L’Algarve, dont nous présentions au printemps 2016 quelques aspects toujours d’actualité, ouvre son magnifique littoral non point sur la Méditerranée comme on le croit parfois mais sur l’Atlantique. Frontalière de l’espagnole Andalousie dont elle a hérité une partie du nom, issu au Moyen-âge de la conquête arabe (« Al Gharb al Andalus » Andalousie de l’ouest), la région présente une extraordinaire diversité de paysages, des plus sauvages aux plus urbanisés sous un soleil qui, de brûlant en été, se fait doux et caressant pendant les demi-saisons. Les prix aussi, sont plus doux, de même que l’atmosphère générale, et si la légendaire qualité de l’accueil ne faiblit jamais au Portugal, les professionnels sont plus disponibles, en particulier pour répondre aux besoins de la clientèle handicapée.
L’accessibilité générale n’atteint certes pas le sommet des standards européens mais la volonté d’amélioration est constante et, surtout, l’humain toujours présent : quel que soit votre handicap et le lieu où vous vous trouvez, vous ne resterez jamais en rade ! En fauteuil roulant, vous vous confronterez nécessairement aux légendaires pavés qui font le charme photogénique de la voirie locale et, selon la pente ou l’entretien, transforment celle-ci en véritable épreuve sportive mais sachez, selon les endroits, que vous pourrez également compter sur du pavé plat, un bon goudron ou du platelage bois notamment en bord de mer. Les stationnements réservés, globalement respectés, ne font jamais défaut, de même que les toilettes, y compris dans les environnements les plus inattendus.
L’arrivée en Algarve, quand elle s’effectue par les airs, se fait généralement à Faro. Avec ses près de 65.000 habitants, c’est la capitale de la région. Point le plus méridional du pays, elle a tout d’une cité moderne, y compris au sens XVIIIe du terme puisque, victime comme d’autres villes du terrible séisme de 1755 (dit de Lisbonne), elle a été presque entièrement reconstruite dans les années qui ont suivi dans un style discrètement élégant.
Quelque édifices antérieurs ont survécu, que l’on découvre au hasard de la déambulation intra-muros, où façades blanches, bougainvilliers et terrasses enchantent les sens (consultez cet itinéraire accessible). Rappelons que la gastronomie algarvienne, principalement basée sur les produits de la mer, est un must dont il serait dommage de se priver. Côté desserts, le pays tout entier en propose autant que la France de fromages : ici c’est au sublime dom Rodrigo, petit bijou à l’oeuf niché dans son écrin, que vous devrez absolument goûter ! Les visiteurs les plus pressés, après une telle dégustation où il faut prendre son temps, pourront emprunter le petit train touristique (accessible par rampes amovibles) en dépit des inévitables cahots dus aux pavés évoqués ci-avant : il permet en outre de découvrir les parties contemporaines de la ville avec quelques jolis points de vue.
Côté monuments, signalons la spectaculaire cathédrale débordant d’ors et d’azulejos, accessible par une longue rampe, ainsi que, non loin de là, le musée municipal installé dans un ancien couvent que ponctue un cloître de vastes dimensions, où les collections ethnographiques et archéologiques sont de grand intérêt. L’accès, ici, se fait de plain-pied mais l’étage est inaccessible, comme souvent ailleurs dans le pays, d’où la gratuité offerte aux visiteurs handicapés.
Le port de Faro, outre la plaisance, permet d’emprunter un train côtier parmi les plus poétiques au monde et qui pousse, le long de la lagune, jusqu’à la frontière espagnole : consultez l’onglet « informations utiles » sur la page de l’office du Tourisme mentionnée ci-avant. On peut également, depuis le port, embarquer pour une demi-journée ou plus en direction des îles qui parsèment la lagune (Ria Formosa), laquelle s’étend également jusqu’à la frontière espagnole, sur des dizaines de kilomètres.
Certaines compagnies disposent de petits navires à fond plat accessibles en fauteuil roulant moyennant un peu d’aide ; débarquer sur les îles s’avère en revanche plus ardu faute d’appontement mais, comme on le signalait plus haut, les bras ne manqueront jamais à qui en a besoin !
Cet écosystème, royaume harmonieux des oiseaux et des pêcheurs, est protégé des fureurs de l’océan mais non des marées qui, au fil de la journée, dévoilent ou engloutissent certains îlots. Celui de Farol, en particulier, est un petit paradis de cabanoniers que l’on peut aisément visiter en fauteuil roulant en empruntant de préférence les compagnies régulières qui le desservent depuis les ports de Faro ou d’Olhão (prononcez Olian) et qui accostent sur l’unique ponton disponible.
Poussez jusqu’au phare : outre la promenade, sur sentiers bétonnés, entre les maisons proprettes entourées de fleurs, vous découvrirez un bar de plage accessible par rampe avec une vue des plus reposantes sur l’océan… et même des toilettes adaptées en contrebas !
Olhão, à laquelle un tourisme plutôt haut de gamme commence tout juste à s’intéresser, est demeurée une ville authentique où la déambulation dans les zones piétonnières est des plus agréables : le pavé, ici, sait se faire discret.
Si l’histoire mouvementée de cette région âprement disputée vous intéresse, faites un crochet par le musée municipal (gratuit) situé dans l’ancienne prud’homie de pêche, il est parfaitement accessible en fauteuil roulant, étage compris, et le personnel y est de très bon conseil.
Marquant la limite du centre-ancien avec le port, vous ne pourrez pas faire l’impasse sur les deux bâtiments de brique qui abritent le marché (et accessoirement des toilettes adaptées), dont une halle aux poissons que vous ne serez pas près d’oublier si vous aimez les produits de la mer réellement artisanaux. Faute d’emporter ces trésors dans vos bagages, dégustez-les dans les nombreux restaurants du port et faites le plein de conserves : vous ne trouverez ni moins cher ni plus frais ! D’une manière générale, mieux vaut acheter les produits artisanaux dans ces marchés communaux plutôt qu’en grande surface.
À un quart d’heure de voiture au nord d’Olhão, la petite ville d’Estoi (prononcez Estoï) voisine le spectaculaire site « paléochrétien » de Milreu où subsistent, outre de splendides mosaïques autour du thème du poisson, ce que l’on pense être un temple… païen édifié par un riche « réfractaire » dont la très vaste domus laisse entrevoir quelques pans de murs. L’endroit a été rendu accessible (espace muséal, toilettes, stationnement, rampes, maquette tactile) mais la topographie particulièrement accidentée doublée de graviers rend l’exploration parfois hasardeuse en fauteuil roulant.
Un peu plus au nord, la ville de São Brás d’Alportel dispose d’un très vaste complexe muséographie (Museu do Trajo) parfaitement adapté (plan tactile et braille, audioguide sur appli mobile) dont l’accès de plain-pied se fait par une entrée sur cour (côté parking.) Installé dans l’ancienne résidence d’un riche commerçant, ce passionnant musée ethnographique offre un véritable voyage dans le temps à travers costumes, outils et métiers, certains toujours vivants, tels le travail du liège ou de la paille dont une artisane de haut vol propose des démonstrations régulières. L’alignement de véhicules hippomobiles de la cour vaut le déplacement, de même que la paisible terrasse où prendre une collation à l’ombre des arbres…
Retour en bord de mer. Lovée autour du fleuve Gilão qu’elle enjambe sur un pont que l’on dit romain, Tavira est une cité salinière (par ailleurs « capitale du poulpe » pour les Portugais qui apprécient la finesse de ceux que l’on capture ici) dont les origines remontent à la Préhistoire. À l’instar de cette partie de l’Algarve, elle jouit également d’un tourisme raisonné qui alimente l’économie locale sans l’étouffer. Vous y trouverez d’ailleurs de très beaux équipements hôteliers.
La déambulation y est « sportive » en fauteuil roulant dans ses parties anciennes : n’hésitez pas à faire des sauts de puce en voiture pour admirer tel ou tel aspect de son urbanisme (le panorama depuis le jardin des ruines du château par exemple) ou empruntez le petit train touristique au prix toutefois d’un transfert obligatoire puisque cet équipement, contrairement à celui de Faro (qui appartient pourtant à la même compagnie), ne dispose pas de rampes d’accès. Les marais salants s’étendent ici à perte de vue, visitables librement et où l’on peut, quand l’opportunité se présente, discuter avec les saliniers dont la chorégraphie semble ne s’être jamais interrompue depuis l’Antiquité…
Plus loin en direction de la frontière espagnole, dominé par son intimidante forteresse (totalement inaccessible du fait de pavés défoncés), Castro Marim fut longtemps un site stratégique : ici s’extrayait en effet le sel le plus précieux du Portugal, véritable or blanc dont la production se poursuit aujourd’hui.
Un peu au nord du village, en plein parc naturel, un passage par le centre d’interprétation de la réserve naturelle s’impose : l’endroit, accessible via une pente caladée relativement roulante depuis le parking, offre non seulement un véritable balcon sur la région mais également des espaces d’interprétation du paysage et de son histoire particulièrement utiles, ainsi que de bons conseils de balades accessibles. Comme à Tavira, certaines salines se visitent, dont celle située sur la route de Vila Real de Santo António où des panneaux explicatifs permettent d’en mieux comprendre le fonctionnement. Le stationnement et la déambulation sont un peu chaotiques mais l’endroit est à ce point photogénique que l’on en oublie l’inconfort ! Un « spa salin » a été installé sur place : si ses installations ne sont pas accessibles aux clients handicapés moteurs (sauf à user des « bras » bénévoles mentionnés ci-avant) la terrasse de son bar donne matière à rêverie…
À Vila Real de Santo António, situé en bordure du fleuve Guadiana qui fait frontière avec l’Espagne, vous pourrez, entre autres denrées locales, acheter (toujours au marché municipal) de la fleur de sel à des tarifs défiant toute concurrence. Comme à Olhão, la déambulation en ville, également reconstruite après la catastrophe de 1755, est d’autant plus agréable que les pavés y sont tout autant « aimables. »
Outre la vaste place Marquis de Pombal (ministre qui releva le royaume de ses ruines après le tremblement de terre), vous égarerez vos pas ou vos roues au vaste centre culturel António Aleixo (ancien marché municipal) accueillant des événements, ferez peut-être un détour par les étonnants bains publics dont les toilettes sont adaptées, mais surtout pas l’impasse, près du port de plaisance, sur le musée des archives municipales qui témoigne, non sans émotion, de ce qui fit jadis la fortune de la région : la pêche au thon et les conserveries. C’est tout ce qu’il en subsiste avec, réparties le long du littoral, d’anciennes usines abandonnées ou transformées en complexes hôteliers de luxe : un autre monde…
Jacques Vernes, novembre 2022.
Sur le web, Visit Algarve présente en français des informations sur l’accueil et l’accessibilité des transports, circuits de visite, et toujours en français Tur4all des fiches détaillées sur des lieux à visiter, châteaux, musées, hôtels, offices de tourisme, plages, promenades avec platelage, etc. Tous nos remerciements à Accessible Portugal et Turismo do Algarve pour leur soutien dans la réalisation de ce reportage.