La France ne domine pas (encore) ce nouveau sport collectif, mais elle a franchi une nouvelle étape en attirant sur son sol quelques-unes des équipes de l’élite internationale lors d’un tournoi organisé à Bourges (Cher), dans les vastes installations parfaitement accessibles et adaptées du CREPS. Tournoi remporté par les Tchéques, vainqueurs en finale des Hollandais par un sévère 6-0, et dans lequel les Français ont terminé à la 5e place. Une véritable performance pour cette jeune discipline lancée il y a tout juste six ans, par le club nordiste du Iris Hockey Lambersart (Nord). « Je faisais une sensibilisation dans une école, raconte Daniel Choquel, l’un des membres actifs, et une élève en fauteuil roulant m’a demandé comment elle pouvait partager mon sport. » Après quelques mois de réflexion, il a créé en septembre 2013 une section « fauteuil roulant » qui s’adresse à tous : handicapés moteurs en fauteuil roulant manuel ou électrique, valides, hommes, femmes, jeunes, adultes, seniors. Conçu comme un sport plaisir, le hockey fauteuil accepte tous ceux qui sont en mesure de manier une crosse de hockey en se déplaçant en fauteuil, ce qui n’est pas simple. Un jeu vif, dynamique, avec très peu de fautes et arrêts de jeu. Il est joué sur un terrain de basket ou de handball cerné de barrières continues à angles arrondis qui servent à se passer la balle pour contourner l’adversaire. Outre celui de Lambersart, plusieurs clubs le proposent à Gleizé (Rhône), Grenoble (Isère), Les Herbiers (Vendée), Nantes (Loire-Atlantique) et Vire (Calvados) notamment. Près de 300 pratiquants sont actuellement recensés.
Juliette Watine, 31 ans dont 17 en fauteuil roulant, joue depuis deux ans dans le club de Lambersart et a intégré l’équipe de France l’an dernier : « Je suis un peu multi-sport. J’ai joué au basket fauteuil dans l’équipe de France féminine pour les jeux paralympiques de Rio 2016. J’ai arrêté le basket, je cherchais un sport collectif, je suis arrivée au hockey par des amis. Au hockey, on bloque moins les autres joueurs qu’au basket, on doit passer devant, on n’a pas le droit de le stopper dans son élan, il y a moins de contacts. Je joue en défense et je ne dois pas passer la ligne centrale, alors qu’au basket on attaque et on défend ensemble. » Côté aptitudes, elle estime qu’il faut de l’endurance, de la vivacité, du démarrage rapide, de la vision de jeu, toutes qualités d’un bon joueur de basket comme de hockey. Du fait de genoux qui l’empêchent de pratiquer debout, Fabienne Ernst, 28 ans, joue quant à elle dans l’équipe nationale suisse qui existe depuis plus de sept ans. Elle apprécie ce sport mixte auquel elle est venue grâce à un ami pratiquant qui l’a conviée à assister à un match : « Je trouve ce sport très cool. Tout le monde a sa chance, il faut simplement travailler la technique, la finesse de jeu, la vitesse, c’est très important dans ce sport. C’est pour tout le monde pareil. »
Fabrice Moreau a coaché l’équipe de France durant le tournoi : « J’ai découvert dans le hockey fauteuil une véritable aventure, très prenante. On est dans l’échange perpétuel des pratiques et des techniques. Je suis également joueur. » Il a dû apprendre à gérer et entretenir un fauteuil roulant, ce qui lui était totalement inconnu, avec des effets bénéfiques inattendus : « La maniabilité, la conduite du fauteuil, c’est quelque chose qui nous est pas habituel. J’avais des problèmes de dos avant de pratiquer, j’en ai moins aujourd’hui parce que je me mets en extension et ça a libéré mes lombaires ! Et quand on fait un entrainement intense, on vient à oublier qu’on a des jambes et quand on se lève, on ressent un blocage. Lorsque on le ressent, c’est qu’on a fait un bon entrainement ! » Il a également perçu les besoins particuliers des handisportifs qui nécessitent des temps de repos, de transports, de repas plus importants, une préparation sportive différente.
International mais pas paralympique.
« Le wheelchair ou floor hockey existait déjà à l’étranger, reprend Daniel Choquel. En Pologne, République Tchèque, Pays-Bas, Suède. Je suis allé dans ces pays pour comprendre comment ça se passait. Il fallait trouver des fauteuils roulants, des financements. » C’est la Fédération Française de Hockey qui assume sur son budget le développement et le financement de l’activité. « On utilise des fauteuils de sport classiques, poursuit Daniel Choquel. Dès le début on a intégré les valides, en fauteuils manuels uniquement. On joue avec des crosses et balles de floorball. Ça permet de se rencontrer de manière internationale. » Il n’envisage pas de créer un championnat mais plutôt d’organiser des tournois sur quelques week-end, comme le pratique le foot-fauteuil. Cela permet de réduire des déplacements effectués en voitures et fourgons, voyager en train étant inenvisageable avec au moins une demi-douzaine de fauteuils roulants de sport à emporter. « J’ai créé le premier collectif France en 2016, réuni au CREPS de Bourges qui dispose d’un établissement accessible et adapté, poursuit Daniel Choquel. Il a participé à l’open de Nottwil (Suisse) l’an dernier, aux ParaGames de Breda (Pays-Bas) en mai dernier. L’idée est d’inscrire le tournoi de Bourges dans le calendrier international. La Fédération Française Handisport observe l’activité et son développement. » La Fédération Française de Hockey et Daniel Choquel espèrent que le hockey fauteuil sera admis en démonstration lors des jeux paralympiques de Paris 2024, perspective enthousiasmante pour une discipline qui étoffe l’offre encore restreinte de sports collectifs en fauteuil roulant.
Laurent Lejard, octobre 2019.