118 km de trottoirs parisiens ont une largeur inférieur à 1,40m, et si les abaissés de trottoirs sont nombreux, tous n’en sont pas dotés, que ce soit aux extrémités, carrefours et traversées piétonnes. Mais un voeu défendu par le groupe MoDem d’opposition municipale auquel se sont finalement ralliés l’exécutif parisien, sa majorité et les autres groupes de l’opposition, pourrait améliorer l’accessibilité des trottoirs… s’il est mis en oeuvre, ce qui n’est pas si simple comme l’explique son autrice, Maud Gatel, conseillère de Paris et également députée.
Question : Vous avez fait adopter en février 2024 par le Conseil de Paris un voeu relatif à l’accessibilité des trottoirs parisiens. En quoi consiste ce voeu ?
Maud Gatel : C’est un sujet que le groupe MoDem porte depuis longtemps au Conseil de Paris. C’est d’abord la question de l’accessibilité en général, et de la place du piéton en particulier. On considère que le piéton est le grand oublié des politiques de déplacement à Paris, et ça se traduit notamment, mais pas seulement, par l’encombrement des trottoirs d’une part, avec désormais les terrasses estivales, la signalétique parfois, de plus en plus les conteneurs poubelles, les vélos, les trottinettes. Et sur la question de l’accessibilité qui est très importante pour nous, le fait que les trottoirs, au regard de leur mauvais état lié à une baisse significative du budget dédié à la voirie, ne sont pas toujours accessibles au sens où il peut manquer des abaissés au début ou à la fin, ou pour les traversées piétonnes. On a remis ce sujet à l’ordre du jour, à l’occasion du plan piéton qui était présenté par la ville de Paris, en demandant que les trottoirs parisiens soient entretenus, désencombrés et abaissés pour atteindre l’objectif d’accessibilité que se fixe la ville ; or, dans les faits on en est très loin.
Question : Selon les données de l’APUR (Atelier parisien d’urbanisme), 16% des trottoirs présentent une largeur inférieure à 1,80m qui est une largeur confortable pour que des piétons puissent se croiser, qu’ils soient à pied, en fauteuil roulant, avec poussette, et 5% ont une largeur inférieure à 1,40m. Ce sont ces trottoirs dont le voeu demande le recensement pour qu’ils soient élargis ?
Maud Gatel : Absolument.
Question : Quel est le chiffrage des travaux nécessaires ?
Maud Gatel : C’est l’objet de ce voeu. Il demande un calendrier et un chiffrage, on ne les a pas encore. Honnêtement, je ne sais pas si on aura le chiffrage un jour : un voeu n’a aucun caractère obligatoire de mise en oeuvre. Pour l’instant, on n’a rien. Moi je demande un calendrier, un programme de travail, un budget dédié, et pour l’instant je ne les ai pas. Malheureusement, on adopte des voeux au Conseil de Paris, et puis ils ne sont pas toujours suivis d’effets. Je vois comme un signal très positif que, pour une fois, ce voeu soit adopté, parce que j’ai déposé plusieurs fois le même, il était toujours été retoqué par l’exécutif, donc j’y vois une volonté d’y travailler. L’exécutif a donné un avis favorable, donc il a été adopté par la majorité et l’opposition.
Question : Des dizaines de kilomètres de voirie ont été refaits ces dernières années pour aménager des pistes et bandes cyclables, et à cette occasion on remarque que l’accessibilité n’était pas forcément améliorée, notamment sur les nouveaux points d’arrêts des autobus…
Maud Gatel : Tout à fait ! Je suis très défavorable à ces types d’aménagements. Ils sont très dangereux. Au moment de la discussion, à la fois sur le plan piéton et sur le plan vélo, j’ai dénoncé ces aménagements que je trouve très peu confortables pour les piétons et particulièrement peu sûrs pour les personnes les plus vulnérables. Ça fait longtemps que je demande la sanctuarisation des trottoirs, et notamment l’interdiction des pistes cyclables dessus, sans aucune écho de la part de la ville de Paris. Désormais, elle a accepté le fait qu’il n’y ait plus sur les trottoirs de pistes cyclables à l’image de celles du boulevard Magenta, je m’en réjouis. Je demande désormais qu’on supprime les pistes cyclables existant sur les trottoirs.
Question : Quels autres points devraient évoluer en matière d’accessibilité, en stagnation depuis une dizaine d’années à Paris ?
Maud Gatel : Encore cette semaine, j’ai saisi l’adjointe en charge du handicap, Lamia El Aaraje, au sujet des terrasses estivales et des difficultés qu’elles posent aux personnes, notamment malvoyantes, en fonction de la saisonnalité et de l’encombrement des trottoirs. Je comprends tout à fait l’intérêt de ces terrasses, mais il faut tenir compte des personnes malvoyantes, et j’imagine des dispositifs podotactiles pour leur permettre de se déplacer sans craindre de tomber sur une terrasse estivale.
Propos recueillis par Laurent Lejard, avril 2024.