Jamais le chroniqueur humoriste Philippe Caverivière ne se serait permis de qualifier de « pingouin » la démarche du député Damien Abad si celui-ci était demeuré ministre. Nommé au Gouvernement après avoir quitté son parti (Les Républicains, dont il présidait le groupe parlementaire jusqu’en avril 2022) Damien Abad s’était rallié à Emmanuel Macron et son parti (Renaissance ex-LREM.) Cette « prise de guerre » a fait long feu, Damien Abad étant accusé dès le mois de juin d’agressions sexuelles et de viols, conduisant à l’ouverture d’une enquête judiciaire (sans mise en examen), au lynchage médiatique, à son lâchage par ses nouveaux « amis » politiques et à sa démission. « Damien Abad n’a aujourd’hui plus d’amis pour le défendre, ni ceux qu’il a trahis, ni ceux qu’il a rejoints », résumait début juillet Aurélien Pradié, député du Lot et numéro deux des Républicains.
Le champ était alors dégagé pour agonir le député déchu. Aux différents inquisiteurs a donc succédé, après plusieurs mois d’accalmie, le chroniqueur Philippe Caverivière sur RTL. A l’instar des petits caïds de cours de récréation, il lui était facile de cogner sur un homme handicapé moteur qui, comme tous ceux qui subissent quotidiennement pareilles humiliations, ne peut pas faire rentrer la moquerie dans la gorge de celui qui la profère. L’attaque sur Damien Abad n’a rien à voir avec l’humour mais tout avec la lâcheté. Jamais ce chroniqueur n’aurait obtenu l’accord de son employeur (une radio grand public) de railler le ministre Abad sur sa démarche résultant d’un handicap moteur. Jamais. Et les précédents sont nombreux : cancer de François Mitterrand, malentendance de Jacques Chirac…
Damien Abad n’en finit plus de payer son erreur d’avoir invoqué son handicap moteur pour affirmer qu’il ne pouvait pas violer une femme. Cela ne tempère en rien la gravité des faits qui lui sont reprochés mais, en se définissant comme « handicapé », il s’est exclu de fait de la caste des professionnels de la politique, groupe qu’il avait intégré dès ses jeunes années. Privé de la protection de ce dernier, le voici désormais livré aux chiens.
Laurent Lejard, janvier 2023.