Une minorité de Français accepte de travailler deux années de plus pour avoir le droit de partir en retraite avec la pension pour laquelle ils auront cotisé pendant 43 ans au moins. Le projet de réforme censé garantir « juré craché » la viabilité du système de retraite par répartition est rejeté par la plupart des travailleurs, nombre d’entre eux étant en grève ou engagés dans des manifestations massives. Mais le Président des riches n’en a cure, il veut forcer tous les salariés à travailler davantage que ça leur plaise ou non !
Qu’importe que son gouvernement ne dispose pas d’une majorité à l’Assemblée Nationale pour voter sa réforme, il lui fait employer l’arme absolue de l’engagement de la responsabilité, ce fameux article 49 alinéa 3 de la Constitution de la Ve République. Son gouvernement avait déjà fortement limité l’examen du texte de loi par l’Assemblée, et faute de temps il n’avait pas été adopté. C’est donc sans vote que le texte gouvernemental a été transmis au Sénat qui l’a amendé à la marge et voté. Après élaboration d’un texte commun aux deux chambres lors d’une Commission Mixte Paritaire déséquilibrée, le projet de loi devait être soumis au vote des députés le 16 mars.
Mais faute de majorité assurée, Emmanuel Macron a multiplié les atermoiements, puis convoqué dans la minute un conseil des ministres pour charger la Première ministre d’engager la responsabilité du gouvernement sur ce vote ; le Président de la République a donc décidé en pleine conscience que les députés issus des suffrages de tous les citoyens n’adopteraient pas une réforme qui va toucher durement une grande partie de ces derniers. Il s’agit bien ici d’une oukase, d’un déni de démocratie.
Que va-t-il se passer ? Un nombre suffisant de députés votera-t-il une motion de censure trans-partisane pour faire tomber le gouvernement et la réforme des retraites par la même occasion ? Dans ce cas, le Président Macron s’avouera-t-il vaincu ou dissoudra-t-il l’Assemblée Nationale ? Comment vont réagir les travailleurs en lutte pour leurs droits si le gouvernement ne tombe pas et que la réforme est adoptée sans vote ?
Le Président Macron vit un second mandat sans majorité parlementaire, obligeant son gouvernement à composer avec l’opposition de droite ou de gauche en fonction des textes de loi. C’est ainsi que son projet d’allègement du contrôle de la sûreté des installations nucléaires vient d’être rejeté parce qu’une majorité de députés ne voulait pas d’un risque accru d’accident nucléaire au moment où le Président Macron a décidé de lancer un programme massif, et extrêmement coûteux, de production d’électricité dans des nouvelles centrales.
Ce Président de la République agit seul contre le peuple qui l’a élu à la majorité relative de 38,5% des électeurs inscrits. Là encore, pas de majorité, mais tout le pouvoir entre les mains d’une seule personne…
Laurent Lejard, mars 2023.