Fin novembre 2022, huit militants handicapés luttant pour leurs droits ont été condamnés par un tribunal italien à 4 mois de prison ou 4.975 euros d’amende. S’ils ne peuvent ou ne veulent pas payer, ils connaîtront donc les joies de la taule. Leur crime ? Avoir occupé, mi-juillet 2021 pendant une poignée de jours et de nuits, la promenade de bord de mer longeant le siège de la région des Pouilles, à Bari. Un véritable crime de lèse-potentat local, Michele Emiliano qui les avait reçu le mois précédent pour mieux les maltraiter et refuser de reprendre le financement d’aides techniques, humaines et soins au domicile.
Actuellement en Corée, c’est le maire de Séoul qui perd son sang froid : il exige de la police et des agents du métro une tolérance zéro à l’encontre des militants handicapés qui bloquent aléatoirement des stations et des rames. Actions menées depuis plus de 20 ans pour exiger la mise en accessibilité dudit métro mais également des autres transports publics, ainsi que des moyens de vivre dignement. Peu impressionnés par les menaces du maire, les militants ont repris leurs actions dès le 2 janvier, après une trêve de fin d’année. Un tribunal a bien proposé à Séoul Métro d’installer des ascenseurs dans 19 stations d’ici 2024 à la condition que les manifestations cessent, sous peine de 5 millions de wons (3.600€) de dommages et intérêts infligés à l’association protestataire dès qu’elle provoque un retard de train de plus de cinq minutes. L’association a accepté, pas le maire. Fera-t-il emprisonner ces dangereux activistes ?
En Israël, c’est un conducteur paraplégique qui risque également de se retrouver derrière les barreaux pour avoir stationné sa voiture… sur des places réservées. Les deux amendes qu’il ne veut pas payer parce qu’il les estime injustes, viennent d’être assorties par un tribunal d’une peine de cinq jours de prison s’il persiste dans son refus. Têtu, l’automobiliste fait le choix de l’emprisonnement : la peine sera-t-elle appliquée ?
On aurait pu penser, après la condamnation en mai 2021 de 15 manifestants (dont 11 handicapés) par le Tribunal Judiciaire de Toulouse (Haute-Garonne) à des peines de prison, que la répression judiciaire des personnes handicapées était un fait exceptionnel. L’actualité récente montre qu’il n’en est rien : l’arbitraire peut frapper, partout dans monde, les personnes handicapées qui agissent pour leur liberté d’aller et venir comme les autres. Les positivistes y verront des signes d’inclusion (tout le monde dans le même panier… à salade) mais faut-il s’en réjouir ?
Laurent Lejard, janvier 2023.