Sociale Agricole ; cette dernière n’appliquant pas la suppression du Complément de Ressources aux allocataires retraités, la Caisse Nationale d’Allocations Familiales est la seule depuis 31 mois à ne pas avoir tenu compte de l’arrêt de la plus haute juridiction civile. Elle n’a pas informé les allocataires, et joué la montre pour n’organiser le rattrapage qu’à compter du mois de novembre 2022, pour 24 mois seulement.

Elle fait donc économiser au budget de l’État, qui finance l’AAH en totalité, plus d’une trentaine de mois de rappel : la loi prévoit un délai prescription de deux ans qui limite un rattrapage de droits à prestations que la Direction Générale de la Cohésion Sociale veut appliquer ici. Si les CAF avaient rétabli dès 2019 les droits des allocataires retraités, ils auraient bénéficié de cette période de 24 mois de rattrapage à compter d’octobre 2017. Mais avec la décision tardive de la DGCS, administration de l’État, ce sont bien une trentaine de mois de rattrapage qui sont économisés sur le dos des allocataires spoliés.

Seuls ceux qui ont introduit un recours amiable ou judiciaire pourront bénéficier d’un rattrapage total, puisque ces actions interrompent le délai de prescription et fixent le début de la période de rattrapage. Mais ils devront insister auprès de leur CAF ou aller au terme de la procédure au Tribunal Judiciaire. Les autres allocataires spoliés pourront également obtenir de la justice le rattrapage intégral du Complément de Ressources, ce qui les contraindra à une procédure lourde et coûteuse. Une fois de plus, l’État tout-puissant impose sa volonté pour compenser son laxisme.

Laurent Lejard, avril 2022.

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