La Côte-d’Azur, dont nous avons présenté quelques pépites culturelles et touristiques, notamment en 2019, 2016 et 2015 (toujours d’actualité en dépit des conditions sanitaires actuelles) est depuis longtemps une destination privilégiée pour ceux à qui le balnéaire ne suffit pas. Rappelons qu’à l’origine, les premiers visiteurs, notamment anglais, prenaient leurs quartiers d’hiver sur le littoral mais qu’il n’était en aucun cas question de bronzer ! Si les temps ont changé, cette vocation culturelle est demeurée, portée par les nombreux artistes qui ont séjourné ici et dont la plupart ne dédaignait pas les bains de soleil et de mer… Les handiplages font désormais partie du paysage, complétant une offre globalement accessible, avec une gamme de prix assez large pour contenter tout le monde. Il n’y a pas que des milliardaires, sur la Côte, et l’arrière-pays n’est pas si difficile d’accès en fauteuil roulant : les clichés ont la vie longue; tourisme intérieur aidant, c’est le moment de leur tordre le cou !
Mougins, par exemple : presque l’archétype du village perché, aussi charmant que pittoresque mais dont on ne s’imagine guère gravir les pentes quand on est à mobilité réduite. Et pourtant : un ascenseur panoramique a été mis en place à flanc de colline, qui rejoint le parking bas (avec emplacements réservés et toilettes adaptées) à la placette typiquement méridionale où se trouvent une tête géante de Pablo Picasso… et l’Office de tourisme. L’accès automobile aux vieilles rues est très règlementé, ce qui permet d’y déambuler sans souci, surtout aux premières heures de la matinée quand le soleil effleure gentiment la peau. Un peu d’aide s’avère parfois nécessaire en fauteuil roulant manuel pour passer quelques pentes mais le « colimaçon » qui conduit au sommet du bourg offre de belles récompenses visuelles et olfactives. Du Mougins des origines ne subsistent que les maisons, amoureusement restaurées : les paysans de jadis ont cédé la place aux artistes et, plus récemment, aux chefs étoilés : un festival international de la gastronomie, Les étoiles de Mougins, est d’ailleurs organisé ici chaque année (sauf en 2020, Covid oblige). Côté nourritures intellectuelles, en attendant l’ouverture après travaux et mise en accessibilité du Centre de la photographie (constitué à partir des collections du photographe André Villers), on peut faire halte au lavoir couvert, qui abrite des expositions temporaires multithématiques, ou se recueillir dans la fraîcheur de la discrète église Saint-Jacques mais le must de l’endroit demeure le Musée d’art classique (MACM) inauguré en 2011 à l’initiative d’un riche mécène. Sur quatre niveaux chronologiques desservis par ascenseur (récompenses visuelles d’un genre particulier offertes à ceux qui empruntent les escaliers), ce grand collectionneur partage ses coups de coeur, de l’Égypte ancienne aux artistes contemporains, certaines oeuvres dialoguant de manière inattendue avec d’autres d’une toute autre époque pour le plus grand bonheur des visiteurs. La collection d’armes antiques est époustouflante, c’est la plus importante au monde en mains privées : de quoi se représenter « en vrai » à quoi ressemblaient les guerriers grecs ou romains. Autres oeuvres dans les rues, les « visiteurs inouïs » de Davide Rivalta parcourent les rues jusqu’au 27 septembre pour la Monumental 2020 !
Retour en bord de mer à Antibes : dans le vieux village, le quartier du Safranier s’est déclaré « commune libre » au mitant des années 1960, en plein mouvement hippie, pour mener des actions culturelles à vocation locale, esprit qui perdure aujourd’hui malgré l’inévitable gentrification. La balade à l’ombre des ruelles adjacentes agrémentées d’arbustes fleuris est bien agréable mais le stationnement particulièrement difficile : les places réservées sont rarement disponibles, surtout en haute saison. Privilégiez donc les transports en commun, aisément accessibles, pour vous rendre sur place, et partez ensuite à la découverte des lieux. En suivant les remparts, face à la mer, outre le célébrissime musée Picasso, on trouve un musée archéologique tout aussi accessible qui retrace utilement les premiers âges d’Antipolis (ancien nom d’Antibes) avec, entre autres, un plan-relief spectaculaire et de beaux objets issus de fouilles. Toujours dans le vieil Antibes, sur la place Nationale, les nostalgiques de Raymond Peynet (1908-1999) et ses célèbres « amoureux », retrouveront l’atmosphère de cet artiste atypique dans un espace muséographique de plain-pied qui lui est entièrement consacré et abrite des expositions temporaires sur des thématiques liées au dessin de presse ou d’illustration. Ne quittez pas cette Antibes-là sans passer par le marché couvert, incontournable local qui alterne marché traditionnel le matin et artisanal l’après-midi : une ombre bienvenue en plein été et une atmosphère infiniment plus « authentique » que le bord de mer… où il n’est pas interdit de se rendre à la fraîche comme le font les autochtones; attention toutefois aux modalités drastiques d’inscription à l’handiplage cette année…
Direction Le Cannet, à quelques encablures de là : partie de la vaste conurbation qui s’étire le long de la côte, ses hauteurs abritent en toute discrétion de somptueuses villas qui ont vu se succéder de nombreuses célébrités du XXe siècle et quelques artistes parmi lesquels le peintre Pierre Bonnard (1867-1947) dont l’impressionnisme a fortement influencé la carrière mais qui s’est tenu à l’écart des grands mouvements artistiques ultérieurs pour développer son propre sens de la lumière et des couleurs. Ce « peintre du bonheur », également illustrateur, lithographe, graveur et sculpteur, est décédé au Cannet où un musée lui est entièrement consacré dans un espace parfaitement accessible, le seul au monde, matière à emplir ses yeux et laisser voguer son âme en toute accessibilité, y compris pour les visiteurs déficients sensoriels (trois tableaux sont décrits en braille, sonore et mis en relief). Amateur éclairé ou pas, n’hésitez pas à vous inscrire aux visites guidées, elles vous permettront de mieux appréhender l’oeuvre de cet artiste attachant et pénétrer dans son monde. Ascenseur, toilettes adaptées, emplacements de stationnement réservé en face et devant la mairie toute proche.
Du Cannet à Cannes, il n’y a évidemment qu’un trait de pinceau, lequel peut, sans surprise, vous conduire sur la fameuse Croisette, accessible de plain-pied (parking conseillé sous le palais des congrès) en quête de souvenirs du non moins fameux Festival, son escalier à tapis rouge et sa promenade des célébrités du cinéma qui ont imprimé leurs mains dans la terre cuite, ou de clichés « très Côte-d’Azur » : palaces, voitures de luxe, plages privées… Mais on peut aussi quitter la Croisette, emprunter une navette accessible et grimper au Suquet, quartier aussi méconnu que pittoresque des hauteurs duquel s’ouvre une vue à couper le souffle sur le littoral : faites-vous déposer devant l’église Renaissance, accessible sans encombre, vous pourrez ensuite redescendre en ville par vos propres moyens en admirant le paysage et les maisons typiques. Les vestiges du château médiéval attenant abritent le richissime Musée de la Castre mais vous devrez, pour y accéder en fauteuil roulant manuel, soit trouver des bras pour vous aider à franchir la pente redoutable qui y conduit, soit vous y faire déposer en voiture (stationnement réservé devant l’entrée, mais il faut au préalable se faire ouvrir l’accès à la colline du Suquet en le demandant par interphone aux bornes de contrôle). Ses collections d’arts premiers, qui font l’envie du musée parisien du Quai Branly, notamment pour les artefacts liés au chamanisme, méritent réellement le détour et le personnel fera tout pour faciliter votre visite, quitte à emprunter des voies détournées, de ces chemins secrets qui s’ouvrent parfois aux visiteurs handicapés…
Jacques Vernes, août 2020.
Sur le web, le site officiel Cotedazurfrance vous aidera grandement à préparer votre séjour, notamment culturel, avec un choix pléthorique d’activités. N’hésitez pas à prendre contact (par téléphone ou en vous y rendant) avec les différents Offices de tourisme dont le personnel est, depuis longtemps, formé à l’accueil des visiteurs handicapés et qui pourra vous orienter au mieux.