Milan. Longtemps perçue comme austère, la capitale de la Lombardie (également capitale économique du pays) rafraîchit ses rues et son image. Fini le gris des murs et de la pollution : l’hyper-centre, rénové et partiellement piétonnisé, s’est récemment fermé à la circulation automobile (cartes européennes de stationnement dérogatoires) pour mieux s’ouvrir à la déambulation. Élégantes et élégants arborant les dernières tendances de la mode italienne, y croisent de plus en plus de touristes, venus (re)découvrir les merveilles architecturales et artistiques (y compris contemporaines) de l’opulente Lombarde. Les lieux « tendance » se multiplient et, si les prix demeurent nettement plus élevés qu’ailleurs en Italie, une certaine qualité de vie, en phase avec les aspirations urbaines actuelles, transparaît désormais, qui inclut les personnes handicapées; on ne s’en plaindra pas. Avec ses 1,3 millions d’habitants (plus de 7,5 pour l’aire urbaine), Milan revendique à juste titre une place de choix parmi les capitales européennes.
Son seul nom, hormis celui de ses mythiques clubs de football (A.C et Inter) renvoie immanquablement deux images : celle du Dôme, époustouflante dentelle gothique de marbre blanc qui trône en son centre et, non loin, celle de la Scala, scène lyrique la plus prestigieuse au monde. Les deux sont accessibles en fauteuil roulant : le premier de plain-pied, la seconde par ascenseur (entrée à gauche du portique). Si la visite intérieure du Dôme s’avère moins impressionnante que ses extérieurs (toits inaccessibles, mais point de vue élevé depuis la terrasse panoramique du grand magasin La Rinascente), la Scala enchantera autant le simple visiteur par son émouvant musée, que l’amateur d’art lyrique qui, s’il vient avec son fauteuil roulant, bénéficiera avec son accompagnateur d’un placement exceptionnel au parterre à un prix symbolique, occasion rêvée pour une expérience mémorable qui fera des envieux ! (Dans un genre différent, il en va de même au stade de San Siro…) Le quartier alentour, qui rassemble les grands noms de la mode italienne et débouche sur la splendide galerie Victor-Emmanuel II (en hommage au premier roi d’une Italie unifiée, qui l’a inaugurée en 1878) est un concentré de chic transalpin : le lèche-vitrines est gratuit…
Ce même quartier du Dôme abrite également la richissime bibliothèque Ambrosienne (partiellement accessible, élévateur dissimulé dans les marches du perron) dont les Vinci, Raphaël et autres Caravage ont fait le tour du monde. Non loin, l’ancien palais royal accueille des collections temporaires : l’accessibilité n’est pas simple (s’adresser au vestiaire) mais la visite peut s’avérer intéressante selon l’exposition en cours… Enfin, perle architecturale due au génie de Bramante, l’église Santa Maria Presso San Satiro, toute proche, est totalement ignorée des circuits touristiques : son choeur en trompe-l’oeil intrigue pourtant encore, plus de cinq siècles après sa réalisation !
Au nord de l’hyper-centre, dans son joli et typique quartier éponyme, la pinacothèque de Brera (accessible par ascenseur à partir de l’entrée du personnel) ravira les amateurs d’art : ouvertes par Napoléon 1er, les collections présentent des œuvres universellement connues, au premier rang desquelles le Christ Mort de Mantegna et un Souper d’Emmaüs du Caravage. Mais l’adresse la plus courue en la matière (surtout depuis le Da Vinci Code) demeure le réfectoire du couvent dominicain de Sainte Marie des Grâces, où la célébrissime autant qu’énigmatique Cène de Léonard de Vinci s’offre (sur réservation uniquement) aux regards des visiteurs dans une atmosphère recueillie. Plus spectaculaire, l’imposant château Sforza (du nom de la puissante dynastie qui régna sur la ville pendant la Renaissance et dont les armoiries, reprises des Visconti, sont désormais celles… d’Alfa Roméo !) héberge plusieurs espaces muséaux (archéologie, peinture, sculpture, arts décoratifs) à l’accessibilité parfois aléatoire mais au personnel réellement attentionné : n’hésitez pas à demander de l’aide, vous gagnerez du temps.
Milan cache, par ailleurs, d’autres trésors : les usagers du train connaissent bien, par exemple, l’énorme gare centrale Art Déco (époque fasciste) réputée l’une des plus belles du monde, qui trône au bout de l’avenue Vittor Pisani. Mais on sait moins que le cimetière monumental, située au nord de la seconde enceinte, renferme de remarquables tombeaux, dont celui du chef d’orchestre Toscanini (Verdi est inhumé dans l’oratoire de sa Casa di riposo, place Buonarroti). Un très vaste espace, spectaculaire, agrémenté d’arbres centenaires, qui allie promenade et méditation. Ossuaire et panthéon sont inaccessibles, mais le reste est de plain-pied. Plus festif, au sud du centre-ville, le quartier des canaux (navigli) rappelle la très ancienne vocation marchande de la cité. En cours de réhabilitation, c’est un endroit branché où l’on peut visiter quelques galeries « alternatives » ou prendre un repas dans une atmosphère détendue.
Bergame. À une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Milan, la ville où le compositeur Donizetti vit le jour et mourut déploie ses fastes architecturaux et sa douceur provinciale. Fondée par les Étrusques, la ville a connu divers conflits et dominations mais, presque continûment, la prospérité. Épargnée par les bombardements, le visiteur d’aujourd’hui peut y découvrir un paysage urbain remarquablement mis en valeur. La ville basse est la partie la plus récente, où se concentre la vie quotidienne des Bergamasques. Une vaste zone piétonne permet d’y promener en toute sérénité. Si le très beau théâtre Donizetti (accessible) ne propose plus, comme jadis, une saison lyrique d’exception (budget oblige) et si la richissime Academia Carrara est fermée pour de longs travaux de rénovation, il reste encore beaucoup à découvrir à Bergame. À commencer par les églises (accessibles avec aide) qui, comme ailleurs en Italie, dissimulent souvent des joyaux dus aux plus grands artistes du Moyen-Âge ou de la Renaissance : une vraie chasse au trésor !
On accède à la ville haute en voiture (indispensable), d’où le panorama est splendide sur la vallée. C’est la partie la plus ancienne de la cité, pavée (hélas) comme il se doit, parfois escarpée et, toujours, très fréquentée par les touristes. Parking dérogatoire à l’intérieur pour les véhicules arborant la carte européenne de stationnement. On se presse dans les ruelles étroites, et pour cause : c’est un musée à ciel ouvert. Accessible de plain-pied par la place Rosate, la basilique Sainte Marie Majeure est une splendeur de style roman lombard dont l’intérieur « baroquise » jusqu’à l’extase ! Ne manquez pas, devant le choeur, les marqueteries de Lotto (artiste très actif dans la région au début du XVIe siècle) et le tombeau de Donizetti, l’enfant du pays. Le quartier, outre des échoppes, présente par ailleurs de majestueux palais privés qui ouvrent de temps à autre leurs portes au public.
Le palazzo Terzi, par exemple, est accessible de plain-pied. Renseignez-vous sur place et n’hésitez pas à pousser la porte : il n’est pas rare que des membres de très anciennes familles aristocratiques (francophones pour la plupart) y reçoivent leurs visiteurs eux-mêmes, et en toute simplicité. Par ailleurs, contrairement à Milan, l’arrière-pays de Bergame n’a pas trop souffert de l’industrialisation et l’on peut s’y égarer avec bonheur dans des paysages de carte postale.
La palme revient évidemment au lac d’Iseo, tout proche, qui a su résister à la pression touristique, mais on fait de belles découvertes du côté de San Pellegrino (celui de l’eau minérale). Autres paysages de rêve sur les bords du lac de Garde, dont les palais de la rive occidentale servirent de ministères et résidences aux dignitaires fascistes de la tristement célèbre République de Salò : les pensionnaires du luxueux hôtel qu’est devenu la villa Feltrinelli ignorent sans doute que Mussolini y résida… Sachez, dans un autre domaine, que si l’éblouissante villa de l’écrivain D’Annunzio (Vittoriale) est totalement inaccessible, il est possible, avec un peu d’aide, d’emprunter le bac qui relie la romaine Desenzano à la romantique Sirmione. C’est d’ailleurs, eu égard à l’énorme fréquentation touristique et à la quasi-impossibilité de stationner, la meilleure solution pour passer quelques heures magiques… si l’on évite les périodes de forte affluence.
Idéalement située au-milieu des deux lacs, de Garde et d’Iseo, la discrète Brescia réserve l’authenticité de ses charmes aux visiteurs les moins pressés. Rien de tapageur mais une qualité de vie étonnante pour une ville de près de 200.000 habitants dont l’industrie est la ressource principale. Hormis un joli centre-ville préservé, animé et piétonnier, on peut y découvrir les vestiges étonnants de ce qui fut une opulente cité romaine. Un musée parfaitement accessible a été inauguré récemment, où l’on pourra survoler (au propre comme au figuré) une part non négligeable de la vie quotidienne antique mais également médiévale et jusqu’à la Renaissance tardive. La vieille ville et ses petites rues animées réservent quelques surprises, dont un Duomo vecchio au choeur circulaire. La place de la Loggia s’orne, quant à elle, d’un hôtel de ville aux allures de théâtre à la construction duquel Palladio aurait travaillé. À Brescia, plus qu’ailleurs en Lombardie, l’accueil des habitants est attentionné et chaleureux : un goût de revenez-y !
Jacques Vernes, août 2008.
Sur le web, le site bilingue (italien-anglais) de la région Lombardie propose une information généraliste mais sans mention d’accessibilité. Pour Milan, le site ressource Milano per tutti rassemble, toujours en italien et en anglais, un maximum d’informations permettant de préparer son voyage en toute sérénité. Pour des données plus générales (mais utiles, notamment en ce qui concerne les événements culturels), visitez le site officiel Milano per me. Bergame propose, quant à elle un site Internet généraliste en partie francophone dont la section Bergamo per tutti concerne l’accessibilité. Le site officiel de Brescia est plus basique mais bien documenté; l’association Slow Time propose un guide d’accessibilité comportant des itinéraires adaptés de visite, également disponible en version papier.