Le Béarn, ancien état souverain rattaché au royaume de France en 1620, sous Louis XIII, constitue toujours un territoire un peu à part où l’ancrage local reste fort et le centralisme parisien lointain. Sa géographie se répartit grosso modo entre la « plaine » de Pau et les vallées de Barétous, d’Aspe et d’Ossau, parcourues par les fameux gaves (torrents), la première étant plus développée industriellement que les secondes où se concentre néanmoins l’essentiel du tourisme. « À part » mais pas frondeur, ce vieux pays a donné à la France, outre un roi réconciliateur (Henry IV), nombre de politiciens modérés parmi lesquels le plus célèbre, actuel maire de Pau, est sans doute François Bayrou dont le destin faillit être national…
La figure d’Henri IV, on la retrouve évidemment au château de Pau, imposant monument fortement remanié au cours des siècles, qui domine la cité. Le « vert galant » y vit le jour en 1553 dans une carapace de tortue (Papa Bourbon et Maman Navarre voulaient faire dans le symbole original) dont un exemplaire plus ou moins authentique est présenté au public. Bémol : la majeure partie des collections du musée est inaccessible en fauteuil roulant. En attendant l’installation d’un ascenseur, la direction de l’établissement propose, sur réservation, outre la possibilité d’accéder en voiture jusque dans la cour principale, une visite guidée des extérieurs qui s’avère tout à fait passionnante et que complète utilement celle de quelques pièces du rez-de-chaussée, dont la célèbre « salle aux cent couverts » voulue par le roi Louis-Philippe. Une grande maquette permet de se faire une meilleure idée de l’aspect général des lieux, où des expositions temporaires sont régulièrement organisées. Prenez le temps de vous attarder aux jardins : la déambulation y est des plus agréables, avec vue imprenable sur les montagnes. Pau elle-même, ville jeune et sportive, ne manque pas d’attraits, ne serait-ce que pour le splendide boulevard des Pyrénées que l’on emprunte pour accéder au château : consultez cette page spécifique pour découvrir des suggestions de visites adaptées.
Entre les gaves de Pau et d’Oloron-Sainte-Marie s’étend le très réputé vignoble de Jurançon dont le nectar fait, depuis le Haut Moyen-Âge sinon l’Antiquité, les délices des repas de fête ou des apéritifs. Pour qui l’ignorerait encore, rappelons qu’il s’agit d’un vin blanc traditionnellement moelleux mais qui existe également en sec. Les cépages, petit et gros manseng plus quelques rares cépages de complément, sont typiquement locaux. Les vendanges sont exclusivement manuelles pour ne pas abîmer les fruits. Outre une route des vins mise en place dans les années 1990 par des viticulteurs indépendants, on peut découvrir l’histoire et la vinification du jurançon à la cave coopérative de Gan, labellisée Tourisme et handicap, où la visite des chais fondés en 1949 réserve quelques surprises dont une collection d’authentiques mosaïques romaines du IVe siècle ! La dégustation qui s’ensuit permet, en sus des vins traditionnels, de découvrir (avec modération bien sûr) un rosé délicieux ainsi qu’un rouge plus tannique qui feront merveille avec la gastronomie locale.
À une quarantaine de kilomètres à l’ouest de Gan, via Oloron-Sainte-Marie, Navarrenx est, sur l’un des chemins de Saint-Jacques de Compostelle, une petite cité fortifiée classée parmi les plus beaux villages de France. Les passionnés d’Histoire et d’architecture y trouveront leur bonheur, surtout en suivant l’une des visites guidées proposées par l’Office de Tourisme. La déambulation, de plain-pied, ne pose globalement pas de problème quand on se déplace en fauteuil roulant… sauf à vouloir escalader les bastions ou descendre au fond de la fontaine.
Non loin de là, en poursuivant vers l’ouest, un poste de douane signale l’étonnante principauté de Laàs, bourg en déshérence qui n’a pas voulu subir le sort de ses semblables et dont le maire, aussi dynamique qu’obstiné, a tout fait, jusqu’au plus haut niveau de l’État, pour que son village demeure sur la carte. Pari réussi depuis 2014 grâce à la mobilisation de tous, d’ici et d’ailleurs, certains célèbres, l’implantation d’une fabrique de bérets complétant l’offre essentiellement touristique : la curiosité attire ici des visiteurs du monde entier, notamment à l’occasion des très courues Trois heures de la Brouette, pas si loufoques que ça puisqu’homologuées au livre Guiness des records… À l’entrée de la commune, autre lieu festif (Transhumances musicales) le château XVIIe devenu Musée Serbat, du nom de ses derniers occupants qui en ont fait don à la commune, déploie le charme de ses riches collections anciennes (meubles et tableaux in situ) en toute accessibilité. Non seulement les lieux, desservis par ascenseur, sont labellisés Tourisme et handicap (sauf l’escape game récemment ouvert) mais il est en outre possible, sur réservation, d’utiliser la version adaptée d’une voiturette de golf pour parcourir les allées du parc. Sachez enfin, si la principauté vous séduit, que vous pourrez en devenir officiellement citoyen, passeport à l’appui, voire vous y marier en bonne et princière forme !
À une vingtaine de kilomètres plus au nord, Salies-de-Béarn est une petite ville pittoresque dont la fortune s’est bâtie, dès le haut Moyen-Âge, grâce au sel dont regorge son sous-sol et qui lui a donné son nom (que l’on prononce saliss). Une saline y est toujours en activité, dont une installation muséographique accessible de plain-pied permet de comprendre l’histoire et le fonctionnement. Les gourmets apprécieront d’apprendre que le sel produit ici est préconisé dans le cadre de l’IGP Jambon de Bayonne… mais entre aussi dans la confection de chocolats chez le célèbre pâtissier local Lavignasse. Le bourg lui-même présente deux visages liés à ce riche sous-sol : une partie médiévale, aux belles maisons préservées (notamment celle abritant un petit musée du sel dont seul le rez-de-chaussée est accessible en fauteuil roulant), liée à l’exploitation et au commerce de cette précieuse matière première, et une partie « hors les murs », XIXe, redevable au développement du tourisme thermal, où subsistent d’élégants bâtiments (thermes, casino, villas) à la découverte desquels nous vous recommandons les visites guidées organisées par l’office de tourisme.
Plein sud, au coeur des montagnes de la vallée de Barétous, les activités adaptées ne manquent pas (consultez cette page spécifique) mais le must reste sans conteste la grotte de La Verna, à La Pierre-Saint-Martin, véritable Graal des spéléologues qu’un aménagement EDF avorté a « miraculeusement » rendu accessible à tous, handicapés ou non. Découverte dans les années 1950, partie d’un réseau de 450km de galeries creusé par une rivière souterraine, cette gigantesque cavité est la plus grande au monde ouverte à la visite : si vaste, 250m de large sur une hauteur avoisinant les 200m, qu’une montgolfière a pu y flotter ! Plusieurs types de visites avec guide sont proposés aux visiteurs selon leur niveau; la plus facile, labellisée Tourisme et handicap, suit le long couloir d’accès qui ouvre de plain-pied sur la cavité : spectacle époustouflant garanti, où tous les sens sont sollicités et parfois mis à l’épreuve tant les dimensions de l’endroit échappent à l’entendement. N’oubliez pas vos jumelles et de quoi vous couvrir : la température ambiante ne dépasse guère 6°. Parking possible au plus près de l’entrée, sanitaires adaptés disponibles dans le bâtiment d’accueil situé en contrebas de la vallée. Un fauteuil roulant de prêt est mis à la disposition des personnes souhaitant épargner à leur propre engin les affres du terrain humide et parfois cahoteux.
Achevons cette « chasse aux pépites » par deux coups de coeur. Le premier, à Accous, en vallée d’Aspe, s’appelle Ludopia : un espace ludique à la fois écologique et solidaire qui accueille tout le monde en toute accessibilité dans un décor splendide où l’on peut passer une journée mémorable en famille au gré de la centaine de jeux disponibles. Le second, à Castetnau-Camblong, non loin de Navarrenx, est une maison d’hôtes hors du commun, la Villa Mouchoux, labellisée Tourisme et handicap, où une belle grande chambre a été spécialement aménagée pour les hôtes handicapés moteurs et dont les propriétaires, amoureux éclairés de leur région d’adoption, donnent au visiteur l’envie irrépressible d’en retourner approfondir la découverte !
Jacques Vernes, mai 2018.
Sur le web, le site officiel Pays Basque Béarn Pyrénées permet à la fois de s’informer sur la destination et préparer un séjour suivant différentes thématiques. Le handicap n’est pas oublié, qui bénéficie d’une rubrique spécifique rassemblant les différents sites labellisés (pour lesquels un travail remarquable a été mené, faisant du département l’un des meilleurs en termes d’offre), les hébergements ainsi que les activités et loisirs adaptés. Par ailleurs, les personnels des différents offices de tourisme, sensibilisés à l’accueil du public handicapé, sont à même de vous renseigner directement : n’hésitez pas à les contacter. Sachez enfin qu’Air France, qui a aimablement soutenu la réalisation de ce reportage, dessert en vols directs (selon les mois) Pau depuis Ajaccio, Bastia, Lyon, Paris-Orly et Roissy. Pau est également desservie via Lyon au départ de Brest, Caen, Lille, Marseille, Metz/Nancy, Nice et Strasbourg.