Haro sur les chômeurs ! Cette politique de tous les gouvernements depuis sept ans connaît un nouvel épisode qui, cette fois, va fortement toucher des demandeurs d’emploi handicapés arrivés en fin de droit d’allocation chômage. Le Premier ministre, Gabriel Attal, a en effet annoncé dans son discours de politique générale du 30 janvier dernier la suppression de l’Allocation de Solidarité Spécifique versée aux chômeurs ayant épuisé leurs droits à l’allocation chômage. Droits d’ailleurs réduits en durée et montant lors d’une réforme brutalement imposée fin 2022 aux partenaires sociaux alors que le régime d’indemnisation dégageait des bénéfices : 4,3 milliards en 2022, 1,6 milliard d’euros en 2023, 1,1 milliard prévu cette année. Or ces bénéfices ne servent pas à améliorer l’allocation servie aux chômeurs, que le Gouvernement veut punir de l’être, mais à payer aux banques la dette accumulée qui coûte des intérêts, et à l’État à puiser sans vergogne pour financer l’apprentissage et également Pôle Emploi, hier, comme France Travail aujourd’hui. 12 milliards d’euros seront ainsi été détournés dans les années qui viennent.
Dans le contexte de cette politique « à la schlague », Gabriel Attal veut contraindre les travailleurs privés d’emploi à accepter n’importe quel boulot exercé dans n’importe quelles conditions et payé à n’importe quel salaire en déverrouillant « l’accès au travail. » Et ce cost-killer privilégié sans état d’âme entend expédier au RSA les chômeurs en fin de droit. Pour le budget de l’État, cela fera une économie substantielle, tant pis si les travailleurs concernés seront mis « en situation de pauvreté », telle n’est pas son affaire. Ce pourrait être le cas des près de 50.000 chômeurs handicapés qui cumulent actuellement l’ASS et leur pension d’invalidité ou l’Allocation Adulte Handicapé. Ils sont d’ailleurs chaque jour de moins en moins nombreux puisqu’en décembre 2016 le gouvernement socialiste de Manuel Valls avait modifié la loi permettant de cumuler ASS, pension et AAH à compter du 1er janvier 2017. A l’époque, Gabriel Attal n’était encore que conseiller au cabinet de la ministre de la Santé, mais il avait déjà défroqué du Parti Socialiste pour rejoindre Emmanuel Macron et sa République en Marche dont il est désormais le zélateur.
Il incarne parfaitement cette permanence politique de répression des chômeurs en poursuivant ce que ses prédécesseurs ont initié. Fin 2016, de vives protestations avaient contraint le Gouvernement à ne pas supprimer aux bénéficiaires le cumul ASS-pension-AAH, mais à l’interdire aux chômeurs handicapés basculant en fin de droits dès janvier 2017. Les bénéficiaires pouvaient encore cumuler pendant 10 années, soit jusqu’au 31 décembre 2026. C’est ce cumul que le gouvernement Attal veut rapidement supprimer, sans attendre l’extinction « naturelle » de ce droit, par détestation si ce n’est haine des bénéficiaires. Sauf qu’il faut modifier la loi et que réduire les droits de travailleurs handicapés privés d’emploi parce que leur patron les a virés fait mauvais genre et altère davantage encore l’image dégradée du pouvoir en place. Mais que ne ferait pas un gouvernement français pour récupérer quelques poignées de millions d’euros du porte-monnaie des plus vulnérables…
Laurent Lejard, mars 2024.